Pour la première fois, le Maroc se hisse au rang de premier fournisseur de tomates sur le marché européen, devançant ainsi l’Espagne. Un pur hasard ? non, le Maroc prend peu à peu la place de premier fournisseur pour l’Europe.
Le marché américain présente de bonnes opportunités. Textile et habillement viennent en tête. Des petites entreprises réussissent à faire des percées, signe que le marché est porteur. Les producteurs marocains doivent fournir un effort en termes d’emballages et de marketing.
Finalement, la kyrielle d’accords de libre-échange que le Maroc a signés avec des pays comme les Etats-Unis, la Turquie, la Tunisie, l’Egypte, la Jordanie et les Emirats Arabes Unis offre-t-elle réellement des opportunités d’affaires pour les professionnels et entreprises marocaines ? S’il est vrai qu’il faudra encore du temps pour que l’effet de ces accords soit perceptible sur le volume des échanges avec ces pays, professionnels, industriels et exportateurs sont unanimes pour dire qu’il y a des opportunités à saisir, malgré que l’Accord d’Agadir présente plus de menaces que d’opportunités. Certains n’ont pas attendu pour aller à la conquête de ces nouveaux marchés, et comme l’on pouvait s’y attendre, c’est le textile, secteur traditionnellement exportateur, qui se positionne déjà.
« Même la Tunisie, marché pourtant concurrent du nôtre sur ce secteur, présente de nombreuses opportunités dans ce sens, notamment en ce qui concerne le haut de gamme », souligne
M. Lahwel, chargé de mission au ministère du commerce extérieur.
L’accord avec la Turquie, grand producteur de produits textiles à l’échelle mondiale, offre également des opportunités pour les textiliens nationaux. « Ces derniers peuvent en effet s’approvisionner en Turquie pour pouvoir exporter sur l’UE en franchise de droits de douane. Les matières textiles turques présentent une solution compétitive pour les entreprises marocaines dans un contexte où il y a de sérieux risques de pertes de parts de marché en Europe à cause de la concurrence asiatique », explique Lamia Ismaili, chef de la division textiles au ministère de l’industrie et du commerce.
100 000 dollars de dessous et lingerie déjà exportés vers les Etats-Unis
Le textile marocain commence également à pénétrer le marché américain, même si c’est de manière progressive. L’accord de libre-échange liant les deux pays est entré en vigueur le 1er janvier 2006. Depuis cette date, bien des entreprises marocaines ont pu concrétiser des partenariats et même décrocher des commandes. En effet, les exportations de textile-habillement vers ce pays ont augmenté de 25% pour la période janvier-juillet 2006 en comparaison avec la même période de l’année 2005, passant de 130 MDH à 163 MDH. La part la plus importante a été celle des articles de bonneterie (+102%), suivis par les vêtements en chaîne et trame (+34%).
Le Magic Show, salon international de l’habillement qui se tient annuellement à Las Vegas, leur a permis de s’ouvrir et de découvrir le marché américain. De nombreuses commandes fermes ont ainsi été passées à cette occasion. C’est le cas, par exemple, de Somitex, spécialisée dans la confection de pantalons et chemises, qui a déjà signé un joint-venture avec une entreprise américaine qui dispose d’un réseau de distribution de 340 détaillants à travers tout le territoire américain. Modatric, spécialisée, elle, dans le pull-over et la grosse maille, s’est vu à la suite de cette foire commander 3 000 pièces.
Artisanat : le label Morocco fait recette
Autre exemple, celui de l’entreprise le Petit Poussin qui s’apprête à livrer, en ce mois de janvier, deux commandes de 25 000 pièces, essentiellement des vêtements pour enfants. L’entreprise marocaine avait rencontré son client américain pour la première fois au Magic Show lors de l’édition de février 2005.
Enfin, Benitex a d’ores et déjà exporté pour l’équivalent de 100 000 dollars en dessous et lingerie depuis l’entrée en vigueur de l’ALE Maroc - Etats-Unis. « Les collections haut de gamme trouvent un excellent écho auprès du consommateur américain qui, comme le démontrent différentes études de marché, aime dépenser », souligne Rabia El Alama, directrice de programme à l’Amcham (Chambre de commerce américaine au Maroc).
Autres produits qui s’exportent bien, ceux de l’artisanat marocain. « C’est le label Maroc qui s’exporte et qui séduit de plus en plus de marchés à l’international, notamment le marché américain », constate Mohamed Keddari, président de la Fédération des chambres d’artisanat. Les exemples de ce qui séduit le consommateur étranger, notamment américain, « puisque c’est ce marché qui intéresse de plus en plus les artisans nationaux », sont nombreux. A commencer par les articles en cuir. A Kénitra, un artisan, Omar Megdar, a réussi l’exploit de vendre ses produits sur le marché américain. A l’origine, un voyage à Washington et Miami durant lequel l’artisan a constaté les possibilités d’écoulement de produits artisanaux marocains. De retour, il décide de prendre le taureau par les cornes et de se lancer dans l’exportation vers les USA. « Jusque-là, j’exportais essentiellement vers l’Europe. Le fait de décider de me lancer sur le marché américain m’a permis de comprendre combien les deux mentalités sont différentes », explique cet artisan qui a décidé d’exporter des vestes en cuir et des tapis aux Etats-Unis. « Adapter mes marchandises aux normes américaines était le plus grand problème que j’avais à affronter. Pour les tapis, par exemple, il fallait changer toutes les unités de mesure, les Américains n’utilisant pas le mètre. Il en est de même pour les tailles des vestes, le traitement de leur cuir... », souligne M. Megdar qui devait envoyer sa première cargaison vers les Etats-Unis le 4 janvier 2007.
Pour Rabia El Alama, il suffit de savoir innover, dans tous les secteurs, pour intéresser le marché américain. Elle donne l’exemple de la société Arte Palma qui a réussi à placer une première commande de 15 000 dollars de chaussures en raphia. « Il s’agit là d’une excellente opportunité pour l’artisanat marocain qui a de grandes opportunités de business aux Etats-Unis », ajoute Rabia Al Alama.
A Errachidia, My Mustapha Idrissi a choisi de vendre un produit beaucoup plus original : des fossiles directement extraits des mines de la région d’Erfoud. Ses premières cargaisons, il les a fait parvenir aux Etats-Unis en 1999 déjà. Mais la cadence s’est accélérée après l’entrée en vigueur de l’accord de libre-échange. « Nous comptons actuellement trois types de clientèle aux Etats-Unis : des particuliers, qui commandent nos produits suite à une visite de nos show-room sur place, à Erfoud, des marchands à qui nous faisons parvenir par conteneurs des produits finis, polis, prêts à être vendus, et des artisans qui nous commandent essentiellement des blocs de pierres avec de très bons filons », souligne M. Idrissi. Et d’ajouter qu’il y a de grandes différences entre les goûts des Américains et des Européens. Les premiers préfèrent les matières à l’état naturel alors que les Européens préfèrent les produits bien polis et excellemment finis. « Nous vendons aux Américains des produits que nous ne réussirions jamais à écouler sur le marché européen », explique-t-il.
Et pour rester dans le secteur de l’extraction minière, il est à signaler que même le marbre marocain a réussi à infiltrer le marché des matériaux de construction de luxe pourtant très concurrentiel. Manar Marbre, entreprise marocaine, a ainsi réussi à exporter pour 8 000 dollars de marbre vers son client américain, une entreprise installée à Seattle, sur la côte ouest.
Une demande potentielle sur les vins et les produits bio
Cette recherche de la nouveauté de la part du consommateur américain devrait également intéresser les industriels agro-alimentaires. Les vins, conserves de fruits et légumes et dattes, notamment, représentent autant de niches à exploiter. Si l’on prend l’exemple de l’huile d’olive, la consommation américaine a été multipliée par dix lors des six dernières années. « Si l’on prend en compte le fait que l’huile d’olive américaine ne satisfait que 0,6 % de la demande interne, on peut facilement imaginer les opportunités qui s’offrent aux producteurs oléicoles marocains », souligne l’Amcham qui, en mars 2006, avait réalisé une étude de marché dans ce sens, en collaboration avec le ministère de l’agriculture et l’USAID. Cette étude, qui a montré que les prix de vente du demi-litre d’huile se situent entre 20 et 40 dollars (160 et 320 DH), avait cependant insisté sur le rôle que peut jouer le conditionnement de l’huile face à la compétition des autres pays du pourtour méditerranéen.
Le développement des segments bio pourrait également recéler des opportunités intéressantes pour les agro-industriels marocains tant le besoin est grandissant en la matière. Selon la même étude de la Chambre américaine, de grandes enseignes américaines spécialisées en bio peuvent constituer des clients potentiels, notamment Whole Foods, Trader Joe’s et Harris Teeter. D’autres produits alimentaires sont également très demandés sur le marché américain : légumes ou fruits séchés ou en poudre, épices et produits de garniture (câpres, cornichons, champignons, échalotes, tomates, cerises, fonds d’artichaut...). Cela dit, pour pénétrer le marché américain, il faut faire un effort sur l’emballage qui doit être plus attrayant. « Il ne suffit pas de se retrouver sur le rayon d’un grand magasin américain, il faut, en plus, s’y distinguer », souligne la responsable de l’Amcham.
La vie éco - Fadoua Ghannam
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