Le chef du Polisario, Brahim Ghali, vient de décréter trois jours de deuil, après le décès vendredi d’un haut responsable militaire et trois miliciens dans une attaque marocaine.
À voir le ballet diplomatique entre Alger et Rabat, on peut penser que les relations algéro-marocaines sont en passe de voir le bout du tunnel.
Le ministre des A.E. marocain a séjourné deux jours à Alger pour poursuivre, avec son homologue algérien, l’examen des voies devant assurer la normalisation entre les deux capitales. Le processus a commencé le mois dernier, avec la visite du chef de la diplomatie algérienne à Rabat où il a été fait état de la volonté de transcender les fâcheries pour se consacrer, sérieusement, à la reconstruction de relations qui doivent être celles de voisins partageant des défis identiques et faisant également face à des écueils plus ou moins similaires.
Les discussions d’Alger, jugées par les deux parties franches et responsables, s’inscrivent dans une perspective d’avenir. On n’a pas trop insisté sur les sujets qui fâchent, estimant qu’ils seront dilués dans la dynamique de normalisation. Alger et Rabat sont, aujourd’hui, persuadés que continuer à se regarder en chiens de faïence est improductif non seulement pour eux mais aussi pour tout l’ensemble maghrébin qui n’arrive pas encore à décoller, bien que son projet soit vieux de plusieurs décennies. Mieux vaut affronter la mondialisation sous forme d’ensemble homogène qu’en solitaire.
Le Maroc a une longueur d’avance dans ce domaine, cependant, avec son marché étroit, il n’a pas enregistré que des bénéfices. Ses outils économiques et financiers ont été modernisés, mais le chômage n’a pas pour autant baissé, livrant des pans entiers de sa jeunesse à l’islamisme radical. Les autorités marocaines ont fini par admettre que l’Algérie constitue pour leur pays une bouée de sauvetage, exhortant Alger à la réouverture de ses frontières. L’Algérie, pour sa part, a toujours répondu que les frontières, que le Maroc a, par ailleurs, fermées unilatéralement en 1994, doivent être repensées dans le contexte de relations sereines et pérennes qui doivent s’établir entre deux voisins que tout uni : la géographie, la proximité de l’Europe, la langue, la culture et des économies complémentaires.
Ces données qui ont déjà établi l’UMA, ne serait-ce qu’en tant qu’objectif communautaire, semblent avoir pris le dessus aujourd’hui. Le Maroc qui doit désormais faire face à l’islamisme radical, dans sa version terroriste, semble s’être rallié aux préalables algériens.
C’est-à-dire, à la mise à plat de tous les contentieux qui ont envenimé les rapports algéro-marocains.
Nul doute aussi que la nouvelle attitude du Maroc découle également de l’appréciation de ses partenaires occidentaux qui estiment aussi qu’un Maghreb homogénéisé dans un marché de plus de 100 millions de consommateurs est plus à même de régler les questions du développement, de l’émigration et de la sécurité dans le flanc occidental de la Méditerranée.
Le président français Chirac, rejoignant le point de vue des États-Unis, a longuement plaidé pour la construction du Maghreb à Alger, en avril dernier, devant le Parlement, se proposant même d’y apporter sa propre contribution.
Reste la question du Sahara : la position du Maroc semble, pour l’heure, figée mais, comme les tentatives d’une troisième voie ont toutes échoué, la solution onusienne finira, tôt ou tard, par l’emporter.
Si auparavant, ce dossier a empêché la construction maghrébine, la normalisation algéro-marocaine pourrait relancer l’UMA et le conflit maroco-sahraoui pourrait y trouver dans son sillage la solution idoine.
Une chose est au moins sûre : le Maghreb ne peut pas rester à la traîne de l’ensemble qui s’est forgé en face de lui (UE) et qui s’est nourri, entre autres, des divisions de ses voisins du Sud.
Djamel Bouatta - Liberté, Algérie
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