Selon cette organisation de défense des journalistes, depuis son arrivée sur le trône en juillet 1999, pas moins de 34 organes de presse ont été censurés et 20 journalistes ont été condamnés à des peines de prison, en vertu du code de la presse, du code pénal ou encore de la loi antiterroriste.
"Je pense que nous avons fait une confusion entre modernisme et démocratie. Le monarque est assurément moderne mais pas démocrate", a-t-il dit.
RSF vient d’adresser un lettre au souverain chérifien pour exprimer sa vive préoccupation. "Aujourd’hui, nous voulons tirer la sonnette d’alarme.
Le Maroc est sur une pente dangereuse. Et vous en portez la responsabilité", affirme M. Ménard, dans sa missive rendue publique mercredi.
Rappelant que le monarque avait affirmé en 2002 qu’il ne pourrait y avoir d’essor et de développement pour l’avènement d’une presse de qualité sans l’exercice de la liberté d’expression, RSF estime que "vos promesses sont restées à l’état de promesses. Les chiffres et les faits attestent que votre engagement d’alors n’a pas été tenu".
"Ces atteintes répétées à la liberté de la presse sont source de stupeur et de consternation : ces condamnations n’honorent ni votre régime ni une justice qui apparaît à la botte des autorités. Vous ne pouvez à la fois expliquer que le Maroc est tourné vers l’avenir et la modernité, et traiter ainsi une presse sans laquelle il serait vain de parler de démocratie", assure Robert Ménard.
Ahmed Benchemsi, directeur du magazine arabophone Nichane et de l’hebdomadaire francophone TelQuel, passe actuellement en procès pour manquement au respect dû au roi, pour un éditorial critiquant les propos de Mohammed VI sur les élections législatives du 7 septembre. Les deux journaux avaient été saisis.
Mustapha Hormat Allah, reporter à l’hebdomadaire Al Watan Al An, avait été condamné à la mi-août, à huit mois de prison ferme pour publication de documents confidentiels concernant la lutte antiterroriste. Le directeur du journal, Abderrahim Ariri, a écopé de six mois avec sursis. Benchemsi et Ariri assistaient à la conférence de presse.
"A ce moment précis de l’histoire de la presse marocaine, tout peut basculer, vers le meilleur comme le pire. Son destin demeure entre vos mains. Vous avez le pouvoir, et, nous osons encore l’espérer, le désir, de protéger cette profession, d’oeuvrer à son émancipation et de l’aider à briser les digues qui entravent son épanouissement", assure M. Ménard dans sa lettre.
Pour RSF, "les journalistes marocains ont largement contribué à l’écriture du chapitre nouveau de l’histoire du royaume que constituent vos années de pouvoir. Vous ne pouvez pas continuer à accepter qu’on les traite avec autant de mépris. Vous devez donc agir", conclut la lettre du secrétaire général.
M. Ménard a indiqué qu’on avait rejeté sa demande de visiter en prison Mustapha Hormat Allah et que ses demandes de rendez-vous auprès de responsables marocains sont restées sans réponse.
AFP