Mais depuis l’échec de la conférence de Cancun en septembre, les Etats-Unis multiplient les accords de libre-échange régionaux ou bilatéraux. Et font pression, comme avec le Maroc, pour « encadrer » au maximum la protection des brevets des médicaments et limiter le droit à avoir recours à des génériques. « Les Etats-Unis tentent aujourd’hui d’imposer au Maroc des dispositions visant à renforcer la protection de la propriété intellectuelle au-delà des standards exigés par l’OMC », résume Gaëlle Krikorian, d’Act Up.
Des clauses d’exclusivité (dites « Adpic plus ») permettraient ainsi aux brevets de voir leur durée de vie, de vingt ans à l’heure actuelle, prolongée de trois ans (les « nouvelles indications »), voire de cinq ans supplémentaires (via des droits « d’exclusivité des données »). Des barrages de plus contre l’arrivée de médicaments abordables contre les pandémies, notamment le sida. « Si ce projet voit le jour, il sera impossible pour les 20 000 malades du sida d’avoir recours à des génériques, alors que 560 personnes seulement bénéficient d’antirétroviraux, explique Othman Mellouk de l’association de lutte contre le sida au Maroc (ALCS). Le Maroc, qui avait résisté à l’OMC, est en train de céder. »
L’ALCS organisait hier soir un sit-in de protestation devant le parlement marocain. De plus en plus de réseaux d’associations et d’ONG s’inquiètent des pressions américaines sur les brevets via les projets d’accords commerciaux bilatéraux. « La Jordanie, Singapour et la plupart des pays d’Amérique latine sont sur le point de céder », s’inquiète Gaëlle Krikorian. « Si ces accords sont ratifiés, ce serait un précédent terrible pour les autres pays du sud », assure le Pan African Treatment Access Movement, qui milite pour que la protection des brevets ne prime pas sur la protection de la santé publique.
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