Vidéo : dans l’enfer de Bouya Omar
Le ministère de la Santé s’est donné deux ans pour fermer Bouya Omar, mausolée où près de 800 personnes sont prisonnières sous prétexte qu’elles souffrent de maladies mentales...
L’opération d’évacuation des personnes souffrant de troubles psychiques, pensionnaires du mausolée "Bouya Omar", à environ 30 km de la ville de Kalaâ Sraghna, au sud du Maroc, a commencé jeudi.
Les pensionnaires de ce mausolée étaient enchaînés aux mains et aux pieds dans des conditions inhumaines dans ce lieu lugubre. L’initiative baptisée "karama" (dignité), menée par le ministère de la Santé, vise à évacuer ces malades mentaux vers des hôpitaux spécialisés, où ils seront pris en charge gratuitement, a affirmé le ministre de la Santé El Hossein El Ouardi.
Pour mener à bien cette opération, le ministère a augmenté la capacité d’accueil des hôpitaux psychiatriques, et créé de nouveaux services hospitaliers intégrés, précise le département de la Santé dans un communiqué, selon lequel 34 médecins et 122 infirmiers spécialisés dans la psychiatrie ont été recrutés.
Un budget de 40 millions de dirhams a été mobilisé pour le transfert des patients des alentours du mausolée Bouya Omar vers les hôpitaux et les services de santé des régions et provinces d’origine de ces malades. Plus de 60 ambulances ont été mises à la disposition de cette opération.
Sur les 800 pensionnaires que compte ce mausolée, 70% d’entre-eux ne bénéficiaient d’aucun traitement, présentent des signes de violence et souffrent de malnutrition.
Au mausolée de Bouya Omar, l’atmosphère est irréelle, la folie y côtoie le charlatanisme. A l’intérieur du sanctuaire, il est fréquent de voir un malade se taper violemment la tête contre le tombeau du marabout, ou un pensionnaire malade enchaîné des mains et des pieds.
D’après la légende cultivée par ceux qui ont intérêt à ce que ces croyances persistent, on raconte que les bénédictions de Bouya Omar, saint homme qui a vécu dans cette région au XVIe siècle, guérissent plusieurs maladies.
Certains pensionnaires sont convaincus qu’un tribunal de "jnoun" les a condamnés à rester 3, 4 ou 5 ans autour du mausolée pour y être lavé de leurs pêchés et d’autres pour guérir d’une maladie psychique.
Des recherches déjà menées sur place ont démontré que plusieurs dizaines de patients souffraient d’états infectieux et de certaines maladies graves nécessitant une hospitalisation d’urgence.
Parmi les pensionnaires de Bouya Omar, on retrouve des enfants de professeurs universitaires, de hauts gradés de la police et même de médecins et de trafiquants de drogue, venus chercher la "baraka" du marabout, où confiés par leurs familles aux gérants de ce haut lieu du charlatanisme, pour s’en débarrasser.
Le ministre met ainsi fin à un juteux business qui profitait à plusieurs centaines de personnes qui gravitent autour de ce mausolée, attirant plus de 30.000 visiteurs par an, et dont seuls les frais d’hébergement des malades représentent annuellement pas moins de 8 millions de dirhams.
Jeudi matin, personne n’a osé s’opposer au lancement de l’opération d’évacuation du mausolée par les autorités. Le défi était de taille, mais le ministre de la Santé a tenu sa promesse d’évacuer ce sanctuaire et de prendre en charge les malades. Il avait juré : "c’est soit moi ou Bouya Omar". Comme quoi, la volonté politique peut faire des miracles.
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Le ministère de la Santé s’est donné deux ans pour fermer Bouya Omar, mausolée où près de 800 personnes sont prisonnières sous prétexte qu’elles souffrent de maladies mentales...
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