Hanane, étudiante à Gabriel-Péri, expulsée vers le Maroc

11 mars 2009 - 17h31 - France - Ecrit par : L.A

Dans son appartement des Minimes, Mohammed Azdad est encore sous le choc. En France depuis 1976, il travaille dans le bâtiment. À Toulouse où il a refait sa vie, il est père de deux jeunes enfants. Ses deux filles, dont l’aînée, Hanane, vivaient avec leur mère au Maroc. En 2005, il les a fait venir à Toulouse pour qu’elles y suivent leur scolarité. Jeudi dernier, à 7 heures du matin, la Police aux frontières a sonné chez lui, a réveillé Hanane et l’a embarquée sans autre forme de procès.

Placée en garde à vue comme une délinquante et direction Blagnac où la jeune fille a dû grimper dans l’avion de 19 heures pour le Maroc.

« Nous ne sommes quand même pas des bêtes »

Majeure depuis un an et scolarisée au lycée Gabriel-Péri en BEP des métiers de la mode, elle s’était adressée à la préfecture pour une demande de titre de séjour. Refusée. Une procédure a donc été lancée par Me Nakache, l’avocat de Mohammed Azdad, auprès du tribunal administratif. Le papa explique d’ailleurs qu’il n’aurait rien tenté d’illégal : « Je ne suis pas contre la loi. Si elle n’a pas le droit de rester, elle n’a pas le droit. » Ce qui choque Mohammed, c’est la forme. Le tribunal administratif a certes rendu un jugement en faveur de l’expulsion de Hanane, mais le courrier a été envoyé le jeudi 5 mars. Soit le jour même de la reconduite à la frontière. En termes de respect du droit et des droits, Me Nakache s’interroge. Il va sans doute faire appel de la décision mais le mal est fait. La préfecture, elle, se borne à répondre que « la décision est légale » : « Elle a été lue en audience au tribunal administratif, l’avocat en a pris connaissance. La reconduite à la frontière lui a été notifiée lors de sa garde à vue. » Il était temps.

Mohammed, lui, explique : « Ma fille n’était pas cachée. Si on avait reçu une lettre pour me demander qu’elle quitte la France, je l’aurais ramenée moi-même chez sa mère. »

Les procédures expéditives en vogue actuellement en ont décidé autrement. « Elle n’a pu prendre ses affaires. Ma fille est partie sans ses habits, sans un euro en poche, se désole son père. On est des êtres humains, quand même ! On ne jette pas les gens comme ça, comme des bêtes ! »

Une pétition pour Judith

S’il est un secteur industriel qui ne connaît pas la crise, c’est bien l’expulsion d’étrangers sans papiers. 533 d’entre eux ont été expulsés de Haute-Garonne, dont 351 de force, soit 70 de plus que l’année précédente. Les chiffres sont brutaux, qui correspondent chacun à un drame personnel.

Hanane était scolarisée au lycée Gabriel-Péri. L’une de ses camarades, Judith, est aussi sous le coup d’une expulsion vers le Congo qu’elle a quitté en 2004 quand sa famille a été assassinée. Aujourd’hui, l’État veut l’expulser. Judith est parrainée par Philippe Pagès, le patron du Bijou, et Éric Lareine. Ils ont lancé une pétition de soutien avec les profs, les élèves et les parents de Gabriel-Péri pour demander au préfet de bien vouloir examiner personnellement son dossier.

Le Dépêche - Jean-Louis Dubois-Chabert

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Sujets associés : France - Expulsion - Régularisation

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