Les choses se précisent pour la mise en œuvre du nouveau programme d’aide au logement visant à renouveler l’approche d’accès à la propriété, en suppléant au pouvoir d’achat des ménages, via une aide financière directe aux acquéreurs.
La croissance ininterrompue depuis cinq ans de l’immobilier marocain a eu pour conséquence heureuse l’entrée de nombreuses catégories de ménages peu solvables dans des logements financés parfois jusqu’à 120% de la valeur de leur bien. Des engagements risqués ? Cette pratique des 120%, considérée par certains analystes comme une entorse à la prudence bancaire, était l’astuce pour faire face au fameux « noir » exigé en cash par les promoteurs immobiliers.
Durant l’année 2007, les institutions membres du GPBM (Groupement professionnel des panques du Maroc) ont débloqué des crédits au profit de 28.000 ménages à revenus faibles et irréguliers ; ce qui a fait progresser de 30,8% l’encours des crédits immobiliers sur une seule année. Le montant frôle désormais 100 milliards de dirhams (il est d’exactement 93,5 milliards) contre à peine 30 milliards en 2002.
Cette situation, expose-t-elle les banques marocaines face à une année 2008 incertaine ? Les banquiers marocains interrogés sont catégoriques : il n’y a pas de crise en vue, explique Nour Eddine Charkani, président du directoire de Wafa Immobilier, branche dédiée d’Attijariwafa Bank : « La folie va se calmer et le marché va en profiter pour mûrir. Les taux vont se stabiliser sur le moyen et le long termes ».
Pourtant, sur le marché primaire, les offres des intermédiaires et des banques sur les bons de Trésor sont orientées à la hausse depuis plusieurs semaines. Mamoun Tahri, chef du département des études et de la documentation à la BMCE Bank, pense qu’il s’agit là d’« une pression sur le marché de l’immobilier, marché dont les taux planchers sont indexés justement sur ceux des bons de Trésor ». Pour ce jeune cadre, la pression sur l’offre résulte du fait qu’il y a eu peu de conventions sur les logements économique signées entre 2005 et 2006. « Et comme il y a toujours deux ans de décalage entre la signature des contrats et la commercialisation, nous notons un certain déséquilibre sur la période 2007-2008 ».
Comme l’a précisé M. Tahri, la plupart des banques qui avaient aligné leurs offres sur les taux minimums règlementaires (5,07% sur le long terme et 4,62% sur le court terme) ont été contraintes par les tendances du marché à réajuster leurs offres à la hausse.
Capacité de remboursement
D’autre part, durant les cinq dernières années, l’embellie était telle que, face à la concurrence, les banques ont lancé des nouvelles formules de crédit avec des financements pouvant couvrir 110 à 120% de la valeur du bien et étalés sur de longues périodes (15-25 ans). Ce sont en général des crédits accordés aux ménages à revenus faibles voire irréguliers. « Le risque est maîtrisé puisque l’Etat garantit ce type de clientèle. Mais je serai toutefois plus circonspect sur les quotités de financement à 120% et même à 100% », précise un banquier qui préfère garder l’anonymat pour des raisons de concurrence.
Cette pratique des 120%, considérée par certains analystes comme une entorse à la prudence bancaire voulant que le quantum de financement (rapport entre le crédit alloué et la valeur du bien) soit toujours inférieur à un, était l’astuce trouvée pour faire face au fameux « noir » exigé en cash par les promoteurs immobiliers et qui pouvait représenter jusqu’à 15% de la valeur du bien. Tant que les taux étaient faibles, les banques pouvaient s’engager un peu plus dans le risque sans trop de dommages. Aujourd’hui, les tendances de marché s’inversent ramenant au premier plan la question de la capacité de remboursement des ménages.
Si ce scénario se confirme, les clients qui ont contracté des crédits immobiliers à taux variables (représentant 42% des crédits accordés en 2006 selon Bank Al Maghrib) devront globalement ressentir le relèvement de leurs traites mensuelles. Pas de crainte toutefois, prévient un cadre de Wafa Immobilier, d’un « micro-subprime », vu que l’Etat marocain, via des fonds appropriés comme le Fogarim, garantit systématiquement les crédits accordés aux ménages pauvres.
Source : Les Afriques - Adama Wade
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