Rapport US sur les droits de l’Homme au Maroc

27 février 2009 - 16h40 - Maroc - Ecrit par : L.A

“Plutôt que de donner une note au Maroc et sa gestion de la question des droits de l’Homme, je dirais que l’on voit les progrès accomplis en la matière par le Royaume ». Au-delà de la prudence toute diplomatique, Robert P. Jackson, le chargé d’affaires de l’ambassade des Etats-Unis au Maroc, n’hésite pas, ce jeudi 26 février, soit 24 heures après la publication par le Département d’Etat américain d’un rapport sur la situation des droits de l’Homme au Maroc, en 2008, à reconnaître les progrès « en continu ».

Le Maroc, explique ce diplomate qui est un ancien directeur du bureau de promotion des droits de l’Homme et de la démocratie au Département d’Etat, est « sur la voie de la réforme et du respect des droits de l’Homme ». Mais le Maroc peut mieux faire. Et les Américains –qui auscultent la situation des droits humains en terre marocaine, loin de la petite lorgnette américaine mais sur la base des critères de la déclaration universelle des droits de l’Homme- ont encore bien des motifs de préoccupation.

Robert Jackson, qui recevait la presse ce jeudi matin, en son domicile, pour en débattre, résume les problèmes pointés par le département d’Etat en trois points, véritable talon d’Achille de Rabat. D’abord les abus commis par les forces de sécurité et leur impunité qui retiennent toute l’attention des Américains. Vient ensuite la liberté d’expression et tout particulièrement le cas des blogueurs qui ont défrayé la chronique et ému l’opinion publique à cause d’une justice sourde et aveugle. Condamnés, ils finiront par être relâchés après une mobilisation tant nationale qu’internationale. Commentaire inspiré de M. Jackson : « Nous émettons le vœu de voir un nouveau code de la presse qui ne contiendrait pas de peine privative de liberté ». Enfin, la traite des personnes qui se confond aussi ici avec l’esclavage moderne est pointée par le Département d’Etat. Ici, c’est le travail des enfants –les petites bonnes, les enfants qui travaillent dans les usines mais aussi le tourisme sexuel dont sont victimes les enfants …- qui est vigoureusement dénoncé.

Le Maroc est également épinglé sur le volet de la traite des personnes. « Le pays est une source de victimes, hommes, femmes et enfants, faisant l’objet d’une traite vers l’Europe et le Moyen-Orient à des fins de travail forcé et d’exploitation sexuelle (…). Les femmes font l’objet d’une traite en Arabie Saoudite, en Syrie et aux Emirats Arabes Unis et sont forcées de travailler comme prostituées alors qu’on leur avait promis un travail de domestique », peut-on lire dans le rapport du département d’Etat.

Pas de disparition politique mais des conditions d’incarcération déplorables

Si le dernier rapport du département d’Etat est catégorique sur l’inexistence de cas de disparition forcée au Maroc, il s’inquiète en revanche des conditions de détention dans les prisons. « Les conditions de détention restent extrêmement mauvaises et ne répondent pas en général aux normes internationales (…) Actuellement, 60.000 détenus ont moins d’un mètre carré et demi par personne », relève le rapport du département que dirige Hilary Clinton.

Au Sahara, le Maroc -et contrairement au dernier rapport de Human Right Watch- s’en sort plutôt bien et reçoit même un satisfécit américain. « Concernant le Sahara, il faut noter qu’il y a une grande augmentation du respect des droits de l’Homme. En fait la situation des droits humains y est la meilleure jamais constatée jusque-là même s’il persiste des problèmes d’expression et d’association au Maroc. On peut dire que la situation y est plus ou moins conforme avec celle du Maroc », a expliqué le chargé d’affaires de l’ambassade des Etats-Unis à Rabat.

Le dernier rapport du département d’Etat sur la situation des droits de l’Homme n’est pas destiné à occuper une étagère de bibliothèque. « Nous avons travaillé aussi bien avec la société civile que le gouvernement. Nous avons eu un bon dialogue avec le gouvernement qui a contribué à clarifier certains faits, vérifier des informations et en éliminer d’autres. Il y a bien sûr des questions plus sensibles que d’autres ». Les Américains ont informé les autorités marocaines de la situation des droits de l’Homme, avant que ne soit rendu public le rapport annuel du département d’Etat. « Nous avons exhorté le gouvernement à entreprendre des actions notamment dans la lutte contre l’impunité et celle de la traite des personnes et le renforcement de la liberté d’expression et d’association », précise Robert Jackson.

Les dernières arrestations spectaculaires en lien avec des affaires de corruption laissent à supposer que la voix américaine a été entendue.

Source : Libération Maroc - Narjis Rerhaye

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : États-Unis - Liberté d’expression - Enquête - Censure - Prison - Torture - Esclavage moderne

Ces articles devraient vous intéresser :

L’opération discrète du Maroc pour libérer 39 Marocains en Birmanie

Nasser Bourita, ministre des Affaires étrangères, de la coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, revient sur la libération des jeunes Marocains séquestrés et torturés par des réseaux criminels en Birmanie et en dévoile le nombre...

Maroc : Ahmed Assid dénonce la répression des voix d’opposition par l’astuce des mœurs

Dans un podcast, l’universitaire et activiste amazigh Ahmed Assid s’est prononcé sur plusieurs sujets dont la répression des voix contestataires au Maroc, la liberté d’expression ou encore la laïcité.

Maroc : le mariage fastueux de la fille d’un haut dirigeant soulève des polémiques

Le mariage somptueux organisé par le président de la Chambre des conseillers, Naam Miyara, pour sa fille, soulève de vives polémiques. La quatrième personnalité politique du Maroc après le roi, le chef du gouvernement et le président de la Chambre des...

Le Magazine Marianne censuré au Maroc

L’hebdomadaire français Marianne (numéro 1407) a été interdit de distribution au Maroc, en raison d’un dessin caricatural jugé offensant pour le prophète Mohammad.