Le mariage des mineures prend des proportions alarmantes au Maroc. En 2021, 19 000 cas ont été enregistrés, contre 12 000 l’année précédente.
El Mostafa Berrfaï, MRE d’Espagne, a subi l’iniquité des autorités judiciaires françaises et espagnoles. Suite à une confusion de noms, il a été emprisonné un an et demi pour un crime qu’il n’a pas commis. Il a perdu son travail, sa fiancée et sa maison. Son avocat dépose plainte pour obtenir des dédommagements.
Comment expliquez-vous ce que l’on qualifie désormais d’affaire El Mostafa Berrfaï ?
L’affaire El Mostafa Berrfaï date du 4 octobre 1991. Dans la région de Perpignan, au département des Pyrénées orientales, en France, un certain Mustapha Berrafai commettait un meurtre sur la personne de Toufik Boudour, à cause d’une rivalité amoureuse, et ce en présence de deux témoins, dont Mohamed, le propre frère du meurtrier. Il prend la fuite et n’est plus jamais retrouvé. Le 26 octobre 1998, la Cour d’Assises des Pyrénées orientales le jugeait, par contumace, et le condamnait à la peine de 30 années de réclusion criminelle. Un mandat d’arrêt international était lancé par les autorités françaises pour mettre à exécution l’arrêt du 26 octobre 1998 concernant le condamné, né en 1965 à Oujda, au Maroc, de Abdelali et de Mimouna Berrafai, de nationalité algérienne.
Il y a donc non seulement une légère différence dans les noms, mais également dans la nationalité. Comment le Marocain Berrfaï fut-il arrêté ?
Le 17 novembre 2002, le ressortissant marocain El Mostafa Berrfai se présentait pour renouveler son visa auprès des autorités espagnoles, à Alicante, près de Barcelone. Il était immédiatement arrêté sur la base du mandat d’arrêt des autorités françaises. Pourtant, M. Berrfai était porteur de toutes pièces d’identité attestant qu’il est né dans la Tribu Ahl Oued Za, en 1965, qu’il est de nationalité marocaine, que ses parents se prénomment Abdellah et Fatna, qu’il n’a aucun frère se prénommant Mohamed.
Quelle fut la réaction des autorités judiciaires ?
Les autorités espagnoles ne prennent pas ses explications au sérieux, et il est incarcéré dans l’attente d’une extradition vers la France pour y être jugé. Cette extradition intervient le 15 décembre 2003 et Berrfai El Mostafa est remis à la Police et à la Justice française à Bayonne, qui n’entendent pas davantage les explications qu’il essaie de leur donner pour prouver son innocence. Il est transféré à Perpignan le 17 décembre 2003, où il est incarcéré. Ni son Avocat, ni le directeur de la maison d’arrêt, ni les autorités judiciaires de Perpignan ne prêtent attention à son cas, ni à ses constantes réclamations de se faire écouter et comprendre.
Comment a-t-il réussi à vous contacter ?
A vrai dire, ce sont ses camarades de détention qui lui proposent d’écrire une lettre, venant de sa part à mon attention, puisqu’il ne sait pas écrire le français. Ils font, ainsi, toutes les démarches nécessaires pour me contacter et me pousser à intervenir dans la défense de Monsieur Berrfaï.
Durant votre parcours d’avocat professionnel, avez-vous déjà eu affaire à ce genre de confusion de la part de la justice ?
A ce stade d’accumulation et de persistance des dysfonctionnements, tant des services judiciaires que des services policiers, ma réponse est non.
Je n’ai jamais eu affaire à une erreur aussi énorme et en même temps aussi futile, qui a, pourtant, bouleversé le cours de vie normal d’un citoyen innocent. Tout cela aurait pu être évité par un minimum d’attention et de professionnalisme.
Qui doit assumer cette erreur ?
Les autorités policières et judiciaires espagnoles et françaises, ont, toutes les deux, commis une erreur énorme qui a eu des conséquences négatives sur la personne de M. Berrfaï, et ils se doivent bien d’assumer le résultat de cette erreur, et dédommager au mieux M. Berrfaï.
Comment avez-vous procédé pour tirer cette affaire au clair ?
Dès que M. Berrafaï a sollicité mon intervention, j’ai obtenu de la Cour d’Appel de Montpellier, première juridiction consciente de l’erreur, sa mise en liberté immédiate le 18 mai 2004. L’ironie, c’est que pour innocenter El Mostafa Berrfaï, il ne m’a fallu que 15 minutes d’audience.
Pensez-vous entamer des procédures contre les États français et espagnol ?
Deux procédures vont effectivement être engagées en France : la première contre l’Etat français devant le Tribunal administratif, la seconde contre tous les fonctionnaires que j’aurais identifiés, devant la juridiction civile. Je me rapproche également d’un confrère espagnol pour que les mêmes procédures soient engagées en Espagne. Et je peux vous assurer que j’ai toutes les chances de gagner ces procédures au profit d’El Mostafa Berrfaï.
Comment se porte El Mostafa Berrfaï, aujourd’hui ?
Le préjudice est terrible. Au-delà des 18 mois de privation de liberté, sa fiancée a rompu, il a perdu son travail, et son logement d’Alicante a été vendu parce qu’il ne payait plus le crédit. Sa vie fut bouleversé du jour au lendemain.
Il est normal qu’il soit perturbé face à cette nouvelle situation. Heureusement que ses parents l’ont toujours soutenu pendant ces 18 mois.
Entretien réalisé par Maroc Hebdo Internationa avec - Me J-R Nguyen Phung - Avocat de El Mostafa Berrfaï
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