Alors que les délocalisations continuent à inquiéter les salariés et à alimenter le débat social en Europe, le premier Salon international des centres d’appels au Maroc vient de se tenir. Des entreprises françaises ont fait le déplacement. Ambiance.
On se bousculait en fin de semaine dernière dans le hall de l’hôtel Hyatt en plein centre de Casablanca. Pour la première fois de leur « courte histoire », les professionnels des centres d’appels externalisés au Maroc tenaient salon dans le quatre-étoiles. Une initiative qui, alors même que le débat sur les délocalisations des activités de services fait rage en France, pouvait presque relever de la provocation.
La démarche s’est pourtant révélée payante pour les autorités et les entrepreneurs marocains. La preuve : plus d’un millier de visiteurs n’ont pas hésité à faire le déplacement pour se rendre sur la quarantaine de stands des opérateurs de centres d’appels, des éditeurs de logiciels ou encore des spécialistes de la téléphonie. Des visiteurs pour la plupart français et le plus souvent discrets. Vu le contexte explosif, pas question en effet d’avancer à visage découvert. Mais, des banquiers en passant par les opérateurs téléphoniques ou encore les sociétés d’assurances françaises, la plupart des entreprises qui ont déjà - ou qui envisagent - d’externaliser une partie de leur activité de services clientèles vers le Maroc étaient bel et bien sur place. « A l’heure actuelle, toutes les entreprises françaises, quels que soient leurs tailles ou leurs secteurs, y réfléchissent », souligne Bertrand Van Deraeghe, de Millenium Call.
25 % de jeunes diplômés au chômage
Il faut dire que, dans un marché mondial de plus en plus concurrentiel, l’enjeu est de taille. A deux heures de décalage horaire de Paris, avec son régime politique stable, ses infrastructures téléphoniques, ses 25 % de jeunes diplômés au chômage et surtout son coût de la main-d’oeuvre particulièrement alléchant - les salaires tournent dans ce secteur autour de 400 € -, le Maroc constitue un véritable eldorado pour les entreprises occidentales en quête d’économies. Les autorités marocaines l’ont bien compris et - ce salon en est l’illustration - sont déterminées à tout mettre en oeuvre pour devenir un acteur incontournable. Une aubaine pour ce pays donc, mais aussi peut-être pour... la France et ses voisins. Certaines entreprises européennes sont en effet liées soit commercialement soit financièrement à des grands centres d’appels marocains. Un bon nombre s’en cachent. D’autres, en revanche, l’assument complètement comme Webcad, la filiale marocaine du groupe Webhelp (voir ci-dessous). Et en Europe certains opérateurs téléphoniques n’ont pas hésité à passer la vitesse supérieure. Le centre d’appel Atento, basé à Casablanca, qui avait un stand au salon, est ainsi détenu par l’ancien opérateur historique téléphonique Telefonica, le pendant espagnol de France Télécom. Et ces derniers tout comme les autorités marocaines voient d’un très mauvais oeil la mesure antidélocalisation prônée par Nicolas Sarkozy. L’objectif du ministre de l’Economie est d’obliger les salariés des centres d’appels marocains à décliner leur identité et à indiquer l’endroit où ils résident. Dans les allées du salon, le sujet était sur toutes les lèvres. Bon nombre ne semblaient guère s’en inquiéter. Mais pas tous, à l’image de Fréderic Jousset, le PDG de Webhelp : « Si ce décret passe, c’est une catastrophe pour le secteur. »
Valérie Hacot Le Parisien , lundi 04 octobre 2004
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