Le Parti de la justice et du développement (PJD) a demandé le retrait des manuels scolaires dont les couvertures sont aux couleurs du drapeau LGBT.
Trois romans de Mohammed Khaïr-Eddine viennent d’être réédités chez Tarik Editions. Il s’agit d’« Agadir », « Une odeur de Mantèque » et de « Légende et vie d’Agoun’chich ». Les autres sont à paraître prochainement. Cette initiative mérite d’être soulignée quand on sait que cet auteur marocain, disparu en 1995, a toujours été publié aux éditions du Seuil et que son œuvre est longtemps demeurée inaccessible au grand public marocain à cause du prix mais aussi de la censure.
Car Khaïr-Eddine, comme on l’a souvent répété, est « l’enfant terrible de la littérature marocaine francophone ». Sa vie comme son écriture illustrent bien ce qualificatif. Né à Tafraout en 1941, il passe son enfance dans le Sud marocain avant de se rendre à Casablanca pour étudier. En 1961, Agadir est anéantie par un séisme. Le lycéen abandonne ses études pour s’y rendre et se consacrer à l’écriture. L’événement marquera sa vie et ses écrits, tout comme la répudiation de sa mère. Cet affront est à l’origine d’une haine incommensurable à l’égard de son père et à travers lui, contre toute forme d’autorité.
Collaborateur à la revue « Souffles » d’Abdellatif Laâbi, Khaïr-Eddine s’exile en France en 1966. Il y restera plus de seize ans avant de retourner au Maroc en 1979. Il quittera sa terre natale une nouvelle fois en 1989. Il est mort d’un cancer à Rabat, en novembre 1995.
La majorité des écrits de Khaïr-Eddine ont été produits dans l’exil, durant cette longue période où il vécut en France. C’est le cas de « Une odeur de Mantèque ». Paru en 1967. Ce roman majeur de Khaïr-Eddine évoque, à travers le personnage d’un vieillard, les hantises d’un homme condamné à l’errance.
Paroles d’exil
Le passé du vieil homme surgit des profondeurs, plein d’odeurs nauséabondes. Et l’on découvre la personnalité d’un homme vicié par ses bas instincts, affranchi de toute civilisation et dont la seule préoccupation est de survivre. Pas une once d’humanité ne semble surgir de cette bête humaine. Le cynisme à l’état pur. Comme si la misère et la bêtise ont été les bourreaux d’un être qui n’a pas eu le temps de devenir humain. Khaïr-Eddine use de la dérision pour remettre en question toutes les composantes de la société à l’instar des fqihs et même du Pouvoir. Subversifs, les écrits de Khaïr Eddine le sont sans conteste... De cette haine contre toute forme d’autorité découle le caractère virulent et vindicatif des écrits de Khaïr-Eddine. On devine la sensibilité à fleur de peau d’un auteur qui n’a fait qu’errer sa vie durant, partagé entre un pays qui n’était pas le sien et le sien dans lequel il ne se reconnaissait pas.
Magalie Durdux - Le Journal Hebdo
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