Maroc : l’attestation qui plombe le marché de l’immobilier

5 septembre 2024 - 20h00 - Maroc - Ecrit par : P. A

Les nouvelles mesures concernant l’attestation fiscale, en vigueur depuis le 1ᵉʳ juillet dernier au Maroc, portent un sérieux coup de frein aux transactions immobilières, dénoncent les notaires.

« L’origine de propriété, le permis d’habiter, une copie de la CNIE du ou des futur(s) contribuable(s) vendeur(s), le projet de l’acte de vente ou de promesse, ou encore le certificat de propriété… sont autant de documents que l’administration fiscale exige depuis le 1ᵉʳ juillet 2024, en plus d’une demande sous forme d’informations à renseigner sur un site dédié, pour obtenir, en contrepartie, la fameuse attestation fiscale prévue par l’article 95 du Code de recouvrement des créances publiques de 2011 », explique auprès de Médias24, Me Mohamed Lazrek, notaire et ancien secrétaire général de l’Ordre des notaires.

À lire : Immobilier au Maroc : les notaires contrôleront la provenance de l’argent

Il fait observer que « si cette procédure vise à augmenter les recettes de l’État, dans la pratique, elle semble ralentir dangereusement la réalisation des transactions immobilières » au Maroc. Le notaire ajoute que l’article 139 de la loi de finances 2024 pénalise autant les notaires que les contribuables. Selon cette disposition, les notaires « doivent refuser de dresser des contrats de vente sans cette attestation fiscale ». Une mesure qui n’est pas mauvaise en soi, estime-t-il, soulignant que ce document « peut être demandé par les notaires par voie électronique, ce qui est une bonne chose puisque le processus peut être plus fluide. Cependant, l’administration fiscale doit suivre de l’autre côté, pour éviter les blocages, et c’est l’un des principaux problèmes que nous rencontrons depuis environ un mois ».

À lire : Achat de logement au Maroc : les notaires baissent les prix

Me Mohamed Lazrek déplore la durée de traitement des demandes par l’administration fiscale, qui peut prendre « une semaine » voire « des mois », ce qui « impacte le processus de vente, et par ricochet, les rentrées de l’État, qui sont censées s’améliorer par la mise en place de ces dispositions ». Le notaire dénonce le fait que l’attestation fiscale soit désormais liée au vendeur et non au bien à vendre, comme prévu dans les anciennes dispositions légales. « Le propriétaire doit payer ses propres deniers avant d’espérer vendre sa maison ou son terrain », ce qui risque de pousser de nombreux contribuables à renoncer de vendre leurs biens, « vu toutes les charges qu’ils devront payer avant l’établissement du contrat de vente », détaille-t-il.

À lire : Le plus célèbre notaire de Fès en prison

En ce qui concerne les notaires, cette nouvelle exigence légale peut les contraindre à « abandonner la transaction face au refus de se faire délivrer la mainlevée d’hypothèque grevant le bien immobilier », ou « payer l’impôt préalablement à l’inscription foncière en prenant le risque d’engager sa responsabilité professionnelle et pénale », ce qui pourrait amener l’acquéreur à « invoquer l’abus de confiance », développe Lazrek, ajoutant que les notaires ont trouvé une solution pour contourner cette difficulté : « Le bien du vendeur est grevé d’une hypothèque conventionnelle inscrite au profit d’une banque… En pratique, le notaire procède généralement à l’inscription de son contrat de vente, accompagné de la mainlevée d’hypothèque bancaire, puis il procède au paiement du montant promis à la banque avant de verser le solde au vendeur ».

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Impôts - Immobilier - Loi de finances (PLF 2024 Maroc)

Aller plus loin

Immobilier au Maroc : les notaires contrôleront la provenance de l’argent

Les notaires marocains ont décidé de prendre une part active dans la lutte contre le blanchiment d’argent dans l’immobilier.

Achat de logement au Maroc : les notaires baissent les prix

Les notaires vont accompagner et soutenir les citoyens à travers tout le Maroc, tout au long du processus d’octroi de l’aide directe au logement (2024-2028). Une convention a...

Blanchiment d’argent : des notaires, avocats et adouls marocains sanctionnés

Des campagnes d’inspection et de contrôle menées par un comité spécial du ministère de la Justice ont révélé l’implication de notaires, d’avocats et d’adouls dans des réseaux de...

Le plus célèbre notaire de Fès en prison

Le plus célèbre notaire de la ville de Fès a été placé en détention préventive à la prison locale. Il serait impliqué dans plusieurs affaires de manipulation de contrat,...

Ces articles devraient vous intéresser :

Immobilier au Maroc : les MRE pour relancer un marché en berne

Les promoteurs immobiliers comptent sur la saison estivale et les Marocains résidant à l’étranger (MRE) pour sortir leur marché de sa stagnation. Ceux-ci figurent d’ailleurs parmi les bénéficiaires du nouveau programme de l’aide au logement.

Maroc : investissements publics records en 2024

L’investissement public au Maroc devrait s’élever à 335 milliards de dirhams (MMDH) l’année prochaine, d’après la note de présentation du Projet de loi de finances (PLF) 2024. Un effort qui contribuera à améliorer les conditions de vie des populations.

Subventions maintenues au Maroc : un répit pour le pouvoir d’achat des ménages

Le gouvernement marocain a décidé de maintenir les subventions du gaz butane, du sucre et de la farine au titre de l’exercice 2024 dont le budget est estimé à 16,36 milliards de dirhams dans le Projet de loi de finances (PLF) 2024.

Maroc : du nouveau pour dotation pour voyage d’affaires

Au Maroc, la dotation pour voyage d’affaires passe de 60 à 100 000 dirhams, selon la version actualisée de l’Instruction générale des opérations de change (IGOC) qui est entrée en vigueur le 2 janvier 2024.

Maroc : l’aide à l’achat de logement bientôt effective

Le ministre délégué chargé du budget, Fouzi Lekjaa, a annoncé la mise en place prochaine d’un dispositif d’aides directes au logement pour les primo-acquéreurs.

Aides au logement au Maroc : conditions et modalités d’octroi

La ministre de l’Aménagement du territoire, de l’urbanisme, de l’habitat et de la politique de la ville, Fatim Ezzahra El Mansouri, a présenté vendredi, lors d’une conférence de presse au siège de son département, le processus à suivre par les...

Maroc : l’aide au logement booste le marché de l’immobilier

Au Maroc, le nouveau programme d’aide à l’acquisition de logements est susceptible d’apporter une bouffée d’oxygène au marché immobilier.

Maroc : colère des gérants de salles de fêtes

Après l’impact de la pandémie de Covid-19 sur leurs activités, les propriétaires et gérants de salles de fêtes disent faire face aujourd’hui à une concurrence déloyale insupportable de certains individus proposant des salles informelles et des villas...

Au Maroc, les MRE investissent dans l’immobilier

70 % des investissements de la communauté marocaine résidant à l’étranger sont consacrés au secteur immobilier, selon Fatima Ezzahra El Mansouri, la ministre de l’Aménagement du territoire national, de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Politique de...

L’incertitude plane sur le marché immobilier marocain

L’offre immobilière partout au Maroc serait abondante et les prix abordables, selon les professionnels et les notaires. La réalité est pourtant toute autre.