Le Maroc croule sous les demandes. C’est à peu près l’image que les officiels voudraient donner de l’état actuel de l’offshoring dans le pays. « Nous recevons de plus en plus de demandes de la part des opérateurs européens mais aussi de nos clients actuels qui souhaitent renforcer leur présence au Maroc. Aujourd’hui, nous adoptons une démarche positive. Le Maroc arrive actuellement en tête des implantations au Maghreb. C’est un fait. Le programme Émergence lancé par le gouvernement porte donc ses fruits », insiste Mohamed Lasry, administrateur directeur général de Casanearshore.
Pourtant, ici et là, des avis s’élèvent pour pointer du doigt quelques failles dans l’offre Maroc. « Je pense que le Maroc n’est pas actuellement une destination attractive pour ceux qui connaissent l’offshore. D’après tous mes contacts, le Maroc, en tant que destination offshore, n’a pas tenu ses promesses », affirme Frédéric Lasnier, PDG de Pentalog iNet qui emploie 200 personnes en offshore. « Le manque crucial de ressources humaines crée une situation dans laquelle le salaire monte sans augmentation de la productivité », explique-t-il. « Je pense que les très grandes entreprises vont désormais (suite à la crise financière) se focaliser essentiellement sur l’Extrême-Orient et que certains pourraient effectivement décider de faire l’impasse sur les pays middle cost (150 à 250 euros par jour de travail) pour privilégier directement les vrais low cost (75 à 150 euros par jour) », analyse Lasnier.
« À ce jour, les faits démontrent le contraire », rétorque Lasry. « Les plus grands acteurs européens, américains et indiens sont déjà implantés ou ont réservé un espace au sein de Casanearshore et de Technopolis, deux parcs dédiés aux activités de BPO et d’ITO parfaitement opérationnels. L’ouverture des deux parcs selon les délais annoncés a, bien au contraire, conforté notre position et renforcé le climat de confiance qui régnait déjà avant même que les premiers bâtiments ne soient livrés ».
L’ancien président de STMicroelectronics s’attelle à démonter une à une les critiques adressées au Maroc. « Parler de tension sur les salaires ou le foncier dans le contexte actuel serait donc quelque peu prématuré. Comparativement aux pays des donneurs d’ordre et aux principaux concurrents, le Maroc dispose d’un vivier important de ressources humaines de qualité et à des coûts compétitifs. Ces ressources sont issues d’excellentes écoles d’ingénieurs et de compétences essaimées dans toute l’Europe », insiste-t-il.
Lasry précise néanmoins que « certains profils restent rares au niveau mondial (et pas seulement au Maroc). Dans le pays, tous les moyens sont mis en œuvre en collaboration avec les différents organismes de formation pour s’adapter continuellement aux besoins du marché ». Il rappelle les programmes déjà lancés et qui visent à former 22.000 diplômés par an dans les métiers de l’offshoring d’ici 2009 et 10.000 ingénieurs par an d’ici 2010.
« Dans l’offre marocaine, j’ai vu une lacune principale qui pourrait surprendre, venant d’un Français : la langue ! », fait remarquer Frédéric Lasnier, PDG de Pentalog iNet. « Le niveau d’anglophonie est pire que celui des Français. Or travailler en offshore ouvre la possibilité de séduire des clients n’importe où. Les Roumains parlent anglais, français, italien, un peu d’allemand. Les Tchèques, les Hongrois, les Slovaques parlent anglais et allemand. De ce fait, ils peuvent se battre sur des marchés 10 fois plus gros », poursuit-il.
En effet, l’offre actuelle du Maroc en offshore s’adresse essentiellement à une clientèle francophone. Cela n’empêche pas de voir pousser ici et là des petits call-centers s’adressant à des publics anglais, néerlandais, suédois, espagnol, italien et autres. Pour les services de développement informatique, le problème se pose avec moins d’acuité étant donné que le langage numérique codifié est plus ou moins le même indépendamment du pays de provenance ou de destination. Mieux, le management de casanearshore affirme que « bien que de niveau variable, la maîtrise de la langue n’a jamais entravé la communication au sein des entreprises et que dans tous les cas ce n’est pas une difficulté insurmontable. Les aides à la formation proposées ont été justement prévues pour pallier les éventuelles insuffisances des jeunes diplômés ».
Foncier ? Pas un problème
« Mineur, mais pas négligeable ». C’est comme cela que qualifie Frédéric Lasnier les questions foncières. « Finalement, lorsque vous êtes en location en offshore, vous dépensez, selon la cherté des zones, de 60 à 120 euros par mois et par salarié en locaux. On parle donc d’une petite partie du coût global de l’ingénieur ». Et parce que le foncier n’est pas négligeable, l’Etat marocain a décidé de lui accorder l’importance qu’il mérite.
Il s’agit de la viabilité de l’offre tout entière, aucun élément ne doit y faire défaut. « Dans le cadre du lancement du plan « Emergence », MedZ a entamé la mise en place d’un réseau de parcs offshore et technologiques à travers tout le royaume », explique Mohamed Lasry. « C’est ainsi que des zones spécialement dédiées à l’offshoring (Casanearshore, Technopolis et bientôt Fès Shore) sont en train de voir le jour avec une offre d’infrastructures et de services au niveau des meilleurs standards de qualité et de coût. On parle là de plus de 600.000 m2 de bureaux et de services dédiés à l’offshoring et aux nouvelles technologies à l’horizon 2011. Cela répond à la problématique du foncier », conclut le président de Casanearshore.
Quand le Vietnam se réveillera
Il forme 9000 informaticiens par an dont le salaire annuel moyen est de... 2000 euros ! Le Vietnam est aussi un pays francophone. « Je reviens du Vietnam, j’ai vu la convergence des deux courbes démographique et pédagogique. Nous avons donc décidé de nous y implanter dès à présent », affirme Lasnier.
Ce pays asiatique surclasse en effet tous les autres pays en matière de salaire. Selon un sondage des destinations les moins chères réalisé par Offshore Développement, un portail dédié à l’externalisation, le Vietnam arrive en tête avec un écart de 70% par rapport au salaire moyen d’un informaticien français. Le Maroc est loin, très loin derrière, cet écart n’étant que de 43%.
Source : L’Economiste
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