Le Monde, dans son éditorial consacré à la condition de la femme et, dans une large mesure, à la question sexuelle au Maroc, y est allé sans réserve : il faut "finir avec avec l’hypocrisie sexuelle".
Si la condition des femmes est souvent un bon indicateur de la santé d’une société et de l’état d’un régime politique, Le monde constate que celle réservée aux Marocaines reflète à la fois la remarquable vitalité d’un pays où de plus en plus de femmes accèdent aux responsabilités, et un système hypocritement obsédé par la virginité, où la liberté des mœurs sert de prétexte à des règlements de comptes politiques.
Citant le cas très récent de Hajar Raïssouni, le quotidien rappelle que la journaliste a été interpellée le 31 août, en compagnie de son fiancé, à la sortie d’un cabinet de gynécologie où elle dit avoir été soignée pour une hémorragie interne.
Dans un contexte juridique où Hajar Raïssouni, détenue depuis lors, en attendant un jugement où elle risque jusqu’à deux années de prison, Le monde insiste sur un appel publié par ses soins, de même que par plusieurs médias marocains. Il cite 470 femmes et hommes, citoyens marocains, connus ou non.
Ceux-ci proclament, en effet, leur solidarité avec Hajar Raïssouni et avec les autres victimes des atteintes aux libertés sexuelles, constatées au royaume, réclamant l’abrogation des lois répressives, et affirmant s’être mis eux-mêmes "hors la loi", pour avoir eu des relations sexuelles hors mariage, subi ou pratiqué un avortement.
Le journal qui s’étonne du fait de la pénalisation des relations sexuelles hors mariage dans un pays où l’âge moyen de la première union est en hausse spectaculaire et atteint 29 ans en vient à dénoncer carrément, "la culture du mensonge et l’hypocrisie sociale", tout comme ces 470 marocains qui affirment que "la société marocaine est mûre pour que soit enfin entériné, le droit de chacun à disposer de son corps".
Par eilleurs, Le monde affirme que le régime du Roi Mohammed VI qui se prétend libéral en matière de mœurs, utilise cette répression pour déstabiliser ses opposants.
"Est-ce un hasard si Hajar Raïssouni, apparemment ciblée et filée par la police jusqu’à chez son médecin, est la nièce de deux intellectuels hostiles au pouvoir, l’un islamiste et l’autre issu de la gauche ?", s’interroge le journal.