Le gouvernement s’apprête à adopter un nouveau projet de décret visant à exempter les véhicules de la police, de la gendarmerie et des forces auxiliaires de l’obligation d’installation d’un dispositif de mesure de vitesse.
Karim Ghellab, ministre de l’Equipement et du Transport, n’a pas du tout digéré, et le mot est faible, que la Cour des comptes remette en cause certains choix sur la politique des infrastructures autoroutières. Parmi les griefs relevés par les auditeurs de la Cour, le fractionnement en plusieurs lots des marchés des autoroutes. Cela aurait entraîné des coûts supplémentaires, relèvent les auditeurs de la Cour des comptes.
D’habitude pondéré, le ministre istiqlalien qui dissimulait à peine son irritation, sort de sa réserve : « Je comprends que les auditeurs fassent leur travail et s’assurent de la régularité de la dépense publique, mais tout de même… ». Les observations de la Cour des comptes sont respectables, mais les auditeurs s’en tiennent surtout à la régularité des dépenses, nuance le ministre qui insiste sur un « aspect important » : « Je suis fier de constater qu’à aucun moment le rapport de la Cour des comptes n’a relevé un élément qui mettrait en doute la régularité de dépenses ni l’intégrité des responsables ». Dans un pays où l’on passe le temps à dire que la corruption fait des ravages, il faut noter que dans une entreprise qui investit plusieurs milliards de dirhams par an, la Cour des comptes n’a rien relevé d’anormal, poursuit le ministre, un brin agacé.
Ghellab renvoie les auditeurs à leurs études : « Il est faux d’affirmer que la fragmentation des appels d’offres des chantiers des autoroutes a coûté plus d’argent, et encore moins 50 millions de dirhams ». Karim Ghellab dit « assumer ce choix ».
Le découpage a été fait dans le souci d’accélérer les travaux et de réaliser
plusieurs sections simultanément, justifie-t-il. Deux, cette option a été privilégiée afin de permettre la participation des entreprises marocaines à l’effort d’infrastructures. Il s’agit d’une approche fondée sur le développement économique, précise Karim Ghellab et donc, d’une vision plus globale qui dépasse une simple approche arithmétique. Le ministre dit ne pas comprendre « la contestation d’un choix politique qui s’est avéré efficace ».
Pour sa démonstration, il sort sa calculette : grâce à la politique du morcellement des marchés, 25 milliards de dirhams ont été transférés aux entreprises marocaines, explique-t-il. « C’est 5 à 6% du produit intérieur brut ». Si améliorer le PIB de son pays est condamnable, alors… », ironise le ministre. Plus globalement, il y a aussi l’aspect économico-financier : plus les lots sont trop grands, plus on limite la compétition entre de très grands opérateurs. Or, en réduisant la taille des marchés, la porte s’ouvre à une pluralité de compétiteurs avec la possibilité d’avoir au bout de meilleurs prix. Quid des adjudicataires qui se sont avérés incapables d’assurer leur chantier ? Les contrats ont été résiliés, et c’est le signe que nous sommes vigilants, rétorque le ministre de l’Equipement et du Transport qui ne croit pas que cela soit un signe de mauvaise gestion. Ce qui aurait été anormal, dit-il, c’est de laisser ces entreprises continuer. Il n’y a donc pas de quoi fouetter un chat car cela relève d’une gestion normale pour le ministre.
Le retard de livraison de l’autoroute de Marrakech. Et alors ?, s’étonne Karim Ghellab. Trois mois sur un chantier qui a duré plus de 36 mois n’a rien de scandaleux sur le plan technique ; il faut aussi relativiser ce retard par rapport à l’ensemble des autoroutes qui ont par ailleurs été livrées dans les délais. Cela, personne ne le relève, fait-il remarquer.
La présence d’intervenants externes critiquée dans le rapport de la Cour des comptes et qui aurait entraîné un surcoût, le ministre a là aussi la réponse toute faite : la maîtrise d’œuvre déléguée est une pratique courante dans les chantiers d’infrastructures. La délégation (faite aussi sur la rocade méditerranéenne) fait partie des bonnes pratiques dans le management des projets d’infrastructure, mais elle s’est relevée non concluante. Puis on est revenu à l’internalisation de ce processus.
Contrôle et contrôle qualité
Quid de l’impartialité du LPEE qui est chargé du contrôle et, de l’autre côté, intervient dans l’assurance qualité par des entités dépendantes ? N’est-on pas là dans une incompatibilité ? En apparence, cela fait désordre, mais pas dans la réalité, reconnaît le ministre. Ce sont des entités régionales indépendantes du LPEE qui se chargent de l’assurance qualité, tandis que les structures qui interviennent pour le compte d’Autoroutes du Maroc (ADM) sont logées au niveau central. Et, croyez-moi, « les procédures ne sont pas les mêmes » , même les petits laboratoires de contrôle privés ont souvent critiqué cette posture de juge et partie dans laquelle se retrouve parfois le LPEE.
Sachez aussi que le LPEE n’est pas le seul dispositif à assurer le contrôle des chantiers, fait remarquer le ministre. La division Travaux qui dépend d’ADM réalise aussi ses investigations auxquelles s’ajoute un audit externe réalisé par des cabinets extérieurs.
Source : L’Economiste - Abashi Shamamba
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