"Louange à Dieu,
Que la prière et la paix soient sur le Prophète, Sa Famille et Ses Compagnons.
Mesdames et messieurs,
Nous nous réjouissons d’adresser ce message à l’Académie du Royaume du Maroc, réunie pour sa présente session élargie, à laquelle participe l’union parlementaire arabe pour l’examen de la question d’ ’’Al Qods’’, en souhaitant tout d’abord la bienvenue aux participants à cette importante rencontre académique portant sur un sujet qui nous préoccupe, non seulement en Notre qualité de président du comité Al Qods, mais aussi en Notre qualité de l’un des dirigeants des Etats islamiques qui s’intéressent au sort de cette ville sainte, au même titre que nos peuples, aspirant à ce que justice soit faite au peuple palestinien pour l’établissement de son Etat indépendant sur sa terre libérée avec Al Qods Acharif pour capitale.
Messieurs,
Vous savez que la tenue de cette importante manifestation avec la participation d’une élite de professeurs et de penseurs renommés et des honorables membres de l’union parlementaire arabe est parmi les initiatives qui nous tiennent le plus à coeur et les plus intimement liées à nos préoccupations et nos domaines d’intérêt, ce qui se reflète à travers la place qu’occupe le Maroc en tant que forum de nombre de rencontres internationales sur Al Qods, tenues à l’initiative de Notre Majesté ou sous Notre patronage.
Nous avons assumé depuis 1979 la présidence du comité Al Qods issu de l’Organisation de la Conférence Islamique et Nous avons oeuvré depuis environ vingt ans, avec foi et conviction, à la tête de ce comité au service de la cause d’Al Qods Acharif, en étant attentif aux avancées de la lutte du peuple palestinien pour la libération de sa terre et l’établissement de son Etat indépendant.
Dans cette optique, le comité Al Qods a adopté ses recommandations et ses résolutions pertinentes en harmonie avec les décisions internationales émises par l’assemblée générale de l’organisation des Nations Unies et le Conseil de Sécurité, qui ont condamné l’occupation d’Al Qods, dénoncé la modification du statut de la ville et appelé Israël à annuler toutes les mesures prises pour sa judaisation. Nous avons aussi oeuvré en parallèle à la création de l’institution ’’Beit Mal Al Qods’’, veillant en personne à la mise en place de ses mécanismes juridiques et organisationnels pour en faire une institution apte à réaliser les objectifs qui lui sont assignés, ne ménageant aucun effort pour sensibiliser la communauté internationale aux dangers qui menacent Al Qods Acharif, maintenant les canaux de contacts à ce sujet entre Nous-même et Sa Sainteté le Pape Jean Paul II et réaffirmant à chaque occasion qui se présente, lors des réunions du comité Al Qods ou autres circonstantes, que la préservation de l’identité de la ville sainte est en même temps l’affaire du monde islamique et du monde chrétien et que la judaisation qui vise les institutions islamiques et à disloquer la composition sociale islamique, affecté par d’autres aspects la présence chrétienne.
C’est pourquoi Nous considérons que l’organisation d’une session académique pour débattre spécifiquement des idées et points de vue sur ce thème, avec la participation de membres de l’union parlementaire arabe, constitue une opportunité d’appréhender cette question sous des angles différents, en vue de favoriser une prise de conscience plus aigüe de cette cause en ce sens qu’elle implique d’en éclairer davantage l’opinion publique internationale, par le biais de tous les moyens d’information possibles et toutes les formes d’expression et de communication disponibles, pour permettre à celle-ci de cerner tous les aspects de cette question qui ne concerne pas seulement les Musulmans, mais tous les adeptes des religions célestes qui sont préoccupés par le sort du patrimoine humain et civilisationnel que recèle la ville d’Al Qods depuis cinq millénaires.
Cette longue histoire de la ville d’Al Qods dont la phase islamique en constitue au moins le quart, nous enseigne, pour peu qu’elle soit appréciée avec objectivité impartialité, que cette cite a constitue effectivement un espace de rencontre et de coexistence entre les religions, les civilisations et les peuples sémites. l’une des vérités de cette histoire, écrite en des langues multiples et avec objectivité, est que l’intolérance religieuse et les propensions agressives pour assoir l’hégémonie au profit d’une seule communauté religieuse sur la ville, ont été à l’origine des crises et tragédies qui se sont abattues sur Al Qods. Cette histoire témoigne aussi que les Musulmans seuls, ont symbolisé la tolérance, le respect des gens du livre et l’action empreinte d’équité.
A titre d’exemple, ce sont les Musulmans qui ont levé l’interdiction imposée par l’empire byzantin tout au long du 7ème siècle à l’entrée des Juifs dans la ville d’Al Qods. Ce sont aussi eux qui ont levé le même interdit qui frappait les Juifs pendant la domination des croises sur la ville sainte au cours du 11ème siècle de l’ère chrétienne. L’histoire retient ainsi que ce sont les Musulmans qui ont ouvert la voie à l’implantation des Juifs dans la ville sainte au cours des deux siècles précités, outre le fait que ce sont eux qui ont sécurisé des routes du pèlerinage vers la ville sainte au profit des chrétiens. Cette attitude des Musulmans envers les gens du livre, Chrétiens et Juifs, a été érigée en règle de conduite tout au long des siècles, car elle émane de la foi Musulmane qui considère les religions révélées comme une seule religion, même si leurs commandements diffèrent.
Dieu a dit dans son Livre Sacré : ’’Lui (le Messager de Dieu) et les Croyants, tous ont cru en Dieu, en ses Anges, en Ses Livres et en Ses Prophètes’’ (Coran). Grâce à cette foi qui les engage, les Musulmans ont accédé à des rangs élevés de la tolérance et du respect des gens du livre, lesquels ont pu vérifier sous le règne islamique la réalité effective de cet engagement. La meilleure preuve de cette tolérance est le maintien du multi-confessionnalisme dans la ville sainte qui a été gouvernée par les Musulmans pendant 14 siècles. Car si les Califes et les Emirs des Musulmans avaient opté, des le début, pour une démarche semblable à celle suivie par Fernando et isabelle en Espagne pour l’élimination des Musulmans et la destruction de toute trace de leur legs, ou comme le plan adopté par d’autres pays européens contre les Juifs à des époques de l’histoire contemporaine, il n’aurait subsiste à Al Qods nulle trace d’église, ni de synagogue, ni d’habitants juifs et chrétiens.
Le même constat est valable pour les contrées de l’orient qui ont été gouvernées par les Musulmans et qui étaient peuplées par des communautés chrétiennes orthodoxes. Elles ont pu préserver leur identité jusqu’à nos jours et les Musulmans ont continué à les protéger contre l’intolérance des autres communautés à des étapes connues de l’histoire de l’affrontement entre les deux églises. Il s’agit la d’une vérité historique indéniable. Les historiens juifs eux-mêmes reconnaissent que leurs communautés ont bénéficié, sous le règne islamique, de la sécurité et du respect qu’elles n’ont pu connaître en dehors des pays musulmans pendant de longues périodes de l’histoire, à tel point que certains de ces historiens ont reconnu que les Juifs ont vécu dans la ville d’Al Qods Acharif sur un pied d’égalité avec les Musulmans, jouissant d’une quasi autonomie, participant aux conseils de la Choura et accédant à des fonctions au sein des administrations et des cabinets de l’Etat à certaines périodes déterminées de l’histoire. Cette histoire nous enseigne que certains dirigeants musulmans ont reconstruit des églises détruites, outre l’autorisation donnée pour le construction d’autres églises sous le règne islamique.
L’histoire nous rappelle aussi qu’une délégation de l’Empereur Charlemagne envoyée dans la ville sainte, a offert aux Musulmans les clés de l’église de la résurrection et du Saint-Sepulcre en signe de confiance en leur engagement à veiller à la protection et au respect du caractère sacré de ces lieux. De même, le Calife Haroun Errachid a autorisé cet Empereur à construire l’église de la Vierge dans la ville sainte. Il n’est donc pas étonnant de constater que les chrétiens et les juifs confiaient aux Musulmans le soin de protéger et d’assurer l’entretien de leurs lieux de culte. Il s’est trouvé ainsi qu’une famille musulmane d’Al Qods a assuré l’entretien du tombeau du Prophète David depuis le début de l’Empire Othoman, comme en témoigne un firman du Sultan Suleiman le Magnifique.
Messieurs,
L’histoire témoigne donc, par une multitude de sources, qu’Al-Qods est demeurée, sous l’Islam, un espace ou régnait le respect des religions célestes et de leurs adeptes, un espace de culture et de civilisation commune. Mais à notre époque, cet espace a connu un changement radical en traversant un tournant historique annonciateur d’une tragédie analogue à ces vieux drames que l’humanité a cru avoir relégués au passé et que la conscience de l’humanité réprouve comme étant un des séquelles des époques obscures.
Si le Maroc a donné l’exemple de cette coexistence et de ce respect mutuel entre les adeptes des religions monothéistes et si ses souverains ont, de tous temps, compte les Juifs parmi les sujets de Amir Al-Mouminine, jouissant des mêmes garanties que les Musulmans pour ce qui de leur sécurité et du respect de leur dignité, les autorités israéliennes ont décidé, trois jours seulement après l’occupation d’Al-Qods en 1967, de dynamiter et de raser le quartier des Marocains.
Nous ne citons ce cas que pour illustrer toute la haine et le reniement que les extrémistes juifs vouent aux valeurs des religions célestes, ainsi que pour donner un exemple de ce que les Musulmans d’Al-Qods ont eu à endurer et endurent encore quotidiennement, en réponse à la tolérance et la noble attitude qu’ils ont de tout temps observées envers les Juifs. Ainsi, l’occupation israélienne d’Al-Qods Acharif marque le début du changement du cours de l’histoire rayonnante de cette ville, La muant d’un espace de rencontre paisible et serein entre les religions et les confessions en un espace de tensions et de manifestations agressives.
En dépit de cette politique israélienne qui a hypothéqué le présent de la ville d’Al Qods, par la judaisation et la colonisation illégitimes qui font fi des résolutions internationales, nous ne devrions pas, en tant dirigeants politiques, désespérer d’un retour au dialogue pour parvenir à une paix juste et durable engageant l’ensemble des parties concernées et rétablissant le peuple palestinien dans son droit légitime à faire d’Al-Qods la capitale de son Etat indépendant. L’histoire nous enseigne que toutes les formes de domination et d’arrogance et la substitution de la logique de la force à celle de la justice et de l’équité, demeurent précaires et vouées à la disparition du fait de la lutte légitime et déterminée pour les éradiquer, et que le triomphe de cette lutte est inéluctable car, en fin de compte, ne résiste à l’épreuve de l’histoire que l’entreprise basée sur la légitimité, qui recherche la paix et privilégie la coexistence pacifique entre les confessions et les communautés au détriment d’une existence dans les tranchées de la confrontation et des conflits.
Messieurs,
C’est en nourrissant l’espoir de voir rétablir la légitimité et en aspirant à faire prévaloir l’équité dont l’esprit doit imprégner toute rencontre, que Je vous invite à débattre du thème de cette session, avec le souci de jeter davantage de lumière sur l’ensemble de ses aspects et de proposer les voies susceptibles de substituer le dialogue à la rupture et la compréhension à la divergence, convaincu qu’une coexistence réelle entre les habitants d’Al-Qods et la promotion d’une culture de tolérance et de dialogue après le rétablissement du peuple palestinien dans tous ses droits légitimes, est à même de garantir à la ville d’Al-Qods un avenir de paix à l’édification duquel contribueront les uns et des autres, comme ce fut le cas par le passe. Dans un monde comme le nôtre ou prévalent les facteurs de tensions raciales et de conflits culturels du fait de l’égocentrisme et du recours à la logique de la force, ce dont nous avons le plus besoin c’est de faire preuve de rationalité, de tolérance et d’esprit d’équité et de s’imprégner des valeurs religieuses magnanimes.
Il appartient donc aux intellectuels et aux hommes des religions monothéistes, où qu’ils soient, d’assumer leurs responsabilités dans ce domaine, à travers la mobilisation des moyens d’information contre la culture raciste et les partisans de l’extrémisme religieux dont certains Juifs illustrent les aspects les plus excessifs, pour faire place à une culture de dialogue avec une rectification des concepts colportés par les médias alignés sur Israël, car l’information, de nos jours, est en tête des moyens de lutte et d’action légitime.
C’est la l’une des missions qui sont du ressort du domaine de la pensée dont vous êtes les représentants et qui constituera le meilleur soutien à l’action des dirigeants politiques en quête de la consolidation des fondements de la paix et de la légitimité dans la ville d’Al-Qods Acharif en tant que partie intégrante de la Cisjordanie occupée, sachant que l’occupation ne confère aucun droit pour justifier la domination et encore moins pour judaïser la ville ou effacer son identité arabe et islamique.
Puisse Dieu couronner de succès vos actions, vous préserver et nous inspirer à tous le bien dans nos paroles et nos actes. Que la paix, la bénédiction et la miséricorde de Dieu soient sur vous.
26/11/1998
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