Portrait d’un MDM : Monsieur Qualité à Renault Asie Pacifique

30 juillet 2007 - 01h51 - Maroc - Ecrit par : L.A

Son aventure au sein du groupe Renault a démarré juste après l’obtention de son doctorat, lequel a été parrainé par le constructeur automobile. C’était en 1990. Depuis, Abdelhak El Khair El Idrissi a fait du chemin. Il est actuellement « monsieur Qualité & Service » de Renault Asie Pacifique, basé à Singapour.

De son expérience au Japon, il a retenu le sens du travail en équipe et du conformisme. Abdelhak El Khair El Idrissi voue une admiration sans limite à ce pays. Petite lunette, visage rond, son regard et sa voix s’enflamment lorsqu’il en parle.

Directeur Qualité & Service de Renault Asie Pacifique depuis un an et demi, il reconnaît que la mentalité japonaise est « diamétralement » opposée à la française. Si dans le premier le travail en équipe a un sens, dans le second l’individualisme reste la règle. Son expérience dans les deux pays fait de lui un fin connaisseur des deux systèmes, ou presque.

En France, il a fait ses études supérieures et de petits boulots pour boucler les fins de mois. La bourse octroyée par le ministère de l’enseignement ne dépassait pas 600 francs, « un petit chouia que l’on ne gardait pas longtemps dans les poches ». Les stages payés furent d’un grand secours. Ils lui ont permis de se passer de l’aide familiale.

Ses débuts à Renault datent de cette période, ou plus exactement de la préparation de son doctorat, lequel a été parrainé par le groupe automobile, qui le recrute juste après. El Khair El Idrissi a démarré à Renault Agriculture en tant que responsable de la section études avancées. Il compte à son actif la conception d’un système d’aide à la conduite de tracteur agricole, un brevet déposé au nom de Renault. Avec une équipe de trois ingénieurs, il a développé un système d’aide au diagnostic de pannes, toujours utilisé par Renault Agriculture.

Par la suite, il a rejoint la maison-mère et s’est retrouvé au département Recherche, où les travaux portaient sur du très long terme. Un département qu’il a quitté au bout de quelques années pour l’ingénierie, où les projets lancés courent sur 4 à 5 ans.

Son intégration s’est effectuée doucement : il fallait faire ses preuves ; le système français est ainsi fait, commente-t-il. Ses « amours » avec le Japon ont démarré à la suite du rapprochement entre Renault et Nissan, une alliance qui s’est soldée par des projets en commun. Il a travaillé sur la Clio, la Modus et la Micra. « C’était le premier projet de co-développement entre Renault et Nissan. Ces voitures ont en commun tout ce que le client ne voit pas », révèle El Khair El Idrissi. Des allers-retours entre Paris et Tokyo s’avéraient donc nécessaires. « Ça m’a permis d’avoir une connaissance en pointillé du Japon. A chaque voyage, j’étais fasciné par ce pays », avoue-t-il. Cette passion pour le Japon s’est par la suite soldée par une envie de prolonger l’expérience. Il a donc profité du rapprochement entre Renault et Nissan et choisi de travailler au pays du soleil levant. C’était en 2002. Pendant quatre ans, il était « monsieur Qualité et Service » de Renault au Japon. Une expérience qui lui a permis d’établir le parallèle entre les systèmes nippon et latin. Il explique les différences entre les deux en prenant l’exemple des réunions de travail. En France, c’est parfois le « chaos » : tout le monde cherche à prendre la parole et les réunions peuvent durer des heures, commente-t-il. Au Japon, c’est tout le contraire. Les discussions se déroulent bien avant la tenue de la réunion. Celle-ci demeure une formalité pour entériner le consensus.

Du Japon, il est capable de vous parler des heures : le respect de la hiérarchie, l’implication des travailleurs... et aussi les exigences des clients. Les clients japonais sont très exigeants, ils ont le sens du détail, insiste El Khair El Idrissi. En 2006, c’est un nouveau challenge qui l’attend : Singapour. Cette fois-ci, il est nommé « monsieur Qualité & Services » de la région Asean, laquelle couvre Singapour, la Malaisie, Brunei, l’Indonesie, Taïwan, Hong Kong, le Japon, la Nouvelle-Zelande et le Sri-Lanka.

Sa petite idée sur les salariés chinois

Si vous lui demandez une comparaison entre Singapour et le Japon, il vous dira que les deux pays sont très différents. D’abord par la taille. Ensuite, Singapour est une société multiraciale (Chinois 70%, Malais 20% et Indiens 10%), et chaque communauté parle sa propre langue et maintient ses traditions, alors que le Japon est une société homogène. « C’est une société très occidentalisée, efficace... un peu trop pour certains, alors que le Japon a réussi à adopter les systèmes de travail et de management de l’Occident tout en gardant sa culture. Il n’y a pas un quartier de Tokyo sans un temple shintoïste ou bouddhiste ».

El Khair El Idrissi a déjà sa petite idée sur les travailleurs chinois : « En tant que salariés, ils sont peu loyaux à l’égard de l’entreprise et n’hésitent pas à changer. Il explique aussi que « le Code du travail, aussi libéral que celui des Etats-Unis, leur offre peu de sécurité ». « Ils sont les plus latins du continent », commente Abdelhak El Khair El Idrissi. C’est à interpréter comme étant différents des Japonais qui intègrent l’entreprise pour la vie, les intérêts du groupe passant avant les leurs.

Avec un job aussi prenant, l’on imagine comment ce polyglotte (il parle arabe, français, anglais et japonais) arrive à dégager du temps pour ses loisirs. Il pratique aussi le théâtre mais en amateur. Père de deux enfants , il est fondateur et vice-président de l’association Moroccan Scientific Society et de la Moroccan-Japanese Association. Il n’écarte pas l’éventualité d’un retour au Maroc : « Un jour, il faudra boucler la boucle et rentrer au pays transposer l’apprentissage ».

Repères

• 1988 : Diplôme d’ingénieur Sup’ Meca’ (ex-Cesti)
• 1990 : Doctorat en automatique (Ecole centrale, Paris)
• 1998 : Master of Business Administration (Schiller International University)
• 1990-1994 : Renault Agriculture - responsable de la section Etudes avancées
• 1994-1999 : Renault - direction de la Recherche / groupe de recherche en qualité et sûreté de fonctionnement - responsable du thème « qualité produit process »
• 2000-2002 : Renault - direction de l’Ingénierie véhicule
juin 2002-mars 2006 : Renault Japon - directeur Qualité & Service
Depuis avril 2006 : Renault Asie Pacifique - directeur Qualité & Service - basé à Singapour.

L’Economiste - Khadija Masmoudi

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