Décidément, les textiliens marocains ont de quoi broyer du noir ! Quelques semaines après avoir découvert accidentellement, en marge de l’ALE avec les Etats-Unis, que certains petits pays tels Bahreïn et Qatar exportaient nettement plus que le Maroc vers le pays de l’oncle Sam, voilà que les derniers chiffres publiés en France par le Centre textile de conjoncture et d’observation économique (CTCOE) enfoncent le clou.
Ainsi, les statistiques de l’année 2003 consacrent dans le marché français, dont le montant total des importations textiles est de 10,7 milliards d’euros (120 milliards de DH), la montée en puissance de la Chine qui progresse de 8,1 % sur une année glissante et 11,3 % en croissance moyenne annuelle sur les quatre dernières années. Elle consolide ainsi son rang de premier exportateur de vêtements dans l’Hexagone avec 1,61 milliard d’euros (18 milliards de DH) et ce essentiellement au détriment de la Tunisie qui régresse de 8 % à 1,08 milliard d’euros (12 milliards de DH) et du Maroc qui recule de 8,5 % à 898 millions d’euros (10 milliards de DH).
Dans la foulée, les exportateurs marocains de textile se voient non seulement distancés, mais se font supplanter à la troisième position par l’Italie, qui accroît ses réalisations de 6% à 985 millions d’euros (11 milliards de DH). Pire, ils voient leur performance revenir à un niveau inférieur à celui de l’année 2000 où ils ont exporté 915 millions d’euros. La part de marché du Maroc passe ainsi à 8,4 %, après avoir atteint près de 10 % il y a juste trois ans. L’argument de la proximité géographique est ainsi balayé de façon très nette.
La compétitivité mise à mal par la dépréciation du dollar par rapport à l’euro
Mais que peuvent-ils faire devant un rouleau compresseur comme la Chine qui profite de son adhésion à l’Organisation mondiale du commerce ?
En effet, depuis 2002, elle bénéficie du démantèlement progressif des quotas limitant ses exportations en attendant une libéralisation complète en 2005.
A la décharge des industriels du textile également, l’évolution nettement défavorable du rapport euro-dollar, puisque la compétitivité des produits en provenance d’Asie se trouve artificiellement renforcée face aux pays arrimés à la zone euro comme le Maroc et la Tunisie.
La bataille s’annonce rude, très rude même, si l’on ne veut pas voir nos exportations en France et en Europe en général se rétrécir comme une peau de chagrin dans les années à venir. Le dernier rapport de la Compagnie française d’assurance du commerce extérieur (Coface) tire d’ailleurs la sonnette d’alarme en pointant le manque de préparation du secteur en vue d’affronter la fin de l’« accord multifibres », contrairement à son homologue turc.
De ce problème, les professionnels réunis au sein de l’Amith sont conscients et se préparent activement à passer de la sous-traitance à la co-traitance. En auront-ils le temps ? Il y aura certainement de la casse au cours des années à venir.
M.C. - La Vie économique