Bataille des femmes : le masculin pluriel des candidatures aux communales

30 juillet 2003 - 11h19 - Maroc - Ecrit par :

A l’approche de l’ouverture de la campagne électorale des élections communales, la bataille des candidatures fait rage. La place coûte cher et d’un bout à l’autre de l’échiquier politique, les femmes sont le maillon faible d’une course électorale.

Dur, dur d’être une femme ! C’est encore plus dur d’avoir des velléités de candidature quand on est femme, intéressée par la gestion locale et persuadée que la démocratie prend sa source dans le principe de l’égalité. A quelques semaines de l’ouverture de la campagne électorale des élections communales, la course aux candidatures bat son plein et les luttes font rage. Dans un scrutin panaché - listes en milieu urbain et uninominales dans le rural -, les premières places coûtent cher et tous les coups (surtout ceux bas et tordus) semblent permis.

D’un bout à l’autre de l’échiquier politique, d’un parti à l’autre, les militantes vivent au quotidien cette affligeante réalité. Les législatives, les 30 députées élues par la grâce de la liste nationale ne seraient-elles plus qu’un presque lointain souvenir, à l’approche des communales ? Du côté de la commission de coordination des secteurs féminins qui réunit 10 partis politiques, on veut pourtant y croire. Les actions de lobbying n’ont jamais cessé. Elles ont fait le tour des leaders, rencontré le Premier ministre, tout fait, y compris réfléchir à un quelconque artifice juridique, pour que femmes et élections locales ne fassent pas chambre à part.

Récit de Bouchra Khyari, députée du Front des forces démocratiques. « La liste nationale s’est avérée impossible à mettre en place pour ces élections. Nous avions ensuite pensé au principe de la parité au sein même de la liste des candidats : un homme-une femme. On nous a rétorqué que nous frôlions l’anticonstitutionnalité et que de toutes les manières la Constitution consacrait le principe de l’égalité. Il fallait donc penser à autre chose. C’est ainsi qu’est née la charte d’honneur que le Premier ministre n’a pas hésité une seconde à soutenir lors de son bilan d’étape dressé sous la coupole ».

La charte d’honneur n’est pas une première. Aux législatives, le département ministériel que dirigeait l’usfpéiste Nouzha Chekrouni l’avait proposée aux partis politiques.

De la quantité à la qualité

Elle connaîtra le sort que l’on sait. « Il y a bien eu des hommes sur la liste nationale, des femmes tête de liste et militantes toutes fraîches. La liste nationale et à travers elle les femmes étaient une fois de plus sous la tutelle des dirigeants politiques », se souvient avec amertume une militante, membre de la commission nationale des secteurs féminins des partis ; laquelle se réunit justement ce jeudi 31 juillet. Au menu de cette réunion, les mécanismes pour que la charte d’honneur ne soit pas un monument de bonnes intentions mais un engagement ferme et volontaire à la participation des femmes aux élections communales.

Les formations politiques sont-elles prêtes à présenter des candidates ? Là est toute la question. « Soyons réalistes. En milieu rural, une telle consultation électorale se joue sur la personne. Et tant qu’existeront les fiefs et les notabilités… Il ne faut pas se leurrer, les partis en sont encore à raisonner en termes de quantité d’élus et non pas de qualité », analyse une membre de bureau politique avant de s’empresser de préciser qu’il ne s’agit pas du tout de « présenter une femme pour le principe ». Bouchra Khyari abonde exactement dans le même sens : oui à la participation féminine mais pas à la participation de la femme-alibi. Il y a une semaine, devant le conseil national des femmes du FFD, elles étaient nombreuses à évoquer la conjoncture politique que traverse le pays et à affirmer « qu’elles étaient prêtes à céder la place à un homme, si elles n’étaient pas sûres de gagner ».

Alors que la bataille des candidatures et la course aux cinq premières places sur la liste font rage, les militantes et les dirigeantes des secteurs féminins tentent d’organiser la résistance. « A travers toutes les régions, nous avons essayé de sensibiliser les femmes pour qu’elles soient présentes dans les locaux des sections et qu’elles s’imposent pour figurer aux cinq premières places. Personne ne leur fera de cadeau », témoigne Mme Khyari.

Les femmes contribuent-elles à changer la pratique politique, en ces temps où il est de bon ton de tirer à boulets rouges sur les partis ? « Il est encore trop tôt pour procéder à une évaluation de l’action des 35 femmes députées et de répondre à la question de savoir si elles ont changé la pratique parlementaire. Je suis convaincue que leur rentabilité sera visible à la rentrée législative prochaine », répond une députée. « La Marocaine contribuera forcément à changer la pratique politique. Tout simplement parce que la femme fait passer l’intérêt général bien avant l’ambition personnelle », réplique comme en écho Bouchra Khyari.

Lematin

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