La France n’a pas toujours été dans la dynamique d’interdire l’usage et la commercialisation du cannabis. Au contraire, elle a même organisé le commerce du cannabis au Maroc, alors sous protectorat français, en y installant la Régie des tabacs et du kif qui avait le monopole sur ce commerce jusqu’à l’indépendance du Maroc, rappelle Franceinfo. Ainsi, le commerce d’État du cannabis prit fin, mais la Régie qui était située à Tanger, continuait à transformer le cannabis et le tabac désormais destinés à la consommation locale, et à contrôler les terres marocaines allouées à la culture du tabac et du cannabis.
« La culture traditionnelle du cannabis, qu’on appelle le kif au Maroc, devient, au moment de la colonisation, un enjeu politique et économique, car elle est la deuxième recette des budgets coloniaux après les droits d’importation. Les différentes puissances européennes vont donc se battre autour du contrôle de l’Europe sur cette ressource. À la fois par intérêt économique, mais aussi par intérêt politique et stratégique : en contrôlant le monopole du cannabis, on contrôle de fait l’État. », explique Yann Bisiou, maître de conférences en droit privé et sciences criminelles à l’université Paul-Valéry Montpellier 3, et auteur de l’ouvrage « Histoire des politiques criminelles : le cas des régies françaises des stupéfiants ».
« Il est intéressant de voir que les décisions ont toujours été prises sur un enjeu sécuritaire », développe Yan Bisiou qui ajoute qu’il « faudra attendre 1916 et la Première Guerre mondiale pour que soit votée une grande loi de prohibition ». En 1925, la France a interdit le cannabis en tant que stupéfiant, mais a autorisé sa forme mélangée au tabac, produite et vendue au Maroc par la Régie. Mais c’est finalement en 1970 que la France a voté une loi pour pénaliser l’usage des drogues y compris le cannabis, ceci après le décès tragique par overdose d’une jeune fille dans une boîte de nuit de Bandol.