Malika El Omari n’a pas été placée dans une maison de retraite, a affirmé une source proche de l’actrice marocaine, démentant les rumeurs qui ont circulé récemment sur les réseaux sociaux à son sujet.
Produit par Jean-Jacques Beineix et réalisé par Jean-Pierre Thorn, un film sur les femmes maghrébines de France connaît, sans pub ni presse, un succès étonnant. Récit
C’est l’histoire d’un film qui devait mourir. Un film qui, finalement, s’est fait une vie hors piste commerciale. « Allez Yallah ! » raconte des femmes venues du Maroc en tournée dans les cités de France. Elles ont le regard fier, aucune appréhension devant le silence qu’on leur oppose, même pas peur quand des cailloux leur tombent sur la tête du haut des immeubles. Les caravanières vont à la rencontre des autres, ces mères qui vivent derrière le voile et dans le bitume français, pour leur dire combien compte leur condition, pour leur rappeler que la liberté est un combat, qu’elles ont des droits. Et c’est ici, en France, qu’une adolescente clame fièrement à la caméra que les femmes adultères, oui, doivent être « corrigées ».
« Allez Yallah ! » est donc une balade au bord de l’intégrisme, dans le vertige des précarités. Bref, un truc ni rigolo ni mélo qui dure près de deux heures, qui ne s’exclame pas mais interroge, et dont, évidemment, les télévisions n’ont pas voulu. Tant pis. Jean-Pierre Thorn, le réalisateur, et l’équipe de Jean-Jacques Beineix, le producteur, ont fait sans rien.
Sauf l’unique soutien de la région Ile-de-France. Beineix a pris le risque d’aller au bout, il a distribué le film. Une gageure, « puisque le film a été réalisé en numérique, explique Nolwenn Thivault, programmatrice du film. Nous n’avions pas les 40000 à 50000euros nécessaires au transfert sur pellicule ». Seules les salles équipées en numérique pouvaient donc diffuser le film, soit à peine 200 sur 1 300. Et malgré tout, vendu partout avec débat à la clé, « Allez Yallah ! » a fait un petit carton. Sans pub ni presse. Plus de 10 000 spectateurs depuis le mois de novembre dernier, grâce à un gros buzz, un bouche-à-oreille parti des associations de femmes, et allant même jusqu’à intéresser l’« association des travailleurs miniers maghrébins du bassin houiller lorrain »...
Du coup, de Vénissieux à Vitrolles en passant par Le Havre, Saint-Avold, Montpellier ou Argenteuil, voilà le film programmé en mars dans 120 lieux, dont les deux tiers sont des salles art et essai et le reste des médiathèques, des MJC. Pour Nolwenn Thivault, qui travaille exclusivement sur des documentaires, « il existe une véritable demande de cinéma engagé du côté du public, et des salles qui se sentent de plus en plus étouffées par les volontés commerciales ». Le réalisateur d’« Allez Yallah ! » confirme : « Notre film est porté par les associations, qui s’en emparent parce que le cinéma, c’est aussi ça : répondre à des questions de société. » Alors Jean-Pierre Thorn court d’une projo l’autre, heureux de voir son travail validé par ces débats agités qui réunissent femmes voilées et jeunesse des quartiers. Mais bon, l’affaire prend du temps, est coûteuse pour tout le monde et ne rapporte en fait rien à personne. Et alors ? Comme dirait Beineix : « Quand on fait du cinéma militant, on ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre. Depuis quand s’imagine-t-on que l’engagement paie ? » Depuis, peut-être, qu’on ne sait plus ce que ça veut dire.
Le Nouvel Observateur - Elsa Vigoureux
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