Les premières réactions marocaines ont été sévères, Mahjoubi Aherdane, chef du Mouvement national populaire marocain (MNP, coalition gouvernementale) affirmant que "c’est une déclaration de guerre".
Le gouvernement espagnol a indiqué, dans un communiqué officiel, qu’il "s’est trouvé dans l’obligation d’ordonner" à ses forces armées de déloger le petit détachement marocain qui campait depuis le 11 juillet sur l’île Perejil (Leïla pour les Marocains). Il a précisé que l’intervention "s’est déroulée avec succès, sans pertes ni blessés".
Un porte-parole de la préfecture de Sebta, enclave espagnole dans le nord du Maroc, a déclaré que les six soldats marocains qui se trouvaient sur l’îlot, situé à quelque 200 mètres des côtes marocaines, ont été remis à leur pays, après avoir été transportés à Sebta.
Selon la presse espagnole, l’opération a été menée peu après 06H00 (04H00 GMT) par des unités spéciales de l’armée de terre, appuyées par des hélicoptères Super Puma. Auparavant, des plongeurs de l’infanterie de marine s’étaient déployées autour de la zone à bord de zodiac. Des bâtiments de la marine espagnole qui avaient été envoyés en renfort au cours des derniers jours, se trouvaient à proximité.
Depuis jeudi, l’Espagne avait renforcé son dispositif militaire dans les enclaves espagnoles de Sebta et Melilla, et sur ses territoires au large des côtes marocaines, en envoyant plusieurs navires de guerre.
L’opération est intervenue peu après que l’ambassadeur espagnol à Rabat, Fernando Arias-Salgado, soit arrivé à Sebta, après avoir été rappelé mardi soir pour une durée indéterminée.
Le gouvernement espagnol a tenu informé le roi Juan Carlos, les partis politiques, le Conseil de sécurité de l’ONU et ses alliés de l’opération, a précisé le communiqué officiel.
Mardi, le Congrès des députés espagnols avait adopté à la quasi-unanimité une motion appuyant la position du gouvernement de José Maria Aznar Aznar dans cette affaire.
Au Maroc, les premières réactions ont condamné l’intervention espagnole. Mahjoubi Aherdane s’est déclaré "stupéfait". "On ne règle pas les problèmes à coups de canon, c’est une déclaration de guerre et une erreur", a-t-il dit. Il a estimé que le Maroc doit "rompre les relations avec ce pays dont nous pensions qu’il était un pays ami".
Pour sa part, Abdelkrim Khatib, chef du parti marocain de la Justice et du Développement (PJD, islamiste modéré), a estimé qu’il s’agit d’une "attaque contre le Maroc et son intégrité territoriale, qui démontre que l’esprit colonialiste persiste chez les européens". "Le Maroc doit couper toutes relations aussi bien politiques qu’économiques avec l’Espagne, qui doit être considérée comme un pays ennemi", a ajouté M. Khatib.
Depuis l’arrivée des soldats marocains sur l’îlot, l’Espagne, soutenue par l’Union européenne et l’OTAN, n’avait cessé de demander leur retrait, en expliquant que l’îlot, de 13,5 hectares, bénéficie depuis 40 ans d’un "statut accepté par le Maroc et l’Espagne aux termes duquel ni le gouvernement espagnol, ni le gouvernement marocain n’occupera l’île".
Au contraire, le Maroc a fait valoir que l’île n’est pas concernée par les accords entre les deux pays, et se trouve sous souveraineté marocaine. Rabat avait affirmé que les soldats installés sur l’île avaient établi un "poste d’observation" pour lutter contre l’immigration illégale et le trafic de drogue.
Dans son communiqué, le gouvernement espagnol a réaffirmé son souhait de "maintenir des relations d’amitié et de coopération avec le Maroc" et a manifesté sa disposition à engager des conversations dans ce sens.
Depuis plus d’un an, les relations hispano-marocaines sont en crise, avec le rappel à Rabat, en octobre dernier, de l’ambassadeur du Maroc à Madrid.
Le contentieux porte notamment sur la pêche, sur l’immigration clandestine, et sur le conflit du Sahara, le Maroc estimant que Madrid défend des positions jugées favorables aux thèses du Front Polisario.
L’Espagne est le second partenaire commercial du Maroc, après la France. les deux pays ont signé, en 1991, un traité d’amitié et de coopération.
Source : Afp