Le mariage des mineures prend des proportions alarmantes au Maroc. En 2021, 19 000 cas ont été enregistrés, contre 12 000 l’année précédente.
Le code de la famille n’en finit pas de faire parler de lui. Guides, actions de proximité, vulgarisation de certaines dispositions, sensibilisation et formation des juges : les associations s’activent, chacune selon ses moyens ou ses priorités. Pour les responsables de l’association Bouregreg, l’information est capitale.
Particulièrement celle des populations qui vivent dans les zones les plus reculées. C’est justement dans ces régions qu’une série d’actions sont entreprises par l’association. Le texte a été réécrit en arabe dialectal, en tachelhit, tarifit et tamazight afin que les populations berbérophones puissent aussi se familiariser. Si les femmes sont particulièrement ciblées, elles ne sont pas les seules à être concernées par cet exercice de familiarisation initié par l’association. Car c’est aussi par l’apprentissage des hommes, ces pères, frères, maris ou collègues aux valeurs d’égalité et de respect des droits de l’homme que passe la construction d’une société égalitaire. Pendant près de dix mois, les membres de l’association organiseront des séances d’explication, de workshop, de conférences d’orientation dans les foyers et établissements scolaires pour que le nouveau projet de société que le Maroc veut édifier soit assimilé. « La tâche n’est pas aisée ; imaginez que vous disiez à un père de famille qui vit à la campagne qu’il doive partager ses biens avec sa femme en cas de divorce ! » s’exclame une militante.
Les actions de l’association tournent autour de thèmes précis. La polygamie, l’égalité dans la responsabilité familiale et la gestion du foyer, la garde de l’enfant et la tutelle sont ceux qui focalisent l’attention. Probablement parce qu’ils constituent les piliers du nouveau projet sociétal. Ils sont aussi ceux qui engendreront des changements radicaux. La polygamie, qui n’est toujours pas interdite, est soumise à de sévères conditions, la rendant « presque » impraticable. La tutelle du père n’est plus obligatoire. La disposition est révolutionnaire tout comme le partage des responsabilités. Dans les associations, le travail d’information est avant tout un travail d’initiation à une nouvelle philosophie. « Il faut faire admettre à un citoyen une nouvelle façon de concevoir les relations au sein de la cellule familiale », explique une militante. Pour « être plus proche des citoyens », des pièces de théâtre ont été produites. Doublées en tarifit et tachelhit, elles mettent en scène des récits qui content des histoires de l’inégalité, la polygamie ou la garde d’enfants. Les résultats ne seront pas immédiats. Mais l’important travail de vulgarisation en cours est le préalable à la réussite du projet. Les générations futures seront certainement plus rompues aux valeurs d’égalité et de respect des droits de l’homme.
Amale Daoud - L’Economiste
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