Amateurisme dans l’nvestissement des MRE ?

13 août 2004 - 10h45 - Maroc - Ecrit par :

“Les risques d’échec sont élevés pour une entreprise individuelle”
Abdesslam El Ftouh, directeur du Pôle promotion économique à la Fondation Hassan II pour les MRE.

L’Economiste : Les MRE manifestent de plus en plus d’intérêt pour l’investissement dans leur pays d’origine. A quoi attribuez-vous ce regain d’intérêt ?
• Abdesslam El Ftouh : J’estime que trois éléments ont été décisifs ces dernières années. D’abord, un élément interne : les changements intervenus au Maroc, qui se sont traduits par la remise en question d’un certain nombre de choix politiques, en d’autres termes alternance, respect des droits de l’homme, statut de la femme. Ensuite, il y a eu l’avènement de l’euro qui a incité les MRE à transférer leur fonds à leur pays d’origine compte tenu des perspectives de change plus prometteuses. Enfin, nous pouvons retenir les perturbations consécutives aux attentats du 11 septembre 2001. Ceux-ci se sont traduites par un sentiment d’inquiétude et de malaise dans le pays d’immigration et par un regain d’intérêt pour les pays d’origine.

Seuls 18% des MRE ont eu recours à une étude de faisabilité pour leurs projets ? Comment expliquer-vous cela ?
• En fait, pour les investissements des MRE, c’est la taille de l’investissement qui détermine s’il y a lieu ou pas d’une étude de faisabilité. Il faut savoir qu’une bonne partie des placements concerne des investissements individuels dans des secteurs relativement simples. Ces actions sont financées par un apport propre. Les MRE font rarement appel aux banques, à l’exception des projets à caractère industriel ou agricole qui ont recours à des crédits bancaires. Par conséquent, ils le font moins concernant des études préalables. Ces investisseurs se passent aussi d’un appel à expertise, étape pourtant nécessaire pour la réussite des projets. Nous essayons néanmoins de rectifier le tir à travers des actions de sensibilisation. La Fondation Hassan II a fait de son mieux que ce soit à travers les guides de l’investisseur MRE ou par le biais de son site Internet pour encourager les MRE à faire des études préalables. D’autant que les risques d’échec sont élevés pour une entreprise individuelle.

Comment est assuré le suivi des projets sachant qu’un nombre important de MRE est toujours installé dans le pays d’accueil ?
• La Fondation Hassan II n’a pas la prétention de pouvoir ni de vouloir suivre tous les projets. Son action intervient pour le soutien souhaité par l’intéressé auprès d’un organisme ou pour le conseil. La Fondation engage une action à caractère générale d’information, de prévention, de contact direct avec l’investisseur, mais nous restons à sa disposition s’il demande un suivi de son projet. Quand un investisseur prend contact avec la Fondation, celle-ci étudie le projet, surtout ses capacités de réussite compte tenu d’un certain nombre d’éléments : expériences dans le métier, capacités financières, âge... Nous estimons qu’il est nécessaire d’impliquer l’intéressé. Le suivi se fait étape par étape. La Fondation reçoit près de 200 personnes par an pour des projets d’investissement. On met à leur disposition la documentation et les contacts des différentes administrations. Par la suite, ils engagent leurs actions. En général, les MRE reviennent en cas de problèmes. On reçoit près de 1.000 requêtes économiques par an. Il s’agit des informations concernant les impôts, la fiscalité, la douane, la conservation foncière, les investissements, les transactions.

Les transferts en devises de MRE avoisinent les 34 milliards de DH. Que faites-vous pour capitaliser cette manne ?
• Tout d’abord, j’aimerais préciser que la Fondation Hassan II pour les MRE n’agit nullement en faveur ou défaveur des transferts. Notre démarche s’inscrit dans la préservation des relations entre les MRE et leurs pays. Le transfert des Marocains à l’étranger est un choix délibéré. Ces flux financiers dénotent surtout d’un fort attachement de nos concitoyens à leurs pays. Ils sont réalisés en faveur de famille restant sur place, ou pour constituer une épargne au Maroc ou encore pour des besoins d’investissements engagés des MRE pour réaliser des projets sur le sol national. Ces dernières années, les transferts ont connu une nette progression. Aujourd’hui, il est nécessaire de capitaliser sur ce regain de confiance. Notre objectif est de répondre au souhait des MRE qui voudraient participer au développement du pays.

Quelle lecture faites-vous des résultats de la dernière enquête sur les investissements des MRE au Maroc ?
• A partir des requêtes que nous avons traitées ces dernières années. Nous avions une idée des problèmes que les MRE rencontrent pour investir. L’idée de l’enquête est venue du constat qu’une meilleure connaissance de l’investisseur aidera la Fondation à mieux le servir. Nous avons constaté que les MRE continuent de rencontrer des obstacles au niveau du financement et auprès des administrations. Les résultats confirment ce qu’on avait remarqué dans les différentes procédures de création d’entreprises. Par rapport au financement, si très peu de MRE ont recours aux financements bancaires, c’est aussi parce que ce n’est pas simple.

Propos recueillis par Fadwa EL GHAZI - L’économiste

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