"Les gens ne boivent pas pendant les quarante jours qui précèdent le ramadan. C’est comme ça chaque année. Je fermerai le bar samedi, lorsque j’aurai écoulé le stock", confie à TelQuel El Haj, comme l’appellent ses clients. Son bar, la Cigale, ne grouille pas de monde en raison du mois de ramadan qui s’annonce. Ce n’est pas le seul commerce touché par la crise de la "quarantaine". Restaurants, hôtels, brasseurs ou simples guerraba rencontrent les mêmes difficultés. “Le chiffre d’affaires chute de 35 %, voire 40 %, dès le début de la quarantaine”, affirme un manager de Brasseries du Maroc.
Qu’est-ce qui pourrait justifier cette habitude des Marocains à cesser de consommer de l’alcool quarante jours avant le ramadan ? "C’est dans la religion. Accueillir le mois de ramadan en buvant, c’est haram”, explique Yassine, la trentaine, cadre dans une société de télécommunications. “Il n’y a ni 40 ni 15 jours. Le haram ou le halal ne se définissent pas en nombre de jours. C’est culturel, comme beaucoup de choses. On essaie de coller des croyances culturelles à la religion", déclare Ahmed El Khamlichi, directeur de Dar Al Hadith Al Hassaniya.
"Cela n’a aucun rapport avec l’islam, pour la simple raison qu’il n’existe aucun texte dans le Coran ou les hadiths authentifiés", renchérit Mohamed Rafiki, plus connu sous le nom d’Abou Hafs. Selon l’ancien cheikh salafiste, "cette invention culturelle" s’expliquerait par un texte religieux où il n’est nulle part question du jeûne. "Dans les années 1960 et 1970, les gens pouvaient arrêter de boire à l’approche du ramadan en se consacrant à la prière. Mais la notion des quarante jours n’existait pas", affirme El Khamlichi.