Depuis la promulgation de la nouvelle loi « asile et immigration » en France, les expulsions sous OQTF visent désormais plusieurs catégories d’étrangers autrefois protégées par la loi.
Interview de Brice Hortefeux, ministre français de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du co-développement. La France propose une batterie de mesure pour les MRE qui souhaitent investir dans leur pays d’origine.
Monsieur le ministre, vous allez participer aux « Intégrales de l’investissement », consacrées cette année aux Marocains de l’étranger et à leur apport à l’économie nationale. Quel objectif vous êtes-vous fixé ? Quelle sera la nature de vos contacts et de vos entretiens ?
Je suis d’abord venu au Maroc pour dialoguer avec les autorités du Royaume. C’est aussi l’occasion de rencontrer les forces vives de l’économie marocaine, réunies lors des « Intégrales de l’investissement ».
Quelques semaines après sa visite d’Etat, le président Sarkozy m’a demandé d’approfondir avec nos amis marocains ce dialogue essentiel. C’est l’intérêt de la France et, je crois aussi, celui du Maroc, de construire un véritable partenariat sur les questions d’immigration.
Pour être durable et efficace, ce partenariat doit être équilibré. Il doit porter non seulement sur la maîtrise de l’immigration clandestine, mais aussi sur l’organisation de la migration légale et le co-développement.
La France a annoncé son intention de développer le soutien au retour des immigrants, notamment en appuyant des projets économiques à forte valeur ajoutée et en s’inscrivant dans le cadre d’un partenariat. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur cette question ?
S’il revient aux Marocains de l’étranger de décider eux-mêmes de l’usage qu’ils font de leur épargne, la France souhaite leur apporter une aide afin de faciliter les transferts. Nous mettons à la disposition des migrants qui souhaitent investir dans leur pays d’origine de nouveaux instruments financiers : le compte et le livret épargne co-développement.
En outre, j’ai décidé de mobiliser l’Agence française de développement pour soutenir la création de 1.000 PME de migrants au Maroc au cours des cinq prochaines années. Il s’agit là d’une volonté de la France d’appuyer des projets à forte valeur ajoutée qui aideront l’économie de votre pays.
A la conférence organisée à Rabat au mois de juillet 2006 sur la migration, plusieurs pays, notamment le Maroc, la France et l’Espagne, ont affiché leur ambition de promouvoir le co-développement, à travers des projets créateurs d’emplois. Peut-on savoir aujourd’hui ce qu’est devenu ce concept ? Comment prendra-t-il forme et quelles en seront les ressources ?
Le co-développement n’est plus un concept, mais une réalité au service des pays sources d’immigration vers la France. Mon pays y consacre désormais d’importants moyens humains et financiers, regroupés au sein de mon ministère. En 2008, je disposerai, à ce titre, d’un budget de 60 millions d’euros.
Déjà, mes équipes s’emploient à identifier et à lancer les projets les plus porteurs. La majeure partie de ces projets sont des initiatives d’associations de migrants installés en France. C’est à Paris, en octobre prochain, que se tiendra la deuxième Conférence euro-africaine sur les migrations et le développement, deux ans après celle de Rabat.
Le Maroc a montré le chemin que nous devons suivre. Il faut que des engagements concrets soient pris par les pays des deux rives de la Méditerranée. Cette volonté française est le fruit d’une conviction : aucune politique migratoire ne peut, aujourd’hui, ignorer
les préoccupations des pays d’origine.
Les Etats du Sud se plaignent de former des élites, ingénieurs, techniciens et autres, et de les voir ensuite partir travailler en Europe, accentuant ainsi ce qu’on appelle « l’exode des cerveaux », handicap majeur pour le développement. Que préconisez-vous ?
Il ne s’agit aucunement de mettre en place un pillage des cerveaux au profit de la France.
Ce que nous voulons organiser, c’est une circulation des compétences entre nos deux pays. C’est cela, l’immigration concertée. Par exemple, grâce à la carte « compétences et talents », des Marocains ayant un profil et un projet utiles à nos deux pays pourront venir trois, voire six ans en France s’ils s’engagent, à l’issue de cette période, à repartir au Maroc pour le faire profiter de l’expérience acquise.
Le projet d’Union de la Méditerranée, que le Président de la République française a lancé, semble prendre forme. Quelles en sont aujourd’hui les modalités et les contours ? Et comment la question des migrations peut-elle y trouver sa place ?
Lors de sa visite à Tanger le 23 octobre dernier, le Président de la République a donné une nouvelle impulsion au projet d’Union de la Méditerranée, dont l’objectif est de faire de la Méditerranée une zone de paix, de prospérité économique et de tolérance entre nos peuples. Soyons clairs, cette Union, ouverte à tous les pays européens qui le souhaitent, n’aura pas vocation à se substituer aux procédures de coopération et de dialogue qui réunissent déjà les pays de la Méditerranée, ni à concurrencer le processus euro-méditerranéen.
Elle vise à compléter, à mobiliser de nouvelles énergies et à donner une impulsion supplémentaire.
Le Matin - Hassan Alaoui
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