La société française Webhelp traite les relations clients de grands noms tels que Tiscali, Noos ou encore Orange, avec ses deux centres d’appel en Roumanie et au Maroc. Elle est pour la première fois bénéficiaire sur l’ensemble de son exercice 2003.
« Le Français est paradoxal : en tant que salarié, il apprécie de travailler 35 heures, mais en tant que consommateur, il veut pouvoir faire ses courses le dimanche. Il y a là une schizophrénie qu’il va falloir résoudre ». Pour Frédéric Jousset, cofondateur et coprésident de Webhelp, la délocalisation de certains types de services est incontournable pour répondre à la demande des consommateurs. Une délocalisation qui a fait le succès de sa société, spécialisée dans la gestion de la relation client par internet et téléphone.
Webhelp est présent sur le marché français depuis 2000. « Nous nous sommes lancés sur un modèle économique à l’époque innovant », raconte-t-il. « Nous voulions développer de nouveaux canaux d’assistance en ligne, d’un côté pour le grand public, avec le site et la marque Webhelp, et de l’autre pour l’entreprise, en marque blanche ». Dès juin 2000, la société mise sur la délocalisation pour fournir ses prestations, avec l’ouverture d’un centre à Bucarest (Roumanie), chargé de la gestion des flux écrits (par e-mail, chat...).
« Nous avions une expérience limitée de l’offshore, c’était une tâche qui nous paraissait lourde et coûteuse », poursuit Frédéric Jousset. « Nous avons donc décidé de nous appuyer sur l’expérience d’un partenaire local, pour construire et gérer opérationnellement ce centre ». Après prospection au Maroc, en Tunisie, et en Roumanie, le choix de Webhelp se porte donc sur Bucarest. Eléments décisifs : « une francophonie significative et un réseau télécom correctement développé ».
450 euros par mois pour un téléopérateur marocain
À l’époque, Webhelp fait partie de la galaxie d’Europatweb, le fonds d’investissement dédié aux entreprises internet contrôlé par Bernard Arnault, patron du groupe de luxe LVMH. Il détient alors un tiers des parts, tandis que la société américaine Webhelp Inc contrôle 20% du capital. Depuis Europatweb s’est désintégré, revendant début 2003 sa participation aux autres actionnaires. Webhelp Inc a aussi cédé ses parts quasiment à la même date.
Aujourd’hui, la société est désormais contrôlée par ses deux cofondateurs, Olivier Duha et Frédéric Jousset, avec chacun 15% du capital, ainsi que par trois fonds d’investissement (Avenir Finance, Turenne Capital, Alven Capital).
Entre-temps, les dirigeants de Webhelp ont compris que « le chiffre d’affaires généré par le net n’était pas suffisant, si bien qu’il fallait diversifier l’offre », affirme Frédéric Jousset. « Il était évident que ce qui intéresse les entreprises, c’est un prestataire d’assistance multicanal. » La société a donc choisi d’ouvrir un nouveau centre d’appel à Rabat (Maroc), consacré cette fois à la gestion de la relation client par téléphone. Chose impossible à faire en Roumanie, à cause de l’accent des employés locaux, trop facilement repérable par un client français, avoue-t-il sans vergogne.
Pas de langue de bois non plus sur les raisons pour lesquelles ces pays sont plus attractifs que la France : « Un téléopérateur au Maroc coûte, charges comprises 450 euros par mois contre environ 2.000 euros en France, et les salariés travaillent 44 heures par semaine et non 35 ». Les disparités paraissent encore plus grandes lorsqu’on sait que ces employés ont la plupart du temps un diplôme universitaire (bac +3 ou 4 en moyenne).Par ailleurs, le droit du travail est plus souple dans ces pays : « Cela nous permet d’avoir une meilleure réponse aux variations d’activité », explique Jousset. Webhelp emploie 140 personnes en Roumanie et 280 au Maroc, plus 25 salariés au siège à Paris.
Objectif : revenus multipliés par deux sur 2004
Pour lui, il n’y a pas de problème d’éthique : « Le phénomène de la délocalisation va bien au-delà des centres d’appels, c’est un combat d’arrière-garde que d’essayer de conserver ces activités en France, dans un tel environnement concurrentiel ». Au final, selon ses calculs, une entreprise qui choisit de délocaliser ses centres d’appels peut économiser jusqu’à 35% de ses coûts.
Fort de ces arguments, Webhelp gère désormais 28 programmes d’externalisation de la relation client sur le marché français, avec des références telles que Tiscali, Noos, CDiscount, Orange ou encore TF1. Ces activités lui ont permis de réaliser en 2003 son premier exercice entièrement bénéficiaire, avec un résultat net après impôt de 800.000 euros, pour un chiffre d’affaires de 6 millions, en hausse de 140% par rapport à 2002.
Ses perspectives pour 2004 sont tout aussi ambitieuses, même si Frédéric Jousset reconnaît que le rythme de croissance ne sera pas aussi élevé que les années précédentes. « On reçoit de plus en plus d’appels d’offre, c’est la tendance de fond ». Webhelp espère tout de même multiplier par deux ses revenus et afficher un résultat positif de 1,8 million d’euros.
ZDNet France - Estelle Dumout
Ces articles devraient vous intéresser :