Le Maroc a connu une croissance économique assez soutenue depuis 2000, après l’accession au trône du roi Mohammed VI. Le royaume prend des mesures pour attirer les investissements étrangers et devenir une grande puissance régionale.
À Rabat, Jacques Chirac devrait prononcer un discours historique dans lequel il donnera sa vision du monde.
Un coup dur pour la diplomatie algérienne.
Le 12 octobre au soir, tout le monde aura oublié la visite de Jacques Chirac en Algérie”. Ce diplomate marocain en poste à Paris, qui a requis l’anonymat, se frotte déjà les mains. Le royaume chérifien recevra Jacques Chirac du 10 au 12 octobre prochain pour une visite d’État de trois jours. Et les instructions du roi sont claires : il faut faire sortir des esprits le triomphe algérien de Jacques Chirac.
En mars dernier, le président français avait effectué une visite historique en Algérie où il a été chaleureusement accueilli par la population. Et le Maroc, principal partenaire politique de la France en Afrique du Nord, n’avait pas apprécié.
Entre Paris et Rabat, les relations sont en effet excellentes : un sommet annuel présidé par les chefs de gouvernement des deux pays, à l’image du sommet franco-allemand, a été instauré ; l’État français garantit des emprunts obligataires du Maroc sur les marchés internationaux ; des experts français assistent le gouvernement marocain et les administrations du royaume dans le processus de réformes engagées pour intégrer l’Europe...
Mieux, lors du vote de la dernière résolution du Conseil de sécurité sur le Sahara, Paris avait fermement soutenu Rabat face à Washington et Alger. “Le Maroc est le seul pays avec lequel la France entretient des relations aussi privilégiées. Elles sont du même type que celles que les Français ont avec leurs partenaires européens”, explique un politologue parisien.
Du coup, le 10 octobre prochain, les Marocains veulent faire nettement mieux que leurs voisins d’Algérie. Et pas seulement dans les symboles. Certes, le président français aura droit, durant son séjour marocain, à un accueil triomphal : bains de foule dans plusieurs grandes villes du royaume, des galas et des fêtes populaires seront organisés en l’honneur de l’invité...
“Les Marocains sont connus pour leur hospitalité, souligne le diplomate. Nous savons recevoir les hommes politiques et nous allons nous surpasser pour la visite de Chirac parce que c’est un grand ami de notre pays”. Mais, contrairement au pouvoir algérien en mars dernier, les Marocains ne veulent pas “s’arrêter” aux symboles.
Rabat, qui affiche de plus en plus ses ambitions internationales, veut profiter de cette occasion pour tenter de se positionner définitivement comme la nouvelle capitale incontournable du monde arabe et devenir l’interlocuteur privilégié des Européens opposés à la guerre en Irak. “Pour les Marocains, explique le politologue, après la guerre d’Irak et les fractures qui sont apparues entre Européens et Américains, il y a désormais une place d’interlocuteur de l’Occident à prendre, aux côtés de l’Égypte. Il y aura d’un côté le Caire, proche de Washington et de l’autre, Rabat, proche de Paris, donc du camp de la paix. C’est du moins le calcul que font les Marocains actuellement”. Une stratégie qui, en cas de réussite, devrait contrarier sérieusement les ambitions internationales de l’Algérie.
Surtout que la France semble avoir choisi le Maroc pour lui confier ce rôle. En effet, selon nos informations, le président français prononcera à l’occasion de sa visite “le discours de Tanger”, qualifié déjà d’historique à Paris comme à Rabat. Jacques Chirac y donnera notamment sa vision d’un monde multipolaire et développera son point de vue sur les relations futures entre l’Europe et le monde arabe. Une sorte de “discours fondateur” sur les relations futures entre les Européens et les Arabes.
Lounes Guemache - Liberté, Algérie
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