Hamid Nuino, 58 ans, est le chef pâtissier de ’La Africana’, la célèbre pâtisserie de Ceuta qu’il a intégrée depuis 1990. Bloqué dans la ville autonome depuis un an et demi en raison de la fermeture des frontières, il n’a pas pu assister au mariage de sa fille cadette au Maroc. Comme lui, 500 travailleurs frontaliers sont bloqués à Ceuta depuis mars 2020. Ils vivent dans des conditions déplorables, sans protection et assistance, bénéficiant des dons de leurs connaissances ou des personnes de bonne volonté pour survivre.
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« Nous avons moins de droits que les chiens et tout ce que nous demandons, c’est au moins de pouvoir rendre visite à nos familles et revenir sans perdre les emplois dont nous nous sommes occupés pendant plus de la moitié de notre vie », déplore Nuino avec rage. Les travailleurs frontaliers disposent d’une autorisation pour venir travailler à Ceuta et retourner chez eux au Maroc en fin de journée. Ils n’ont pas le droit de séjourner dans la ville autonome. Mais depuis la fermeture des frontières, ils se retrouvent dans une situation irrégulière, ne pouvant retourner au Maroc et n’ayant nulle part où dormir.
Hassan Arahou, un horloger marocain de 48 ans, originaire de Tétouan, est le porte-parole de la cinquantaine de travailleurs frontaliers qui manifestent chaque semaine devant la délégation gouvernementale. Il travaille depuis 15 ans dans la bijouterie locale la plus luxueuse de Ceuta, en tant que technicien accrédité par Rolex. « Chaque jour dans la rue, un policier pourrait me demander mes papiers et me mettre à la frontière, car je n’ai pas le droit d’être à Ceuta », déplore Arahou.
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« Nous ne demandons pas que la frontière soit simplement ouverte, car c’est une politique de l’État et nous respectons les restrictions sanitaires. Mais nous ne comprenons pas non plus que des solutions extraordinaires sont trouvées pour les personnes qui sont entrées en masse à Ceuta en mai et que nous ne pouvons pas avoir une autorisation pour partir en vacances au Maroc et revenir, ou encore avoir un titre de séjour même provisoire », dénonce l’horloger. Et d’ajouter : « Nous devons continuer à travailler pour obtenir des revenus et subvenir aux besoins de nos familles ».
De son côté, le gouvernement propose aux travailleurs frontaliers de retourner au Maroc sans possibilité de retour, ce qui les obligerait à renoncer à leur emploi, ou de subir la situation actuelle, jusqu’à un retour à la normale. La déléguée du gouvernement à Ceuta, Salvadora Mateos, avait assuré que dès que les frontières seront rouvertes, les travailleurs frontaliers seront les premiers qui seront autorisés à les traverser.