Abdeslam Ouaddou : "Je pense au Cameroun tous les matins"

23 mai 2009 - 14h42 - Sport - Ecrit par : L.A

Avec son franc-parler habituel, le défenseur des Lions de l’Atlas évoque les sujets chauds de l’heure : la défaite contre le Gabon, le prochain match au Cameroun… et l’arrivée du “président” Ali Fassi Fihri.

A un mois du match crucial contre le Cameroun, quel est l’état d’esprit des joueurs de l’équipe nationale ?

Après la rencontre contre le Gabon, l’ensemble des joueurs avaient le moral à zéro. Normal, le Maroc venait de subir sa première défaite
officielle à domicile en vingt ans, et surtout d’hypothéquer ses chances de qualification pour le Mondial 2010. Mais aujourd’hui ça va nettement mieux, les joueurs sont conscients du challenge qui les attend. Ils sont motivés à bloc et déterminés à prendre leur revanche. Quant à moi, je suis impatient d’affronter cette équipe camerounaise. Je peux même vous dire que j’y pense tous les matins en me rasant.

Sérieusement, vous pensez que le Maroc a des chances de ramener un bon résultat de Yaoundé ?

Je suis convaincu qu’on peut y arriver. Mais à une seule condition : Roger Lemerre et Fethi Jamal, les deux responsables de l’équipe, doivent aligner la meilleure équipe possible. Comment ? En donnant dorénavant la priorité aux joueurs les plus en forme du moment.

Insinuez-vous que ce n’était pas le cas avant ?

Tout le monde a pu voir le match contre Gabon et se faire une idée sur cette question.

Il paraît que vous êtes contre la titularisation en équipe nationale des joueurs évoluant dans les clubs du Golfe…

Je ne tiens pas à polémiquer sur le sujet. Tout ce que je peux dire, c’est que les championnats européens sont plus relevés que ceux du Golfe. N’importe quel technicien du ballon rond vous dira la même chose. Il est donc tout à fait normal que l’équipe nationale soit formée essentiellement des joueurs marocains qui évoluent en Europe. C’est une évidence. Personnellement, ça fait trois ans que des clubs émiratis et qataris tentent par tous les moyens de me recruter, avec à la clé des contrats mirobolants, mais à chaque fois je refuse. Pourquoi ? Parce que je suis convaincu qu’en allant là-bas, mon niveau de jeu va nettement baisser et donc je ne serai plus capable d’apporter quoi que ce soit à l’équipe nationale. Un jour, j’irai peut-être jouer là-bas, mais il est certain que je continuerai à penser la même chose.

D’après vous, quels sont les points forts et les points faibles de l’équipe camerounaise ?

Je ne suis pas d’accord avec les gens qui trouvent que le onze camerounais est vieillissant. La preuve c’est qu’il compte dans ses rangs des joueurs redoutables qui s’illustrent régulièrement sur le plan international. Je pense entre autres à Samuel Eto’o, Carlos Idriss Kameni, Geremi Njitap ou Rigobert Song, etc. Par contre, le Cameroun a tendance à se reposer sur ses lauriers et son prestige d’antan. A nous alors d’en profiter.

Vous estimez que le Maroc est capable de tenir tête à la grande équipe du Cameroun alors qu’il a chuté devant la modeste sélection du Gabon. Vous n’êtes pas un peu trop confiant ?

Heureusement que je le suis. Il faut qu’on croie en nos chances et surtout que le public se remette à croire en nous. C’est vrai qu’on a grillé un joker devant le Gabon et qu’on n’a plus droit à l’erreur, mais il ne faut pas oublier qu’en football, tout est possible. L’équipe du Maroc a un effectif capable de relever ce défi, j’en suis convaincu.

Comment expliquez-vous alors la défaite devant le Gabon ?

Comme je vous l’ai déjà dit, les joueurs les plus compétitifs n’étaient pas tous sur le terrain. Tout au long de la semaine de préparation qui a précédé le match, de nombreux joueurs ont montré de belles qualités mais, curieusement, ils n’ont pas été retenus. Malheureusement, on aurait pu éviter tout ça. Les deux sélectionneurs ont à mon avis une grande part de responsabilité dans la débâcle contre le Gabon. Je tiens en revanche à tirer un grand chapeau à l’équipe gabonaise qui a livré un match sans complexe.

Vous êtes conscient qu’en accusant ainsi Roger Lemerre et Fethi Jamal, vous mettez en danger votre place au sein de l’équipe nationale ?

Écoutez, tout le monde sait comment je suis. Je n’ai pas pour habitude de faire dans la langue de bois. Le public marocain est en droit de savoir ce qui se passe au sein de son équipe nationale. Si je parle aujourd’hui, ce n’est pas pour enfoncer les uns ou les autres. Je le fais uniquement pour faire avancer les choses et que les erreurs ne se reproduisent plus.

Récemment, vous avez reçu la visite en France du nouveau président de la Fédération royale marocaine de football, Ali Fassi Fihri. Quel était le but de cette rencontre ?

Depuis le match contre le Gabon, tout le monde sait qu’il y a beaucoup de tension et de frustration au sein de l’équipe nationale. Ali Fassi Fihri a eu la bonne idée de faire une tournée en France, en Belgique et aux Pays-Bas, afin de mobiliser les troupes, qui en avaient d’ailleurs grand besoin, en vue du match contre le Cameroun. Et je peux vous dire que les joueurs ont apprécié son initiative.

Il paraît qu’il vous a demandé d’être son relais auprès des joueurs de l’équipe nationale. Qu’en est-il ?

En effet. J’ai d’ailleurs commencé par contacter la plupart des joueurs évoluant en Europe pour leur transmettre le message suivant de Ali Fassi Fihri : la qualification est toujours possible et il faut que tous soit solidaires dans cette épreuve.

Que pensez-vous du choix de Adil Rami de porter les couleurs de la France ?

C’est dommage de se priver d’un joueur aussi talentueux. Mais que voulez-vous, c’est son choix, et il faut l’accepter. Maintenant, il faut se demander pourquoi ce joueur et d’autres, comme Affelay et Kaboul, n’ont pas été convaincus par les arguments marocains.

Et pourquoi à votre avis ?

Tout simplement parce qu’ils ont des échos sur la manière avec laquelle est gérée la sélection marocaine. Ça ne leur inspire pas confiance. Espérons que tout cela va changer avec Ali Fassi Fihri, car si ça continue ainsi, on risque de perdre à l’avenir d’autres joueurs pétris de talent.

Quelle est votre situation au sein de votre nouveau club, l’AS Nancy Lorraine ?

J’ai signé un contrat de quatre ans (jusqu’en 2012) avec le club de mes premières amours, je ne peux être que content. Même si notre saison n’a pas été aussi étincelante que la précédente.

Justement, en 2008, Nancy a terminé le championnat à la quatrième place. Cette année, vous luttez contre la relégation. Qu’est-ce qui vous est arrivé ?

On a fait un très mauvais début de championnat, en alignant beaucoup de nuls, ce qui a installé le doute parmi les joueurs. Mais depuis quelques semaines, on a su relever la tête. Nous avons sorti de grands matchs et avons quasiment assuré notre maintien.

Source : TelQuel - Mehdi Sekkouri Alaoui

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