Plusieurs artistes marocains ont été accusés de plagiat ces dernières années. Les productions signalées ont été supprimées de YouTube.
Après une tournée au Maroc, le rappeur XXL prépare son second album, dont la sortie est prévue début 2008. Rencontre avec l’enfant terrible du rap marocain.
Depuis quelque temps, on n’entend plus tellement parler de Bigg. Vous êtes toujours dans la course ?
Je viens de finir ma tournée. Et là, on sort du ramadan, qui n’est pas vraiment le mois idéal pour organiser des concerts, mais plutôt pour dormir.
Vous êtes en quelque sorte en hibernation ?
Pas vraiment. Je suis en train de travailler sur mon second album. J’y consacre toute mon énergie et il faut dire qu’il y a beaucoup à faire. Pour mon premier album, je n’avais pas tout donné. J’étais au four et au moulin, je devais travailler les textes et la mélodie. Là, je me concentre davantage sur l’écriture des textes. Mais parallèlement, je travaille beaucoup sur la stratégie de distribution et de communication : le concept, les clips, le dossier de presse…
Donc il n’y aura rien dans les bacs avant 2008…
C’est certain. Mais dès le premier trimestre, je sortirai deux singles. L’album devrait quant à lui sortir en avril.
C’est un album avec plus de moyens ?
Financièrement, pas tellement. En fait, je me suis plus investi du côté des paroles.
Vous aimez garder un œil sur tout, vous n’avez pas de manager, vous n’avez confiance en personne ?
Ce n’est pas totalement vrai. J’ai demandé aux gens avec qui je collabore de me soumettre des mélodies, sur lesquelles j’apposerai mes textes. Et puis, pendant les tournées, mon meilleur ami fait office de manager, en servant d’intermédiaire avec les organisateurs et en s’occupant de la logistique. Mais là, comme on n’est pas en tournée, il chôme un peu.
Il paraît que vous avez quitté Clic Records, le label qui devait produire votre deuxième album…
C’est une rumeur infondée. J’ai signé un contrat avec Clic Records, en vertu duquel cette société produira mon deuxième album. Ce contrat est toujours en cours et il sera mené à son terme.
Vous comptez vous lancer dans la production un jour ?
Pour l’instant, ce n’est pas tellement d’actualité. Mais il est certain que j’y pense. C’est planqué dans un petit coin de mon cerveau. J’y viendrai quand je sentirai que je n’avance plus musicalement. Histoire de quitter la scène la tête haute.
Que pensez-vous de l’éclosion de cette nouvelle scène et de ce phénomène qu’on qualifie de “movida marocaine” ?
Pour moi, il n’y a pas de nouvelle scène. En réalité, elle est nouvelle pour ceux qui viennent de la découvrir : les médias, les journalistes, un certain public, etc. La plupart des groupes que vous découvrez sont là depuis une bonne dizaine d’années. La différence, c’est qu’aujourd’hui, ils ont plus d’audience.
Comment expliquez-vous justement cet engouement ?
Il y a quelques années, on ne pouvait pas parler de public. Ils étaient vingt à nous soutenir. Je me souviens, lors de mes premières scènes, je récoltais des troisièmes doigts en guise d’encouragement. Mais certains rappeurs et artistes ont réussi à fédérer des gens, par-delà leur appartenance à un quartier. Puis, ils ont commencé à se faire connaître sur Internet.
Dans “Bladi blad”, vous dites vouloir tirer sur ceux qui volent le pays. C’est à prendre au premier degré ?
Ma seule arme, c’est ma voix. Et si quelqu’un, comme je le dis dans la chanson, vole mon pays, eh bien je le flinguerai dans mes textes. Je ne suis pas du tout dans la mouvance gangsta rap. D’ailleurs, je déteste cet état d’esprit, et je n’ai aucun respect pour ces pseudo-gangsters à la petite semaine. Le dernier magnum qu’ils ont touché, c’était une glace.
Qu’avez-vous pensé des élections ?
Personnellement, pas grand-chose. Les élections, on y participe ou on n’y participe pas. Après, pas besoin de disserter sur les résultats.
Et vous, vous avez voté ?
Non, je ne suis pas allé voter. Les gens vont dire : Bigg se contredit. Il appelle les gens à voter et il n’est même pas fichu de le faire. Mais je m’en fous. J’estime que j’ai un certain impact sur les gens. Donc, je me dis que je peux me tromper à mon niveau en n’allant pas voter, mais ce n’est pas une raison pour encourager les autres à faire pareil.
Vous auriez pu voter pour qui ?
En fait, je pense qu’un artiste ne doit pas voter, ou du moins, ne pas afficher sa préférence pour tel ou tel politicien.
Ce qui ne vous a pas empêché de vous rendre à un meeting de l’USFP…
Je me suis effectivement rendu à un meeting de l’USFP. Mais j’y suis allé pour livrer une prestation artistique, et non pour les soutenir dans leur campagne électorale. Et si je les avais soutenus – ce qui aurait été mon droit le plus absolu - je l’aurais annoncé officiellement et j’aurais composé un morceau spécialement dédié au parti. Je n’y suis pas allé pour l’argent non plus, vu que mon cachet me permettait tout juste de payer le DJ et de rentrer dans mes frais. Si je me suis rendu à ce meeting, c’était uniquement pour montrer aux responsables de ce parti que sans moi, ils n’arriveraient pas à remplir le Complexe Mohammed V. En clair : je leur ai montré que j’avais plus d’impact qu’eux.
Pendant le meeting, vous avez changé les paroles de vos textes, pour les rendre plus politiquement correctes ?
Ce n’est pas le genre de la maison. Devant les ténors de l’USFP, j’ai interprété “Bladi Blad”. Une chanson où je parle de la malhonnêteté des députés. J’y chante que la moitié des parlementaires dort, tandis que l’autre moitié est aux abonnés absents. Je pense que certains ont dû se sentir visés pendant le meeting.
Donc c’est officiel, Bigg ne sera pas la mascotte de l’USFP ?
Non, c’est sûr. L’USFP est le dernier parti que je soutiendrai. Après le PJD, bien sûr.
Bigg, il paraît que vous aimez beaucoup l’argent…
C’est vrai, j’aime l’argent, mais pas plus que la plupart des êtres humains. Et à la différence près que je l’assume et que je le dis haut et fort. Certains artistes estiment qu’ils méritent un certain cachet, et sont quand même prêts à se produire pour dix fois moins. Moi, je refuse de m’autobrader. Je réclame ce que je pense mériter.
Vous estimez que les cachets qu’on vous propose ne sont pas assez intéressants ?
Je vais vous expliquer comment ça se passe aujourd’hui dans les festivals. Les organisateurs distinguent deux catégories de chanteurs : les groupes marocains d’un côté et ce qu’ils appellent “les artistes” de l’autre. Les premiers perçoivent quinze mille dirhams pour une prestation, tandis que les seconds touchent 500 000 pour venir se produire au Maroc. Certes, ces derniers sont des stars à l’étranger. Mais je pense que moi aussi j’ai un public au Maroc, qui se déplace pour venir me voir. J’entends être rétribué proportionnellement à mes contributions. Mais attendez que je passe sur MTV. Là, je réclamerai un cachet dix fois supérieur.
Que répondez-vous à ceux qui disent que Bigg a pris la grosse tête ?
Je leur dis d’aller se faire f...
TelQuel - Youssef Ziraoui
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