Face à la sécheresse et au stress hydrique d’une part, et à l’inflation d’autre part, le gouvernement marocain est contraint de revoir sa politique agricole et alimentaire pour garantir l’eau et le pain.
Une première dans l’histoire de l’Office national de l’eau potable (Onep) à l’international. Il vient, en effet, de se lancer dans une nouvelle aventure, africaine cette fois-ci. En effet, depuis le 2 mai, l’Onep est opérationnel au Cameroun. Une équipe d’une dizaine de cadres est déjà sur place depuis plus d’un mois à Yaoundé et Douala. Elle est chapeautée par Mohamed Bennani, directeur général. Ce staff est chargé d’assurer la gestion et l’exploitation (production-distribution) de l’eau potable dans 105 villes !
Un contrat d’affermage qui couvre 10 ans. Un marché attribué par les autorités camerounaises suite à un appel d’offres international lancé en juillet 2006. La Banque mondiale a supervisé l’ensemble du processus de l’appel d’offres à l’attribution du marché et s’est assurée de la transparence des procédures, déclare le Dr Basile Atangana Kouna, DG de Camwater.
« C’est la première fois qu’une entreprise publique, issue d’un pays en développement, est adjudicataire d’un marché aussi important dans l’alimentation en eau potable », renchérit Mounir Zouggari, directeur central à l’Onep. A noter que plusieurs opérateurs de renom dont le numéro un mondial (Veolia Water Ami) ainsi que les Eaux de Marseille et Saur, filiale de Bouygues… avaient soumissionné à l’appel d’offres. C’est finalement le consortium marocain (public/privé) représenté par l’Onep, MedZ (filiale CDG), Delta Holding et le cabinet conseil en travaux publics Ingema qui a été retenu.
La force de la proposition marocaine est à la fois technique et commerciale. De l’avis du directeur central, qui a formulé la réponse à l’appel d’offres, « l’avantage de notre proposition réside dans le mix public-privé et dans la couverture de tout le secteur ». Zouggari fait allusion à l’expérience du service public de l’Onep (production, distribution, urbain, rural…), à l’ingénierie du cabinet Ingema et à la maîtrise des chantiers par Delta Holding. L’appui d’un institutionnel important, en l’occurence MedZ, fut un atout de taille. « En plus du souci de rentabilité, il y a des considérations de coopération sud-sud », ajoute-t-il.
Ce schéma est l’aboutissement de la privatisation de la Snec (Société nationale des eaux du Cameroun) via un modèle presque à l’identique du Sénégal. Avec, d’un côté, Camwater, société publique chargée de mobiliser des fonds ; et de l’autre, une société de droit privé camerounais chargée de l’affermage des services de production et la gestion de l’eau potable de l’ex-Snec. Dont le capital social est de 106 millions de DH répartis à parts égales entre l’Onep, Delta Holding et CDG Développement (via Ingema et MedZ).
Le cahier des charges porte sur la partie exploitation : mise en affermage de la production, transport, traitement, stockage, distribution et commercialisation. C’est le premier contrat de cette nature décroché par l’Onep. Jusque-là, l’Office intervenait à l’international par des actions d’assistance technique, notamment en Mauritanie et en Guinée.
Potentiel camerounais
Le secteur de l’eau potable au Cameroun a pâti pendant longtemps d’un manque d’investissement et de réhabilitation. L’héritage de l’ajustement structurel est lourd. Le Cameroun compte une population de 19 millions d’habitants dont seulement 250.000 sont abonnés actuellement. C’est dire le potentiel de croissance qui s’offre à l’Onep. Au total, le consortium marocain devra alimenter 105 villes en eau. L’objectif étant de doubler le nombre d’abonnés et arriver à quelque 500.000 dans 10 ans. Ce qui requiert de remettre à niveau les installations : des investissements lourds en réhabilitation, adduction, une politique de branchements sociaux, extension du réseau… Le programme d’investissement est estimé à environ 10 milliards de DH sur 10 ans. L’Etat camerounais en est le bailleur de fonds.
Source : L’Economiste - Amin Rboub
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