Conscient de l’importance de sa diaspora, le Maroc accentue ses efforts pour attirer les compétences marocaines résidant à l’étranger.
Le ministère chargé de la Communauté marocaine résidant à l’étranger vient d’annoncer un plan quinquennal pour l’accompagnement des MRE. Devancé par plusieurs institutions, Mohammed Ameur justifie et défend la démarche de son ministère. Entretien.
A quoi sert réellement votre ministère ? Vu de loin, à pas grand-chose...
Ce n’est pas vrai. Quand on regarde le rôle que jouent les Marocains résidant à l’étranger au niveau du développement de notre pays, on comprend que cette communauté mérite une attention particulière de la part du gouvernement. Ce ministère existe depuis une vingtaine d’années, il est un peu spécial et travaille d’une façon horizontale. Il a essentiellement une mission de coordination, de mise en cohérence des politiques.
Sa création auprès du Premier ministre, dans le gouvernement actuel, dénote d’un intérêt particulier, et s’inscrit dans les orientations générales du Royaume, qui se traduisent dans un nouvel élan quant à la nécessité d’une prise en charge réelle de ce dossier. Sa création intervient dans le même contexte que la mise en place du Conseil des Marocains résidant à l’étranger. Plus concrètement, ce ministère a pour mission l’élaboration de la politique publique dans le domaine de la gestion des affaires des Marocains de l’étranger, et de veiller, avec l’ensemble des acteurs, à sa mise en œuvre sur le terrain.
Pourtant, vous n’avez pas de levier de pouvoir sur ces acteurs...
Je vous concède que la présence de nombreuses institutions opèrant dans le domaine des MRE, peut engendrer une certaine confusion au niveau des rôles attribués à chacune d’elles. Pour autant, je suis persuadé qu’ils sont complémentaires. Ce ministère opère dans le politique, comme je viens de l’expliquer. Le Conseil, lui, est une force de proposition qui donne son avis sur les politiques publiques. Enfin, la Fondation Hassan II est un instrument, parmi d’autres, de la mise en oeuvre des politiques gouvernementales.
Vous venez d’annoncer un plan d’action quinquennal. Comment comptez-vous vous y prendre et avec quels moyens ?
L’organisation administrative que nous avons construite n’existe que depuis la nomination du gouvernement actuel. Nous avons franchi un grand pas en mettant en place une structure ministérielle. Nous avons un plan, une vision pour les cinq prochaines années, qui tient compte des attentes des Marocains du monde. Aujourd’hui, nous sommes en train d’engager un certain nombre d’actions sur le terrain, mais aussi de voir les conditions de réalisation d’autres points qui sont à l’étude. Nous avons obtenu un budget de 40 millions de dirhams, et, en face, un plan et des priorités ont été définis.
Quelles sont ces priorités ?
Je peux les résumer en six attentes principales. Les quatre premières concernent l’enseignement de la culture marocaine et l’encadrement religieux dans les pays d’accueil. Pour l’enseignement, le plan quinquennal prévoit de doubler les effectifs touchés d’ici 2012. Aujourd’hui, nous sommes à 65.000 élèves, notre souhait serait d’atteindre 130 ou 140.000. Cela demande de 45 à 50 enseignants par an, et le ministère de l’Education nationale est prêt à nous accompagner dans les nouveaux foyers d’émigration. Pour l’encadrement religieux, le ministère des Affaires islamiques gère un programme hautement stratégique qui diffuse un Islam tolérant, celui de tous les Marocains. Sur le plan culturel, notre objectif est de créer 5 centres culturels à l’horizon 2012. Nous somme en train de préparer les dossiers techniques et de réfléchir sur l’ensemble des acteurs avec lesquels nous allons travailler. Nous considérons aussi l’animation culturelle et l’action sociale comme étant prioritaires au niveau des pays d’accueil. L’action sociale parce que la communauté marocaine à l’étranger compte un certain nombre de groupes vulnérables. Ils méritent d’être assistés et accompagnés. Cette action exige la création de véritables services sociaux au sein des consulats.
Au Maroc, nous avons recueilli deux grandes attentes globales. La première est l’amélioration des services administratifs. Un travail en profondeur nous attend pour revoir les administrations qui sont en relation directe avec les MRE. La deuxième attente concerne l’investissement. Il s’agit d’accompagner et de faciliter les projets d’investissement des Marocains du monde. Nous menons une étude pour identifier les obstacles auxquels les investisseurs sont confrontés, pour préparer une feuille de route pour les années à venir.
Une diplomatie dans l’embarras
Les nouvelles politiques d’émigration européenne mettent le Maroc dans une situation délicate. Impuissant devant les décisions des gouvernements des « vingt-sept », le Maroc se contente de quelques communiqués qui « dénoncent » ou « expriment les refus », ou même d’un silence net si la question fâche.
Pour le plan d’incitation au retour lancé par le gouvernement espagnol, le ministre délégué chargé de la Communauté marocaine à l’étranger répond que « c’est un programme qui reste volontaire et qu’il n’y a rien d’inquiétant ». Sur les violences subies par les clandestins marocains dans la région de Murcia en Espagne, le gouvernement précise que « les autorités espagnoles ont présenté des excuses et qu’elles reconnaissent la bavure policière ». Pour la nouvelle loi sur la nationalité aux Pays-Bas, le ministère des Affaires étrangères a publié un communiqué qui dénonce le projet, et déclare « le refus catégorique du Maroc de toutes les actions qui visent la remise en cause de la nationalité marocaine ». Cela est-il suffisant ? « Le Maroc a répondu avec beaucoup de rigueur et de fermeté, je pense qu’on ne peut demander plus », répond Mohammed Ameur, ministre chargé de la Communauté marocaine à l’étranger.
Source : L’Economiste - Aziz El Yaakoubi
Ces articles devraient vous intéresser :