Un citoyen britannique de 28 ans a été interpellé par la Guardia Civil, suite à une tentative de meurtre envers un Marocain à Santa Ponsa (Baléares).
Il est présumé innocent, mais il est également le seul suspect pour l’assassinat de Stacy (7 ans) et Nathalie (10 ans), les deux fillettes liégeoises enlevées et violées, au moins pour la seconde, au mois de juin 2006 en Cité ardente. Dès lundi, il répondra de cela aux assises de Liège. Mais qui est donc Abdallah Ait Oud ?
L’enfance
Sa famille, marocaine, s’établit en Belgique en 1964. Son père Omar est mineur au "Roton", en Hainaut. Avec Yasmina, il a déjà quatre enfants mais le couple va encore en avoir cinq. Dont Abdallah, qui voit le jour le 23 juillet 1967.
La famille émigre vers Grâce-Hollogne deux ans après cette naissance, Omar travaillant alors au charbonnage de Montegnée. C’est là qu’Abdallah Ait Oud débute sa scolarité qui, assez vite, va se tourner vers l’enseignement secondaire spécial, dans un établissement de Flémalle.
Il rejoint un niveau réservé aux handicapés légers - alors qu’on verra bien plus tard qu’il est loin d’en être un. Toujours est-il qu’il réussit trois années en "mécano-soudure"... avant de rater deux fois la 4e.
Est-ce à cause de la mésentente familiale ? L’ambiance s’est en tout cas dégradée, à la maison : Omar rentre souvent du travail un peu ivre, à la maison. Et, sans qu’on en sache bien tout, il aurait pu être question de faits de moeurs, ailleurs dans la famille. On sait d’ailleurs qu’Ait Oud s’en est plaint, en cours d’enquête.
Les choses se dégradent encore en 1984. A ce moment, le père travaille à Charleroi, ne rentre pas tous les jours. Et Abdallah, qui n’est pas le seul dans la fratrie, accumule les absences scolaires non justifiées, pendant que son comportement se détériore. Contactés par l’école, ses parents affichent leur impuissance. Leur fils finit par ne plus y aller du tout.
Le mauvais garçon
En 1985, les parents décident le retour au Maroc, espérant une amélioration de la situation de famille. Mais Abdallah et son aîné fuguent pour éviter le départ. Le premier est alors confié à la garde du second. Enfin, garde est un bien grand mot : Abdallah vit le plus souvent chez des copains, au jour le jour...
Dès sa majorité, il se fait connaître de la justice pour consommation et trafic de drogue. Il connaît ensuite sa première cellule de prison en fréquentant Lantin pendant deux semaines, dès février 1986.
Cela n’a rien à voir avec le fait qu’il n’est pas appelé au service militaire : de nationalité marocaine, il n’y est pas tenu en Belgique.
Bref, il fait un saut au royaume chérifien, près de sa famille, en quittant la prison. Cela ne change rien à la donne : il revient en Belgique et vit, sans travailler, tantôt chez une soeur, tantôt chez un frère.
Il accumule alors les infractions et les délits. En 1987, nouveau bref séjour à Lantin. Pis : c’est cette année-là qu’il commence à contraindre, au besoin par la violence, sa nièce de 7 ans à des attouchements, puis à des viols. A ce moment, la petite tait son malheur.
Le violeur
En 1988, accident de voiture : Ait Out est blessé et l’un de ses frères y laisse la vie. Les deux années suivantes, c’est pour du vandalisme et des dégradations qu’il attire l’attention de la police. On ne sait pas trop comment il vit, à ce moment.
Mais un autre choc l’attend : sa mère meurt au Maroc en 1993, sans qu’il l’ait revue. Ce qui ne l’empêche pas d’injurier et de blesser un policier à Liège, quelque temps plus tard.
Le 1er avril 1994 est un jour noir pour Ait Oud : les parents de sa nièce, qu’il a continué de violer pendant 6 ans, ont découvert la chose en lisant son journal intime. Il est arrêté le lendemain, puis jugé et condamné.
Il purge sa peine jusqu’au début février 1996 à l’établissement pénitentiaire de Saint-Hubert. Dès lors, c’est quasi sans interruption qu’il amasse mauvais coups et méfaits.
Deux jours après sa libération, pourtant sous conditions, il est blessé de trois balles dans les jambes, au cours d’une bagarre de café, au "Carré", dans la nuit liégeoise.
Suivent grivèleries, vols de voitures, et on en passe. Logique : il est à nouveau rattrapé par la justice et, en septembre 1997, retourne à Lantin. Jusqu’en juin 2000.
Le retour en Belgique de son père - remarié à une dame plus jeune que lui de trente ans -, ne change pas non plus les choses.
Le 10 mars 2001, sous l’effet de la cocaïne et alors qu’il vient de se faire traiter de pédophile dans un café, il vole une voiture avec laquelle il enlève une fillette de 14 ans, à Grâce-Hollogne. Et la viole sauvagement, la frappant même à l’aide d’une pierre.
Identifié, il retourne en prison le 24 avril 2001. Séjour bref : le neuropsychiatre de service affirme qu’Ait Oud doit être interné. Il l’est, à Pfaive. Mais, le 14 décembre 2005, une nouvelle expertise mentale le conduit vers la sortie...
Pas psychopathe, mais...
Voilà donc Ait Oud libre comme l’air. Pourtant, indique le médecin, il reste "potentiellement dangereux". Pas fou, dangereux. Ce qui ne relève pas de l’internement... (nous y reviendrons).
Bref, la médecine évoque alors un individu au contact plutôt aisé, s’exprimant de manière naturelle, quoique basique, un peu manipulateur et aux capacités intellectuelles moyennes mais pas anormales.
Discours logique, absence de troubles affectifs, humeur constante : rien d’anormal, décidément, si ce n’est que sa jeunesse (mais pas sa famille, puisque frères et soeurs ont atteint de bons niveaux) a fait d’Ait Oud un anti-social narcissique. Pas un psychopathe.
Même si, plus tard faut-il admettre, d’autres experts admettront que, décidément sans être fou, sa personnalité présente une personnalité "organisée sur un mode psychopathique". Jargon spécialisé, nuances subliminales...
Adulte prédateur
C’est à sa sortie de Pfaive qu’Ait Oud s’installe à St-Léonard. Où il découvre le café "Les Armuriers", cette "Casa Tito" où il commettra un an et demi plus tard l’horreur que l’on sait.
En tout cas, il y rencontre Sylvie, avec qui il noue une liaison. Brève : elle le largue après 3 semaines... Trop autoritaire, trop possessif, semble-t-il. Et puis, la drogue, elle n’aime pas...
En janvier 2006, Ait Oud tombe amoureux d’une autre serveuse de l’établissement : Christelle, qui le lui rend bien même si sa jalousie l’énerve et conduit parfois à la dispute.
Il lui reproche son travail, le soir, la nuit. Même si lui ne travaille pas : sans aucun droit au chômage, il ne vit que de l’argent du CPAS.
Nouvelle dispute, le 9 juin 2006. C’était quelques heures avant que Stacy et Nathalie disparaissent dans le noir d’une nuit infinie...
Source : Libre Belgique - Roland Planchar
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