Sahara : Les jeux sont faits

18 février 2007 - 00h00 - Maroc - Ecrit par : L.A

Le plan d’autonomie du Sahara est entré dans la dernière phase. La diplomatie marocaine s’active aux quatre coins du monde pour l’expliquer.

La question du Sahara revient au devant de l’actualité nationale et internationale. Cela n’était pas arrivé depuis des lustres ; depuis la trentaine d’années révolues que cette affaire, fomentée par la volonté hégémonique algérienne, traîne dans les couloirs de l’ONU. Ce regain d’intérêt par les médias de chez nous et d’ailleurs, on le doit à l’initiative marocaine de mise en route du projet d’autonomie interne de l’ancienne colonie espagnole en territoire chérifien. Jusqu’ici, on n’entendait parler de "la question du Sahara" qu’à l’occasion des empoignades diplomatiques annuelles dans l’arène de la fameuse "quatrième commission de décolonisation", qui s’est avérée une mauvaise adresse.

À l’occasion, aussi, du sempiternel renouvellement semestriel du mandat de la Minurso. À l’occasion, également, des rapports ponctuels que les secrétaires généraux de l’ONU, dans leur longue procession, depuis Kurt Waldheim à Koffi Annan, en passant par Javier Pérès De Cuelar et Boutros Ghali, présentaient au Conseil de Sécurité.

A l’occasion, enfin, des différents "plans de règlement" qui n’ont rien réglé, parce que arc-boutés sur le mirage d’un référendum impraticable. On ne s’enlise que dans les dunes du désert ; les concurrents du Paris Dakar en savent quelque chose : l’ONU l’a appris à ses dépens. Il fallait bien en sortir.

Le Maroc vient de proposer une sortie par le haut. Toutes les précautions ont été prises pour que le projet d’autonomie interne des provinces marocaines du Sud soit le produit d’une concertation nationale et réponde aux standards internationaux en matière de conflits plus ou moins similaires.

Entre le 31 janvier et les 1 et 2 février 2007, il n’y avait de place dans l’agenda du cabinet royal que pour ce sujet. La cadence de réunions avec les partis politique et le CORCAS (Conseil royal consultatif pour les affaires sahariennes), présidé par Khelli Henna Ould Rachid, n’était pas pour leur forcer la main. L’unanimité nationale autour de cette "affaire" étant foncièrement acquise, la cause était entendue. Un tour du monde a été entamé pour expliquer l’esprit et la lettre de la proposition marocaine. La première étape a été Paris, où une délégation marocaine conduite par le ministre de l’Intérieur, Chakib Benmoussa, a présenté au Président français la teneur du projet marocain. Un projet que Jacques Chirac a qualifié de "constructif", ce qui peut être pris pour une appréciation positive. La tournée d’explication devrait se poursuivre auprès des autres membres permanents et non permanent du Conseil de Sécurité. Respectivement, les États-Unis, la Chine, la Grande-Bretagne et la Russie ; puis le Qatar, le Pérou, l’Italie, le Ghana, l’Indonésie, la Belgique, la Slovaquie et le Congo, sont sur le carnet de route des émissaires marocains. Une route pas forcément linéaire ; mais le virage négocié, à l’initiative du Maroc, s’annonce décisif ; avant la dernière ligne droite vers un vrai règlement, réellement définitif.

Au sommet de la tour de verre à Manhattan, le dossier du Sahara, frappé d’obstruction algérienne, bouge également. Le nouveau secrétaire général de l’ONU, le Sud-Coréen Ban Ki Moon a nommé le Britannique Julian Harston, comme représentant personnel pour le Sahara et chef de la Minurso. Cela relève plutôt de la normale depuis que cette affaire perdure et qu’elle consomme des diplomates confirmés et des personnalités de notoriété mondialement reconnue. Il faut juste espérer que cette nomination soit, enfin, la bonne. Il faut aussi rappeler une donnée d’importance primordiale : la plus belle des diplomaties ne peut donner que ce qu’elle a ; à l’exception de ce qu’elle n’a pas, le territoire, élément constitutif fondamental de toute entité étatique. La démarche du Maroc s’inscrit dans cette vérité première. L’autonomie interne pour ses provinces sahariennes est le maximum de ce que le Maroc pouvait "donner"pour défendre, diplomatiquement, son intégrité territoriale.

On a longtemps ergoté, ici et là, sur l’épithète "élargie" dont a été affublé le protocole d’autonomie interne. Il a même été dit que ce n’est qu’une entourloupette pour contourner les longues vues algériennes sur un exutoire atlantique qui passe par l’amputation du Maroc d’un bon tiers de son territoire anciennement colonisé. Les objections d’Alger, via Tindouf, sont des faux-fuyants.

Les réticences d’ici, parmi une petite frange de la jeunesse de nos compatriotes sahraouis, sont téléguidées ; telle qu’on actionne une minorité active par téléphone cellulaire. Le Sahara sera bel et bien une structure régionale dotée d’institutions élues -assemblée représentative et instance exécutive dirigée par un chef aux attributions distinctives- pour une gestion autonome, au mieux des spécificités multiples de la région et des intérêts de la nation. Une nation unie sous les mêmes attributs de souveraineté, à commencer, encore une fois, par l’unité du territoire. Le Corcas n’est qu’une avant-première configuration, qui sera appelée à évoluer, voire à s’auto-transfigurer pour intégrer toutes les bonnes volontés qui voudraient agir dans ce sens. Y compris les éléments du Polisario capables de s’affranchir de la tutelle d’Alger. Aussi peu nombreux soient-ils, ils feront ainsi un acte de courage politique. D’autant plus que l’essentiel pour le développement infrastructurel du Sahara a été fait, par la mise à contribution des Marocains des autres provinces. Les autres problèmes, particulièrement l’emploi, est quasi-équitablement partagé par l’ensemble de la jeunesse du pays.

En définitive, le plan d’autonomie pour le Sahara marocain est plus qu’une dernière chance. Une invite pour que le Maghreb, en tant qu’union régionale économiquement intégrée, viable, fiable et apaisée, puisse faire son entrée dans le 21ème siècle. Autrement, côté marocain, on n’y verrait, forcés et contraints, d’autre alternative que "la continuation de la politique par d’autres moyens". Le pire.

Maroc Hebdo - Abdellatif Mansour

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