La lutte contre la corruption ne produit pas de résultats encourageants au Maroc qui est mal logé dans les classements mondiaux depuis quatre ans.
Les responsables politiques marocains et ceux de la société civile ont accueilli favorablement la création d’une nouvelle autorité chargée de la lutte contre la corruption au Maroc, mais se disent méfiants quant à son indépendance vis-à-vis du gouvernement.
L’Autorité Centrale pour la Prévention de la Corruption, autorisée pour la première fois par décret l’an dernier, mais qui n’avait pas encore vu le jour, est sur le point de devenir une réalité, avec la nomination par le Roi Mohammed VI de M. Abdesselam Boudrar, l’un des membres fondateurs de Transparency Maroc, au poste de directeur.
Dans son discours du 20 août dernier, le souverain avait demandé au gouvernement de travailler activement à ce que cette instance devienne une réalité. "Dans nos efforts pour nous assurer que les affaires publiques sont conduites dans le respect des normes d’éthique, nous devons aujourd’hui mettre en place une Autorité Centrale pour la Prévention de la Corruption… Chacun d’entre nous doit rester vigilant et déterminé, se conformer aux lois et à l’autorité d’une institution indépendante, et faire usage des mécanismes de surveillance et de responsabilité pour mettre un terme à l’impunité et lutter contre les comportements corrompus et frauduleux", avait déclaré le Roi.
Aux termes du décret de mars 2007, cette nouvelle instance sera chargée de surveiller et de collecter des informations sur la corruption, et de coordonner les politiques de lutte anti-corruption. Composée de représentants de différents ministères et organismes, elle devra répondre devant le Premier Ministre.
Bien qu’elle ait été saluée par nombre de responsables politiques et personnalités de la société civile, certains critiquent néanmoins le manque d’indépendance de cette instance vis-à-vis du gouvernement.
Le secrétaire général de Transparency Maroc Rachid Filali Meknassi a déclaré à Magharebia qu’il était maintenant essentiel de mettre en place cette instance, afin de pouvoir traiter le phénomène endémique de la corruption. Il a par ailleurs indiqué que l’annonce du Roi avait été un signal politique clair adressé au gouvernement pour qu’il pèse de tout son poids dans ces efforts de lutte.
M. Meknassi a souligné que cette autorité aurait un rôle purement consultatif : "Son objet n’est pas de déclencher des procédures légales ni de lancer des enquêtes."
"J’espère que cette instance ne sera pas un simple forum de discussion, mais un organisme capable d’apporter des solutions concrètes", a-t-il ajouté. Le président de la Commission pour la Justice et la Législation de la Chambre basse du parlement a pour sa part indiqué que l’affiliation de cette instance au cabinet du Premier Ministre l’empêchera de mener efficacement sa mission à bien. "Il est impératif que cette autorité soit indépendante, afin qu’elle puisse se pencher sur tous les cas de corruption, aussi sensibles qu’ils puissent être", a déclaré Mohamed Ansari.
La députée et avocate Fatima Mustaghfir a expliqué à Magharebia qu’à moins de consolider les efforts de tous les acteurs de la société, cette nouvelle instance ne sera pas en mesure de lutter contre le phénomène croissant de la corruption dans la culture marocaine. "Nous devons initier une vaste campagne dans les médias visant à modifier les attitudes des gens et à les sensibiliser aux dangers de la corruption. L’annonce par le Roi lui-même de la création de cette autorité est un signe de l’ampleur du phénomène. Toutes les institutions nationales doivent s’unir pour mettre un terme à ce problème", a-t-elle déclaré.
Le Maroc se trouve toujours dans les dernières places de l’Indice de Perception de la Corruption de Transparency International, même si sa position s’est légèrement améliorée en 2007, passant de la 79ème à la 72ème place sur 179 pays passés au crible par cette ONG.
Source : Magharebia - Sarah Touahri
Ces articles devraient vous intéresser :