Les devantures des boutiques dans les grandes artères des villes du Maroc, notamment Casablanca, ont très vite changé d’apparence. “Happy new year” ou “joyeux Noël’’, lit-on sur les vitres en toutes les couleurs. Cependant, et loin de tous les débats et controverses suscités par les fêtes de fin d’année dans les familles marocaines, la célébration du Noël est un fait qui s’est installé dans les mœurs depuis quelques années. Pour leur part, de nombreux jeunes profitent de cette occasion pour se faire un peu d’argent. C’est le cas de Saïd.
Il s’apprête à devenir pendant quelques jours un « papa Noël ». Il a ressorti son costume rouge qui porte déjà les empruntes du temps. C’est la troisième année consécutive qu’il s’adonne à ce métier qui, selon lui, rapporte une somme d’argent intéressante. « C’est un ami photographe qui m’avait proposé ce job. Mon rôle est simple. Je pose en photo avec des enfants qui viennent accompagnés de leurs parents dans ce parc. A la fin de la journée, je reçois un pourcentage des gains », explique Saïd. Ils sont à peu près dix pères Noël éparpillés à travers les grandes artères de la métropole. D’une manière générale, les pères Noël sont sollicités durant les trois derniers jours avant la fête de fin d’année.
Intrigués par cet homme avec un look qui rappelle l’un des personnages les plus célèbres de la planète, les enfants tiennent à être photographiés en sa compagnie. Les parents, quant à eux, cèdent à la requête de leurs bambins. « Mes deux enfants aiment bien ce personnage. Ils le regardent souvent à la télévision. C’est pour cette raison qu’ils me demandent de les prendre en photo avec lui », déclare Zohra, une secrétaire à la retraite, venue avec sa petite fille.
Cependant, certaines familles éprouvent une difficulté à expliquer l’histoire du père Noël et sa place dans la société. Une tâche un peu délicate. « Dans un pays musulman où la célébration du Noël est l’une des résultats de la mondialisation, il est un peu difficile d’expliquer à un enfant la symbolique et les connotations du Noël. Mais il est sûr que les parents marocains profitent de cette occasion seulement pour offrir aux enfants des cadeaux », témoigne Amina, informaticienne et mère de deux petites filles.
Le commerce des jouets est « boosté » durant cette période. Poupées, nounours en tous genres et en toutes les couleurs, ornementent les boutiques. Autres les grands magasins spécialisés dans la vente des jouets, des commerçants saisissent également l’occasion pour gagner plus. « Pendant la période de la fin de l’année, ce sont les jouets qui se vendent le plus. Les prix sont à la portée de toutes les bourses. Nous avons des jouets à partir de 100 DH », déclare le gérant d’un magasin de jouets à Maârif. Parmi ses clients, des étrangers installés au Royaume mais également des Marocains.
Les gérants ont aménagé spécialement pour cette occasion un coin pour emballer dans du papier les cadeaux. « Les clients ne payent rien pour l’emballage. C’est offert par la maison », lance une vendeuse dans le magasin. A Twin Center, une destination prisée pour les amateurs du shoping et du lèche-vitrines, les responsables ont réservé à cette occasion une programmation spéciale. Au menu, des tombolas, des promotions et de l’animation assurée par un DJ. L’enjeu est de taille. Le Noël est caractérisé par une intense activité commerciale.
Dans toutes les pâtisseries, c’est le branle-bas de combat. Elles vont bientôt devoir répondre à une forte demande. Bûches, tartes et autres gâteaux sont produits par dizaines. « Nous allons travailler à plein-temps les quelques jours qui nous séparent encore de la fin d’année. Nous avons déjà reçu beaucoup de commandes. Ce sont essentiellement les bûches sont très demandées pour cette occasion », informe le propriétaire d’une pâtisserie à l’ancienne médina. Même dans les milieux populaires, la fin d’année est fêtée. Les gâteaux deviennent même des produits de grande consommation. Ils sont proposés dans certains quartiers sur des étalages à même le sol par « des pâtissiers saisonniers ».
Ces derniers transforment leurs maisons en “fabriques de gâteaux’’. Ils sont concentrés à « Moha Saïd », une ruelle très connue à la médina casablancaise. Selon un vendeur, des centaines de gâteaux sont vendus pendant cette période. « Notre point fort réside dans nos prix. Certaines bûches sont proposées à partir de 25 DH. Les consommateurs n’en demandent pas plus », déclare-t-il. Ainsi, de nombreux Marocains célèbrent la fête de chaque fin d’année mais chacun selon ses moyens.
A chacun son papa Noël
Father Christmas en Angleterre, Santa Claus aux États-Unis, Babbo Natale en Italie, Weihnachtsmann en Allemagne, l’imaginaire, qui nourrit les histoires et anecdotes autour de ce personnage fictif, est sans limites.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, la fête de Noël n’existait pas aux débuts du christianisme. C’est en 354 que le pape Liberus instaura la célébration du 25 décembre. Le père Noël, personnage emblématique de cette fête, aurait pour origine le nom de Saint-Nicolas. Après la réforme protestante qui a interdit la fête de St- Nicolas dans plusieurs pays d’Europe, les Hollandais ont gardé leur Sinter Klass. Lorsqu’ils ont immigré en Amérique, ils ont introduit des changements à cette fête. Sinter Klass, qui devint Santa Claus, a subi des transformations vestimentaires et culturelles.
En 1931, Coca-Cola, la célèbre firme américaine, eut l’idée de demander à un artiste de dessiner le vieux bonhomme en train de boire du Coca. Le personnage fut au centre d’une grande campagne de promotion. Le destinateur l’habilla aux couleurs de la marque : rouge et blanc. Ce nouveau look a rendu le père Noël l’un des personnages les plus connus au monde.
Le Matin - Mohamed Badrane