Avant 2019, Naima Jillal était connue des services de police néerlandais pour des faits de menaces (2005), fraude, culture de marijuana et agression. Elle avait justifié ces actes par des difficultés financières. Son implication présumée dans le trafic de drogue à grande échelle semble débuter vers 2014, où son nom est apparu dans plusieurs dossiers concernant l’importation de cocaïne via les ports des Pays-Bas et de Belgique, souvent dissimulée dans des cargaisons de fruits. Les informations disponibles suggèrent qu’elle agissait comme intermédiaire, utilisant ses contacts parmi les fournisseurs en Amérique du Sud (Costa Rica, Équateur), les financiers, les agents portuaires et les transporteurs. En raison de son âge, elle était surnommée “tata” (tante) par certains de ses associés. Elle résidait dans un appartement près de Marbella, en Espagne, et menait un style de vie luxueux, incluant des dépenses importantes lors de shopping et l’acquisition d’un appartement pour son fils à Amsterdam.
Un incident est survenu le 30 mai 2016, lorsqu’un conteneur contenant 4 000 kilogrammes de cocaïne en provenance du Costa Rica a été identifié pour inspection au port de Rotterdam. Des messages cryptés interceptés révèlent un échange entre Jillal et un associé. Ce dernier écrit : « Ces conteneurs vont être scannés. On est foutus, tata. […] Il s’agit de beaucoup d’argent et de longues peines de prison, tata. Tout est foutu maintenant. » Jillal répond : « Il faut qu’on fasse du contrôle des dégâts […] On va juste faire circuler une nouvelle version. » La cargaison a été saisie. Par la suite, des rumeurs ont circulé dans le milieu criminel, l’accusant d’avoir escroqué des partenaires financiers ou d’avoir potentiellement transmis des informations aux autorités, ce qui aurait pu la mettre en danger.
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En octobre 2019, après avoir subi une intervention chirurgicale, Naima Jillal s’est rendue d’Espagne aux Pays-Bas. Le soir du 20 octobre, elle a été vue pour la dernière fois montant dans un véhicule devant son appartement à Amsterdam.
L’enquête policière s’oriente vers l’hypothèse d’un enlèvement suivi d’un homicide. « Nous pensons qu’elle n’est plus en vie », avait déclaré Thomas Aling, porte-parole de la police d’Amsterdam, ajoutant : « On soupçonne qu’il s’agit de Jillal et qu’elle a probablement été torturée ». Cette hypothèse est renforcée par la découverte de photographies sur un téléphone portable saisi à Dubaï lors de l’arrestation de Ridouan Taghi en décembre 2019. Selon le journal néerlandais Het Parool, ces photos, potentiellement prises la nuit de la disparition de Jillal, montreraient une femme nue et attachée, avec des signes de violence physique, dont un doigt apparemment sectionné.
Les autorités néerlandaises ont désigné Jos Leijdekkers, surnommé « Bolle Jos », comme principal suspect dans cette affaire. Une récompense de 200 000 euros est offerte pour toute information permettant son arrestation. La police base ses soupçons sur des « messages de communication cryptographique interceptés » qui « révèlent que Leijdekkers a joué un rôle important dans la disparition de Jillal ». Il est activement recherché. Ce dernier a récemment été localisé en Sierra Leone, où il entretiendrait une relation avec la fille du président Julius Maada Bio.
Plusieurs théories coexistent quant au mobile de sa disparition : un règlement de comptes lié à la perte d’une cargaison de drogue, des représailles pour une éventuelle collaboration avec les autorités, ou des conflits internes au sein des réseaux criminels pour lesquels elle travaillait. Confirmant son implication, le porte-parole de la police a précisé : « Elle jouait son rôle dans le trafic de drogue et elle était impliquée avec les grands noms de la scène du trafic de drogue ». Le corps de Naima Jillal n’a pas été retrouvé à ce jour.