La justice marocaine lui reproche d’être un narcotrafiquant. Le tribunal correctionnel de Tanger l’a condamné, le 28 décembre 2006, à dix ans de prison. En appel, le 18 avril 2007, sa peine a été ramenée à huit ans.
Sa vie s’est arrêtée, comme il le dit, le 16 septembre 2006. Christophe Curutchet est alors directeur de la société de transport international, STE Méditerranée, basée à "Casa". Ce jour-là, son entreprise affrète un camion de 36 tonnes pour Chantelle, marque de lingerie féminine, qui fabrique des produits au royaume. Quarante-deux palettes sont chargées auprès de deux sous-traitants. La marchandise doit être acheminée en France.
Au port de Tanger, le camion est passé au scanner. Les douanes découvrent deux palettes non déclarées. A l’intérieur, 1,4 tonne de haschisch. M. Curutchet se rend dès le lendemain à la police de Tanger pour une déposition. Après une nuit au poste, un juge d’instruction le met en examen pour "détention, trafic, transport et complicité de tentative d’exportation de marchandises prohibées". Il nie les faits mais est écroué à la prison de Tanger.
"En sa qualité de directeur"
Pour le tribunal, Christophe Curutchet, en tant que directeur, était forcément au courant d’un tel chargement de haschisch. De plus, la présence au Maroc de son PDG, Michel Mezerette, la veille de cette saisie, tend à prouver, pour la justice marocaine, que "les intéressés ont procédé à la préparation et à la planification d’exportation des stupéfiants", lit-on dans l’ordonnance de renvoi. Elle souligne aussi que le PDG avait annoncé son intention de vendre la société, qui est "en bonne santé, ce qui suscite de notre part doute et suspicion". Le 16 février 2005, 70 kg de résine cannabis avaient déjà été saisis dans un des camions de STE Méditerranée, mais M. Curutchet avait été mis hors de cause. "Tout cela constitue des présomptions que l’intéressé ne pouvait ignorer l’existence des stupéfiants", peut-on lire dans le jugement de 2006. "Il est en prison en sa seule qualité de directeur. C’est fou !" estime son avocate, Patricia Simo. "Cette affaire fait honte au Maroc, s’emporte son conseil, Mohammed Ziane, bâtonnier de Rabat et ancien ministre des droits de l’homme. Où est donc la présomption d’innocence ? Rien dans ce dossier ne prouve sa culpabilité."
La grève de la faim est, dit-il, son unique moyen pour sensibiliser les autorités marocaines et françaises. "Mon pays m’a abandonné", soupire-t-il. Il s’est pourvu en cassation le 19 avril. La Cour suprême doit prochainement rendre son verdict. Le Français espère un nouveau procès.
Le Monde - Mustapha Kessous