Maroc/Internet : Vente en ligne, un pas encore hésitant

23 mars 2007 - 00h00 - Economie - Ecrit par : L.A

Aujourd’hui que la loi sur la signature électronique est effective, que les internautes se comptent par millions, les marques de luxe se mettent-elles pour autant sur le Net au Maroc, afin de vendre leurs produits ?

Internet, outrancièrement populaire, s’invitant dans tous les foyers qu’ils soient modestes ou aisés, peut-il faire bon ménage avec le commerce du luxe, singulièrement élitiste ? Paradoxalement, c’est ce qui est en train de se dérouler sous nos yeux. La plupart des grandes marques sont présentes sur le Net. Toutefois, cette présence ne vise, pour le moment, que la notoriété. Il s’agit généralement d’avoir un vecteur d’images et d’informations. C’est du moins ce que prétendent les gérants de franchises installées au Maroc. Quant aux consommateurs, et autres spécialistes de l’Informatique, ils ont généralement affirmé que le télécommerce des produits de luxe n’existe pas encore au Maroc. Pour se payer son bijou, son solitaire, sa cravate,… le client continue de se déplacer, de négocier le prix, ...

De toute évidence, au Maroc, on est en décalage avec la tendance sur le Net. Au Japon, aux Etats Unis d’Amérique et depuis peu en Europe, les boutiques virtuelles de marque de luxe prolifèrent, et la vente est bien réelle. L’expérience du site eluxury.com de LVMH et Europ@web, qui compte une centaine de marques prestigieuses, le prouve amplement, a noté Mme Hind Zahidi, Responsable de Louis Vuitton Sofitel Marrakech.

Certes, il faut distinguer luxe et grand luxe et ne pas mettre dans un même chapeau Cartier, Louis Vuitton, Dolce & Gabanna, Guci, Dior, Diesel, Swatch, Lancel, Longchamp, Chanel, Hermès, Bulgari Baccart, … Chaque marque de luxe a sa propre côte et son degré de prestige. Mme Asma Elmernissi, Directrice Commerciale de Kallista- Casablanca, a été très claire, affirmant que leur présence sur la toile sert à la diffusion de la marque et des produits, sans plus, et pas pour la vente.

Même son de cloche auprès de Marionnaud, où il nous a été signifié que la boutique de Casablanca, n’a pas encore son propre site web, mais qu’elle travaille en partenariat avec le site de la maison-mère, notamment sur le lancement d’évènements, tels que la Saint Valentin, la Fête des Mères, la Fête des Pères, les fêtes de fin d’année, etc. Aussi, comme l’a si bien dit la Directrice Associée de Cartier-Casablanca, qui a requis l’anonymat, sur le Net ce qui se développe vraiment ce sont les objets de seconde main, notamment pour le grand luxe. Lorsqu’une grande marque ouvre un portail, c’est pour informer et encore ... a-t-elle soutenu.

La prochaine étape ?

Même si demain on se dirigera inéluctablement vers le Net, qui sera la prochaine étape- ce que réfutent certains de nos interlocuteurs- le processus de la vente d’un produit de luxe se déroule selon un tout autre scénario. Mme Asma Elmernissi trouve que l’achat d’un bijou ordinaire n’a rien d’un achat ordinaire. Il est empreint de négociations du prix, d’un contact relationnel où le couple conseil –confiance est de mise.

Malgré la cage de verre dans laquelle certains veulent se calfeutrer, même si les professionnels des NTIC sont les premiers a regretté que les nantis n’achètent rien sur le Net, demain on ne pourra pas se passer de ce créneau de vente. Les marques prestigieuses ne se retrouvent pas à tous les coins de rue (voir En Encadré). Tout le monde n’a pas la chance d’avoir un magasin de joaillerie prestigieuse à portée de son seuil !

Une fois que les problèmes de la copie, de la sécurité, et de la vulgarisation des NTIC seront dépassés, nul doute que les innombrables avantages de la toile Internet, notamment plus de disponibilité, des gains de temps importants, et des coûts moindres, décideront les plus réticents à franchir le pas. Pour l’heure, on en est encore loin !

Témoignages

M. A . M. Informaticien : La vente des produits de luxe sur Internet n’existe pas encore au Maroc ! Vous savez même ceux qui ont les moyens n’achètent rien sur le web ! Ce n’est pas demain la veille que ce commerce là, via ce créneau, va décoller.

Mme Khadija R. Gérante : Ce genre de commerce est interdit, … non ?
Mme Fatima, Employée : Nous profitons d’Internet pour les promotions et dévoilé nos produits. Il nous sert à présenter des offres sur des fêtes ponctuelles (Fêtes des Mères, des Pères, ).

La rareté fait le prix !

• Kallista est une Chaîne locale , qui représente plusieurs marques prestigieuses, notamment Piaget, Mauboussin, Palmigiani, Francesco Basile, …Elle travaille avec des joalliers qui façonnent la pierre précieuse. Actuellement, même si elle est présente au Koweit, elle n’a que 5 magasins à travers tout le Royaume : trois à Casablanca, un à Rabat et un autre à Marrakech.

• Cartier compte un magasin à Casablanca, c’est d’ailleurs le seul dans toute l’Afrique, nous a-t-on assuré.

Trois questions à Asma Elmernissi, Kallista Casablanca

La Nouvelle Tribune : Kallista est une très grande marque. Les produits de votre boutique de Casablanca sont-ils pour autant sur le Net ?

Nous avons un site web sur Kallista destiné à faire connaître notre marque et nos produits. Pour le moment nous ne faisons pas de vente sur le Net.

Qu’est ce qui vous empêche de conquérir la clientèle accro au télécommerce, vu que la loi sur la signature électronique est aujourd’hui effective ?

Nous sommes certes intéressés par la vente sur le Net, mais dans notre cas le processus est long !! Nous fabriquons tous les jours de nouvelles pièces de joaillerie et ne pouvons répertorier tous nos produits avec le détail de l’or et des pierres pour chaque article. Nous craignons aussi l’imitation de nos créations, un phénomène dont souffrent plusieurs joailliers et bijoutiers comme nous. De plus, il ne faut pas perdre de vue que l’achat d’un bijou, n’est pas un achat ordinaire. Le ou la cliente a besoin de choisir, d’essayer, d’avoir un contact relationnel direct avec le vendeur, basé sur le conseil et la confiance. Et enfin le phénomène, encore omniprésent, dans notre domaine, c’est la négociation du prix de vente ! C’est un plaisir culturel, signe de préférence et de distinction pour le client, plus que pour le volet pécunier.

Dans l’avenir, comptez-vous développer votre propre portail pour conquérir la web-clientèle et vous prémunir contre le cybersquattage ?

Les montres de marques sont les articles, qui sont les plus aisés à commercialiser sur Internet, malheureusement, les maisons mères se réservent ce droit sur l’ensemble du marché international.

En dépit des éléments précités, je pense que la vente sur le Net, c’est une prochaine étape incontournable pour tout le monde, car elle touche une cible plus importante, règle le problème de la disponibilité qui fait défaut chez les personnes actives, qui sont potentiellement intéressantes, et permet un gain de temps et d’argent au commerçant. On se dirige tout droit vers l’ERE DU NET, qu’on l’admette ou pas.
Pour notre part, nous y viendrons aussi en temps voulu et après avoir étudié tout le processus.

La Nouvelle Tribune - Daouda MBaye

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Informatique - Compétitivité - Internet

Ces articles devraient vous intéresser :

Au Maroc, des régions sans Internet

La faiblesse du réseau Internet et du débit dans les zones rurales et montagneuses et dans la province de Khénifra en particulier préoccupent la députée Saadia Amahzoune, du groupe du Rassemblement national des indépendants (RNI) à la Chambre des...

AliExpress facilite les paiements au Maroc avec l’adoption du dirham

La plate-forme de commerce en ligne AliExpress, filiale du groupe chinois Alibaba, offre désormais la possibilité aux acheteurs marocains de régler leurs achats en dirham marocain. Une initiative qui vise à faciliter les paiements et à davantage...

Interdire ou réguler TikTok ? Le Maroc cherche la solution

Menacé d’interdiction aux États-Unis et en Europe, TikTok est de plus en plus décrié dans le monde. Au Maroc, des voix continuent d’appeler à l’interdiction de l’application chinoise. Mais plutôt que de l’interdire, des experts appellent à encadrer son...

Le Maroc accélère son déploiement de la 5G

Le Maroc s’active pour disposer d’une connexion internet 5G avant 2030, année où il co-organisera la Coupe du monde 2030 avec l’Espagne et le Portugal.

Office des changes au Maroc : du nouveau pour l’e-commerce

Les jeunes entreprises innovantes en nouvelles technologies ont désormais une dotation commerce électronique plafonnée à un million de dirhams par année civile, selon la version 2024 de l’Instruction générale des opérations de change (IGOC).

Tourisme : le Maroc affiche ses ambitions

Lentement mais sûrement, le Maroc fait un grand pas vers la concrétisation de son ambition d’accueillir 26 millions de visiteurs d’ici 2030, avec un objectif intermédiaire de 17,5 millions de touristes et la création de 200 000 emplois d’ici 2026.

Déficit commercial du Maroc : les chiffres qui inquiètent

Le déficit commercial du Maroc s’est accentué de 6,5 % fin novembre 2024, atteignant 275,74 milliards de DH contre 261,36 milliards de DH à la même période de l’année précédente, selon les chiffres de l’Office des Changes. Les exportations marocaines...

Maroc : comment des consultants échappent à l’impôt

Au Maroc, des ingénieurs et autres consultants en informatique ont trouvé la formule pour échapper au fisc. Ils proposent de manière informelle leurs services aux grandes entreprises qui les paient via des intermédiaires.

Maroc : fin des frais « injustifiés » pour les factures en ligne

Le Conseil de la concurrence a lancé un avertissement : des frais de service ajoutés sur les paiements en ligne dans plusieurs secteurs économiques n’ont pas de justification. Ces coûts supplémentaires, selon le Conseil, freinent la digitalisation de...

Orange Maroc sous le feu des critiques

Des habitants de Sala Al Jadida se plaignent d’une panne d’Internet d’Orange qui dure depuis plusieurs jours.