Lors du match opposant l’Algérie au Liberia pour les éliminatoires de la Coupe d’Afrique des Nations 2025, le commentateur sportif algérien Hafid Derradji a ravivé les tensions concernant l’origine du zellige et suscité la colère des Marocains.
Les fameux conteurs de la célèbre place Jemaâ El Fna de Marrakech, espace culturel classé en 2001 par l’Unesco parmi les chefs-d’oeuvres du patrimoine oral et immatériel de l’humanité, sont en voie de disparition. "Le destin des conteurs, c’est l’extinction", déclare sans ambages Abdelhay Nafiî, responsable de "l’Association des professionnels de la halqa pour le spectacle et le patrimoine". La halqa désigne le cercle des spectateurs autour du conteur.
"Les maîtres conteurs sont morts, et ce qu’on raconte aujourd’hui, c’est les légendes de la fin des temps", dit ironiquement un nostalgique vendeur de brochettes, d’une soixantaine d’années.
Le fumet des grillades attire en début de soirée les touristes marocains et étrangers transformant cet espace multicolore créé au XVIe siècle en un gigantesque restaurant à ciel ouvert.
Les cartomanciennes, les charmeurs de serpents, groupes de musique afro-musulmane "Gnaoua", les prestidigitateurs, guérisseurs, dresseurs de singes et marchands de toutes sortes de boissons, potions et parfums s’y pressent.
Mais point de conteurs. "Nous en voyons un quelquefois, un seul, qui tient sa halqa devant Café France mais aujourd’hui il n’est pas venu", indique au journaliste de l’AFP un marchand de jus d’oranges, scrutant la place du haut de son siège.
"En 1970, il y avait 18 conteurs, aujourd’hui, il n’en reste plus que sept", se lamente Mohamed Bariz (49 ans), l’un des derniers survivants. Barbe grisonnante, grosses lunettes optiques, ce formidable narrateur des Mille et une nuits et des grandes épopées arabes avoue ne se rendre que très rarement à Jemaâ El Fna, où il s’installe en général pour "expérimenter des adaptations orales de textes littéraires contemporains".
"La télévision, notamment les dessins animés, remplacent les contes que les parents racontaient lors des veillées à leurs enfants, et qui les faisaient rêver", dit-il. "Les jeunes ne veulent pas prendre la relève : ce métier est ardu à apprendre et rapporte peu. C’est beaucoup plus dur que le chant ou la percussion car il faut capter l’attention des auditeurs avec les mots", explique-t-il.
Une polémique a opposé certains conteurs à la mairie de Marrakech, par voie de presse, sur de supposées "primes" de l’Unesco destinées à être versées aux conteurs. "Nous gagnions bien notre vie avant que l’Unesco s’intéresse à cette place, car après chaque épisode d’un conte, le public se montrait généreux. Maintenant, ils nous rétorquent : <
Or, aucune rémunération n’a été attribuée, assure à l’AFP Philippe Queau, directeur du bureau de l’Unesco à Rabat. "Nous n’avons accordé aux conteurs aucune subvention d’ordre pécuniaire. Ce que nous avions financé, ce sont des opérations pédagogiques dans les écoles de la région de Marrakech, auxquelles certains conteurs ont participé à titre individuel", précise-t-il.
"L’Unesco est très intéressée par la préservation du patrimoine immatériel de la place Jemaâ El Fna", affirme M. Queau. "Mais les mesures de protection, c’est à l’Etat marocain de les prendre, et à sa demande, nous pourrions intervenir à un niveau technique", poursuit-il.
Pour le conteur Mohamed Bariz, si l’on veut sauver cet art séculaire, il faut créer une école pour former de jeunes conteurs et leur octroyer un "salaire mensuel symbolique" et une couverture médicale.
Source : AFP - Abdelfettah Fakihani
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