« Attention, bulle immobilière » : le titre barrait la une du principal quotidien économique le 24 avril dernier. Mais cela se passe au Maroc. Et, au regard des prix pratiqués en France, le péril n’est pas encore dans la demeure. Certes, notre confrère « L’Economiste » décrit une réalité indéniable : le pays tourne à plein régime. Il n’a pas de pétrole, mais il a les idées de ceux qui ont des pétrodollars.
D’où une floraison de projets pharaoniques, à Rabat notamment. Avec le projet de la vallée du Bouregreg, pas moins de 10 milliards d’euros seront investis sur dix ans en vue de métamorphoser 6.000 hectares. La ville se verra dotée d’un port capable d’accueillir les paquebots. Elle aura son tramway. Sans parler d’une marina déjà en service. Des logements ultrachics sont aussi prévus. Des duplex de 250 m2 avec vue sur l’Atlantique sont commercialisés sur la base de 2.000 euros le mètre carré. Quelques projets de maisons de ville, à partir de 250 m2 au sol, proposent la même base tarifaire. Cette offre nouvelle mérite d’être comparée avec les prix qu’atteint désormais l’ancien.
A Marrakech, les ryads qui se vendaient 50.000 euros en 1995 se négocient désormais à 300.000 euros. A Fez, les maisons traditionnelles ne se vendent pas à moins de 70.000 voire 150.000 euros. Las, 95 % des biens ne sont pas immatriculés. « Or, prévient Me Amin Fayçal Benjelloun, président de la Chambre nationale des notaires du Maroc, nous ne pouvons valider la vente d’un bien que s’il est immatriculé. » Les Français, de plus en plus nombreux, qui succombent à une envie peuvent toujours signer un avant-contrat avec condition suspensive. Ils peuvent également procéder à un achat en deux temps. D’abord verser la moitié, puis le solde quand le délai d’opposition de six à huit mois est écoulé. Mais si, entre-temps, le vendeur ou le pseudo-propriétaire part avec l’argent sans laisser d’adresse, l’acquéreur en est pour ses frais. A chacun de voir s’il est prêt à courir le risque.
En attendant, l’engouement ne se dément pas. Notamment du côté des retraités. Leur pension, maigre en Europe, devient là-bas un pactole. Fiscalement, ils ont bien compris leur avantage. Dès lors qu’ils y passent plus de 185 jours par an, ils deviennent résidents fiscaux marocains et profitent alors en plus d’un abattement de 40 % sur la pension versée, d’une réduction de 80 % du montant de l’impôt dû au titre de leur retraite, en contrepartie d’un transfert d’une partie de leur pension en dirhams non convertibles. La preuve, le succès grandissant du SMAP, le Salon de l’immobilier marocain qui se tient ce week end (1). L’an dernier, il avait attiré 35.000 visiteurs.
Les Echos - F. L. B.