Maroc : pour le CESE, il est temps de réformer le code de la famille
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Mixte ou pas, le mariage d’un Marocain expatrié est tout sauf une simple formalité. Capacité, acte adoulaire, transcription du mariage (sur les registres consulaires du pays d’accueil quand le mariage a été célébré à l’étranger)…
Pourtant, la réforme de la Moudawana est censée simplifier plusieurs procédures. L’illustration de ces difficultés qui revient le plus souvent est celui du divorce, « qui était difficile à obtenir au Maroc du moment qu’il était presque impossible de prouver le mariage civil ». A ce dernier, il manquait bien entendu les deux témoins et la dot.
Avant l’entrée en vigueur de la Moudawana « nouvelle version », se rappelle Tahar D., un marocain résidant en Italie, « il fallait se marier deux fois : civilement et devant le juge du consulat marocain, sinon, nous nous exposions à beaucoup de problèmes au niveau des représentations consulaires ». Tahar s’est marié en 1996 avec une Italienne. Son mariage « musulman », il ne l’a contracté que deux ans après le passage devant la mairie. « C’était très compliqué. Surtout pour ceux qui n’habitent pas dans une ville dotée d’une représentation consulaire. Je n’ai commencé à y penser que lorsque j’ai décidé d’avoir des enfants. A ce moment, tout le monde m’a conseillé de me marier devant le consulat, sinon, les autorités marocaines n’allaient tout simplement pas reconnaître mes enfants », raconte Tahar. En 1998, ce MRE entreprend donc les formalités devant le consulat marocain de la ville de Bologne. « Cela m’a pris plus de trois mois et trois allers-retours avec mon épouse pour disposer de l’acte de mariage », regrette-t-il.
Contrairement à Tahar, Nadia B., une jeune Marocaine résidente de Paris, s’est mariée sous le règne de la nouvelle Moudawana. « J’ai eu beaucoup de chance, puisque je me suis mariée juste après l’entrée en vigueur du nouveau texte. Celui-ci m’a permis d’entreprendre une seule procédure devant la mairie de ma ville », souligne Nadia. Signalons que la Moudawana reconnaît, dans son article 14, le mariage civil. Celui-ci devient tout à fait valide au regard de la législation marocaine, dans la mesure où l’union s’est faite en présence de deux témoins « musulmans ». « C’est exactement la procédure que nous avons suivie, mon mari et moi. Cela nous a évité de se marier à deux reprises », ajoute Nadia.
Idem pour la dot, condition sine qua non pour la validité du mariage. Le législateur fermerait désormais les yeux sur son absence à condition toutefois qu’elle ne fasse pas l’objet d’une mention écrite stipulant un accord préalable entre les deux parties.
La dot posait jadis un énorme problème, puisque les autorités européennes y voyaient une sorte de « prix » à payer pour avoir l’accord de la femme. En ôtant ces deux « épines », la Moudawana introduit donc de nouvelles dispositions empreintes de beaucoup de souplesse et de… réalisme.
Il n’empêche que les premiers échos qui parviennent de « Marocains du monde », comme se plaisent à les appeler nos banquiers, laissent entrevoir de grands problèmes d’application. Notamment pour la procédure de divorce. La nouvelle disposition relative à la réconciliation fait de la comparution des deux parties devant le juge une condition incontournable. Et c’est justement là où le bât blesse. Comment convaincre une personne, dont la situation n’est même pas encore régularisée, de rentrer au pays pour appliquer cette procédure ? Auparavant, le procès-verbal de non conciliation établi par des autorités consulaires marocaines constituait une pièce maîtresse que les deux parties pouvaient faire valoir pour appuyer leur demande de rupture du contrat des liens du mariage.
En outre, les conjoints n’avaient pas à rentrer au pays, puisqu’ils pouvaient donner procuration à l’un de leurs parents pour s’acquitter à leur place des formalités de divorce. Ce divorce « par procuration » a été aboli dans la nouvelle législation. Les deux parties doivent impérativement se présenter en personne devant le juge. Sans parler de la procédure d’informer l’une ou l’autre partie de la décision du tribunal. Elle risque d’être acrobatique.
Nouvelles procédures
Le nouveau Code de la famille prévoit que les personnes ayant établi un acte de mariage selon la nouvelle procédure doivent déposer, dans un délai de 3 mois, copie de l’acte de mariage aux services consulaires de la circonscription qui l’a établi. L’acte peut également être directement déposé au ministère des affaires étrangères si la circonscription ne compte pas de services consulaires. Et ce, pour permettre à ces services de suivre de près la situation matrimoniale des Marocains résidant à l’étranger. Le ministère des Affaires étrangères se charge alors de transmettre ladite copie à l’officier d’état civil et à la section de la juridiction de la famille du lieu de naissance des deux époux.
Si ces derniers ou l’un d’eux n’est pas né au Maroc, la copie de l’acte de mariage est transmise à la section de la juridiction de la famille et au procureur du roi près le tribunal de première instance de Rabat.
Le Code de la famille comporte également de nouvelles dispositions relatives notamment aux divorces prononcés par les tribunaux étrangers. Le texte stipule que les verdicts rendus par ces juridictions ne sont exécutoires que s’ils émanent d’un tribunal spécialisé. Ces jugements ne doivent pas être en contradiction avec les dispositions du Code de la famille.
Le texte régit également les aspects inhérents à la séparation des époux. Il prévoit que les décisions judiciaires relatives au divorce, prises conformément aux dispositions du nouveau Code de la famille, ne sont passibles d’aucun recours dans leur volet juridique.
L’Economiste - Naoufal Belghazi
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