« Les Espagnols vont-ils pouvoir se chauffer cet hiver sans avoir à payer davantage ? Pas sûr. Comme annoncé au mois d’août, l’Algérie a mis fin dimanche à l’approvisionnement du gazoduc Maghreb-Europe. Inauguré en 1996 et opéré par le géant national Sonatrach, il acheminait chaque année 10 milliards de mètres cubes de gaz naturel vers l’Espagne et le Portugal en passant par le Maroc », développe le JDD dans un article titré « Fermeture du gazoduc Maghreb-Europe : pourquoi l’Algérie imite la Russie dans la guerre du gaz ».
Pour le journal, ce non-renouvellement du GME par l’Algérie n’a d’autre objectif que de « punir » le Maroc avec lequel il a rompu en août les relations diplomatiques, car le péage dont bénéficiait le royaume « lui rapportait jusqu’à 200 millions d’euros par an », explique le journal, rappelant le « soutien constant de l’Algérie à « l’autodétermination du peuple sahraoui » au Sahara occidental » et les accusations algériennes selon lesquelles le Maroc serait derrière la révolte populaire du Hirak et aurait soutenu les « terroristes » des forêts de Kabylie.
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« Le gain géopolitique de cette nouvelle initiative est nul mais les autorités algériennes s’en moquent, car la hausse des prix du gaz et du pétrole leur donne une marge de manœuvre… », fait observer Pierre Razoux, directeur académique de la Fondation méditerranéenne d’études stratégiques (FMES). Depuis quelques années, le Maroc « a pris l’ascendant » dans la crise avec l’Algérie, passant « d’une posture défensive à une diplomatie offensive en Afrique et en particulier au Sahel », analyse pour sa part Flavien Bourrat, ancien responsable du programme Maghreb à l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire (IRSEM). Et d’ajouter : « Il est possible que l’Algérie imite la Russie dans son utilisation du gaz en tant que levier dans les conflits politiques, comme on l’a vu récemment avec l’Ukraine ou la Moldavie ».
De son côté, le Maroc négocie avec l’Espagne la possibilité d’importer du gaz via le même gazoduc. L’Espagne, elle, devrait se contenter de l’engagement des autorités algériennes de continuer à l’approvisionner en gaz via le gazoduc Medgaz et en multipliant les livraisons de gaz naturel liquéfié par méthaniers.