Le gouvernement marocain s’apprête à modifier le Code de la famille ou Moudawana pour promouvoir une égalité entre l’homme et la femme et davantage garantir les droits des femmes et des enfants.
Un gosse salement amoché, une famille blessée en son sein et indignée, une geôle honteuse, et, enfin, des responsables, des tortionnaires qui se défilent. Voilà, en quelques mots, l’histoire du drame d’Ahmed Cabrane, 18 ans, victime d’une bavure invraisemblable parce qu’il s’est aventuré, un beau jour, à se promener non loin de son lieu de travail, sans la carte d’identité nationale...
Bab Marrakech, 26 septembre, quelques instants avant la prière du vendredi. Ahmed Cabrane se dirige tranquillement, comme à son habitude, vers la mosquée la plus proche de son boulot lorsqu’il se fait alpaguer par une estafette de police.
A partir de ce moment, son existence bascule. Constatant qu’il n’avait pas sa carte nationale sur lui, et le prenant probablement pour un gosse de la rue, les policiers l’ont transféré, sans aucune forme de procès, à Tit-Mellil, dans un lieu appelé « Dar El Kheir » (maison de bienfaisance, littéralement), sorte de centre de détention sous la tutelle du ministère de l’Intérieur, à mi-chemin entre Sing-Sing et le « 36 », de maison de redressement où sont parqués vagabonds, fous furieux et délinquants.
Constatant que leur enfant ne rentrait pas au bercail, les parents d’Ahmed et son frère aîné, Lahcen, se lancent éperdument à sa recherche. Après avoir effectué le tour des hôpitaux et des commissariats, il leur est suggéré par un officier de police d’aller chercher leur rejeton à Tit-Mellil. Ils s’y rendent illico, et les responsables du pensionnat rassurent la famille éplorée : « Votre fils se trouve bien chez nous », leur indique-t-on. Fin du cauchemar ? Que nenni !
Ce n’est que le 6 octobre, deux semaines quasiment après la disparition de la chair de leur chair, que ses parents ont pu mettre fin à son calvaire en le reprenant chez eux. « La faute à la bureaucratie. Le directeur de ce centre nous a d’abord dit qu’il nous fallait souscrire un engagement auprès de la commune. Il nous a ensuite signifié, une fois que nous lui avons remis ce qu’il demandait, que l’affranchissement d’Ahmed ne pouvait intervenir qu’après la réunion d’une foutue commission », commente Lahcen, qui dit être prêt à remuer ciel et terre pour que les responsables du rapt et des mauvais traitements subis par son frère soient identifiés, pour qu’ils paient.
« Ils nous ont dit, le jour où nous allions finalement le reprendre, qu’il avait provoqué une bagarre avec deux pensionnaires du centre et qu’il avait été envoyé au poste de Gendarmerie de Tit-Mellil. Ahmed faisait pitié à voir. Il m’aurait arraché des larmes même s’il m’était inconnu », précise amèrement Lahcen.
Visage bouffi, yeux au beurre noir, ecchymoses sur tout le corps, taillades, hémorragie interne... Ahmed eut pu succomber à ses blessures. Il aurait affirmé aux membres de sa famille qu’il a été torturé à plusieurs reprises par des employés du centre, qu’il a subi des injections de produits calmants surpuissants à plusieurs reprises...
La version des faits d’Ahmed n’a pu être opposée à celle des responsables de « Dar El Kheïr ». C’est le silence radio au niveau du pensionnat pour SDF. Toutefois, selon le clan Cabrane, qui a porté l’affaire devant la justice, la vérité éclatera bientôt. Un employé de ce centre de « malfaisance » aurait même reconnu les faits devant la gendarmerie Royale.
La Nouvelle Tribune
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