Selon de toutes premières informations (la décision officielle devant être rendue publique en milieu de semaine), la nouvelle structure des prix de reprise des produits pétroliers, largement consensuelle, a été élaborée dans un climat de responsabilité. En ce sens, selon les termes même des opérateurs pétroliers, que la série de discussions a abouti à « un consensus favorable au pays et à des accords gagnant-gagnant ».
Si l’on en croit certaines sources proches du dossier, la veille déjà, soit jeudi 19 décembre, la rencontre des opérateurs avec le ministre des Finances, Salaheddine Mezouar, avait permis d’élaguer une bonne partie des doléances sur lesquelles ont achoppé les 4 premières réunions, tenues sous la houlette de la ministre de l’Energie, Amina Benkhadra. Et partant, la proposition de mise en place d’un cadre favorable pour l’investissement dans les capacités de stockage et dans toute la logistique pétrolière, c’est-à-dire dans la chaîne de valeurs pétrolières, s’en est retrouvée facilitée.
Par ailleurs, la marge d’importation, le nerf de la guerre, pour laquelle le raffineur Samir aurait demandé 160 DH la tonne, a été ramenée à 140 DH, confient des sources bien informées. Le cas échéant, elle constituerait une première manche remportée par le gouvernement dont l’équipe chargée de négocier est coachée par le ministre des Affaires économiques et générales, Nizar Baraka.
De plus, bien au-delà de la révision de la baisse annoncée des 2,5% (commission de raffinage), l’équipe de Baraka a réussi au passage, compte tenu du scénario inévitable de baisse des prix, de carrément la faire supprimer. Auquel cas, les pouvoirs publics auront toute latitude de baisser les prix à la pompe, sans avoir nécessairement besoin de le justifier par les variations des cours du brut sur le marché mondial, commente un observateur.
Le président du Groupement des pétroliers du Maroc (GPM), qui a pris part à tous les rounds de négociations, n’est pas de cet avis. Pour Adil Ziadi, « aucun tableau définitif déterminant la nouvelle structure des prix n’a été retenu à l’issue de la réunion du vendredi ». Il aura été question plutôt de dresser les grandes lignes et « les détails devraient attendre le temps de finaliser les différents scénarios qui seront présentés au milieu de cette semaine », persiste Ziadi. Pour lui, le scénario le plus plausible sera celui qui permettra de différencier les prix en fonction de chaque produit. « Car dans chaque catégorie de produits, il y a une structure de prix réelle ».
D’où la nécessité de mettre en place des formules de structures des prix de reprise alignés, de sorte à éviter d’avoir de grosses différences. Pour l’Etat, cela lui éviterait les éventuelles grognes en cas d’augmentation des prix du baril.
Par ailleurs, et au-delà des concessions faites par les pouvoirs publics, notamment le toilettage des frais variables et fixes, le raffineur se verra reconnaître le statut d’acteur stratégique dans la politique d’approvisionnement. Maigre consolation ? Peut-être pas. Car, pour la forte équipe du raffineur, emmenée par son PDG, Jamal Ba-Amer, « l’essentiel est que ces décisions n’enfreignent pas l’engagement de la raffinerie à jouer son rôle d’acteur déterminant dans la dynamique de développement du Royaume ». Il n’en fallait pas plus pour tendre la perche au gouvernement, qui n’hésitera pas à formuler une série de demandes.
La première porte sur la sécurité de l’approvisionnement pour laquelle le gouvernement exhorte les opérateurs à la généralisation des stockages dans les différents terminaux portuaires « pour multiplier les points d’entrée des produits pétroliers sur le territoire », dit-il. Il veut aussi que la libéralisation du marché en 2009 permette la diversification des sources d’approvisionnement, de manière à « assurer la complémentarité entre la raffinerie Samir et les importations ».
Sur la question du fret, la nouvelle structure des prix devrait permettre aux opérateurs de jouer à chances égales. Certaines sources parlent d’unification des coûts, les fixant désormais à 19 dollars la tonne, sachant qu’ils étaient déterminés selon la capacité de la cargaison, donc du terminal de livraison, et le marché international. Ce qui reviendrait à dire que le fret va être désormais compris dans les prix de reprise, révisables tous les 6 mois au lieu de tous les 15 jours comme dans les formules de structure précédentes.
Mais pour le président du GPM, aucun détail ne permet aujourd’hui d’avancer un quelconque tarif. Il reconnaît cependant qu’il y a eu des fourchettes de prix, qui ont été évoquées en fonction des produits pour lesquelles les deux parties sont plus ou moins d’accord. Plus concrètement, il s’agira désormais de se référer aux indices internationaux, notamment le World Scale, qui varieront périodiquement, pour résoudre cette sempiternelle question du fret.
Mobilisation
L’on est en plein dans le scénario de structure des prix consensuelle rendu possible, selon Ziadi « grâce au travail collectif et de qualité des principaux responsables du dossier ». Fait rare dans ce genre de négociations. Le président du GPM dit tirer chapeau à Benkhadra pour sa mobilisation autour du volet sécurité de l’approvisionnement. C’est également valable pour Baraka dans l’accompagnement du dossier des investissements dans le secteur et les conclusions de partenariat public/privé.
Source : L’Economiste - Bachir Thiam