« C’est un moment qui fait partie de l’histoire »
« Dès que je reviens sur cette piste, je revis ces moments, son atmosphère et le public qui hurlait nos deux noms, autant l’un que l’autre », se souvient Baala le Strasbourgeois. « S’il était parti 200m plus tard, je l’aurais tapé. Mais là, à 1.000m de l’arrivée, c’était trop costaud… ». A ses côtés, El-Gerrouj sourit. « C’est un moment qui fait partie de l’histoire du sport, sûrement la meilleure époque de ma carrière, mais ce qui me reste le plus en mémoire, c’est la fraternité de tous les concurrents », raconte le Marocain aux quatre titres mondiaux et double médaillé d’or olympique.
Zurich 2004
Complices, les deux hommes ne veulent pas trop livrer de leur amitié aux quelques journalistes présents. Mais quand ils évoquent le meeting de Zurich de 2004, leurs regards en coin s’illuminent. « Globalement, Hicham m’a beaucoup plus fait souffrir que moi je ne l’ai fait souffrir, mais cette course reste le pire souvenir de ma carrière. C’était ultra-rapide et j’ai vécu un calvaire dès la mi-course », rigole Baala. « Pour être franc, j’avais demandé au lièvre de courir le plus vite possible. J’avais la rage et je voulais lâcher le maximum de monde. Résultat : j’ai payé à la fin et j’ai terminé deuxième », explique El-Guerrouj.
« Il faut qu’il prenne l’initiative »
Quand il s’agit d’assumer l’héritage et de passer le relais, le maître n’hésite pas à faire la leçon à l’élève. « Mehdi est arrivé à maturité, il est plein d’énergie et doit désormais pouvoir analyser son potentiel en course. Mais quand je le vois au milieu du peloton, ça m’embête. Il faut qu’il prenne l’initiative. Il n’est pas au max de ses performances ». Baala se justifie : « Je le sais. Mais je ne suis pas Hicham, je ne peux pas enchaîner les courses et je me concentre pour me construire un palmarès. Les meetings et les chronos viendront peut-être ensuite. C’est assez frustrant, mais c’est le sport ».
« J’ai eu du mal à gérer l’après-Hicham »
Et le Français d’évoquer la perte de repères qu’a entraînée la retraite de son meilleur ennemi : « C’est vrai que j’ai eu du mal à gérer l’après-Hicham, car je calquais mon entraînement sur sa façon de courir. Désormais, je travaille différemment. Je bosse moins sur ma capacité d’accélération sur la longueur et plus sur le changement de rythme ». El-Guerrouj acquiesce. « A mon époque, quand Morcelli est parti, on était plusieurs, d’un niveau égal et très élevé, à se battre pour prendre son fauteuil, c’était différent ».
Stéphane Alliès
20Minutes