France : les imams vent debout contre le projet de « labellisation »
La création d’un Conseil national des imams (CNI) en France confiée au Conseil français du culte musulman (CFCM) n’est pas du goût de bon nombre d’imams indépendants et de...
L’imamat féminin est loin d’être accepté au sein de la communauté musulmane française. Et pour cause, les positions divergent.
En France, la question des femmes imames refait surface à un moment où le gouvernement s’évertue à organiser l’islam avec l’appui du Conseil français du culte musulman (CFCM) chargé de créer un Conseil national des imams (CNI). Cette question divise la communauté musulmane en raison de sa complexité et de son caractère politique. Selon certains savants, la doctrine musulmane n’interdit pas formellement l’imamat des femmes.
« Une tradition, qui remonte aux VIᵉ et VIIᵉ siècles, permet même à des femmes de mener la prière au Pakistan ou en Inde. Il n’y a aucune opposition théologique à cela », fait savoir Ghaleb Bencheick, président de la Fondation de l’islam de France. « En dehors de la direction de la prière collective, elles peuvent déjà remplir toutes les fonctions exercées par les imams. Elles intégreront à terme le Conseil national des imams », confirme à L’Opinion Mohammed Moussaoui, le président du CFCM.
On observe une hostilité de principe. À l’évocation du sujet des « mourchidates » (guides religieuses) – une dizaine exerce par exemple en France après avoir été formées à l’Institut Mohammed-VI de Rabat–, des tensions émergent. Il est reproché au CFCM d’être impliqué dans la labellisation des imams et à l’État français de s’ingérer de près ou de loin dans le culte musulman. Or, la France s’abstient d’entrer dans les controverses sur les femmes prêtres ou rabbins.
Tareq Oubrou, recteur de la mosquée de Bordeaux, lui, souligne que, dans les rites malékite (suivi au Maghreb et en Afrique subsaharienne) et hanafite (majoritaire en Turquie), l’imamat des femmes n’est pas admis. « Je crains que cela ne soit qu’un objet de communication cosmétique », conclut-il, estimant que la communauté musulmane n’est pas prête.
« On peut toujours se plonger dans les traditions prophétiques, on n’y trouvera pas de consensus chez les savants sur cette question. Le vrai obstacle à ce qu’une femme dirige la prière, c’est son corps, la visibilité qu’elle lui donne à cette occasion. Pour les conservateurs, c’est un tabou. Cela risque de déconcentrer les hommes, disent-ils. Il n’y a pas d’autre raison à cette opposition », commente Eva Janadin, une enseignante convertie, qui dirige depuis plus d’un an une prière mixte dans un lieu parisien.
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