En marge de la visite de Prak Sokhonn, vice-premier ministre et ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération internationale du royaume du Cambodge au Maroc, il a été décidé de l’organisation d’un forum d’affaires.
Dans le cadre d’une opération de diplomatie publique, l’Otan a ouvert ses portes à une délégation de journalistes marocains qui on tenté de lever le voile sur les raisons d’une telle impopularité au sein des populations arabo-musulmanes. Les efforts de communication justifie l’enjeu : la bataille d’influence en Méditerranée.
Depuis le 11 septembre 2001, l’Otan sous la pression américaine a braqué ses projecteurs sur le Maghreb pour l’intégrer dans une initiative globale de rapprochement avec l’Afrique et le grand et Moyen-Orient arabe. Avec un projet multidimensionnel touchant à l’économie, la politique et la culture, les forces de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord ont grand besoin, pour leur repositionnement stratégique dans les zones d’influence privilégiées comme la Méditerranée, d’améliorer leurs relations avec les gouvernements et leur image dans l’opinion publique.
Mais jusqu’ici, cette stratégie globale n’a pas encore été mise en œuvre, et seule la question sécuritaire semble essentielle pour les Alliés. Ainsi, on ferme les yeux sur les questions de la démocratie et des droits de l’homme, tout en se gardant de prendre parti dans les conflits opposants ces pays.
Aujourd’hui, et comme l’a confirmé le colonel Giuseppe Clemente, chef militaire de la section Dialogue méditerranéen : « 85% du programme méditerranéen est militaire ».
Du côté de l’Otan, les priorités sont claires. Ce qui n’est pas forcément le cas des pays partenaires.
Main basse sécuritaire sur la Méditerranée
Après les attentas du 11 septembre 2001, les Alliés à la demande des Etats-Unis ont adopté huit mesures destinées à accroître le partage des données du renseignement, renforcer la sécurité des installations des Etats-Unis et des Alliés, mais aussi accorder des autorisations de survol générales ainsi que l’accès aux ports et aux aérodromes.
L’objectif premier fut le contrôle des routes maritimes en Méditerranée. Du seul point de vue énergétique, quelque 65% du pétrole et du gaz naturel consommés en Europe occidentale passent chaque année par la Méditerranée, les principaux pipelines reliant la Libye à l’Italie et le Maroc à l’Espagne.
C’est dès 1994 que débute la collaboration entre les pays de la Méditerranée et l’Otan. Le Maroc fait parti des 5 membres initiaux avec l’Egypte, Israël, la Mauritanie et la Tunisie. La Jordanie n’a rejoint la coopération qu’en 1995 et l’Algérie en 2000.
Dix ans plus tard, si le dialogue méditerranéen avait pour but de parvenir à une meilleure compréhension entre les Alliés et les partenaires méditerranéens. Au sommet d’Istanbul en 2004, les pays du dialogue sont invités à renforcer le partenariat en termes d’opérationnalité.
En parallèle, l’Initiative de coopération d’Istanbul a renforcé la coopération entre les Alliés et les pays de la région du Moyen-Orient élargi.
Ainsi, l’Otan avait d’abord commencé à déployer sa force navale permanente en Méditerranée orientale dès octobre 2001.
Et ce n’est qu’en 2003 que le mandat de l’opération Active Endeavour (efforts actifs relatifs à la surveillance du trafic maritime en Méditerranée contre le terrorisme) a été élargi au Détroit de Gibraltar.
Ce passage à la Méditerranée a toujours été considéré comme vulnérable, car le Détroit n’est pas large, et environ 3.000 cargaisons commerciales y transitent chaque jour ! Finalement, en mars 2004, l’Otan a finit par propager son mandat à l’ensemble de la Méditerranée.
Et pour soutenir son opération Active Endeavour, l’Otan peut largement faire appel au soutien des Alliés en Méditerranée. Les forces maritimes espagnoles, qui escortent les navires au Détroit de Gibraltar, y jouent un rôle particulièrement important. De même pour le Maroc, « un pays ayant une sérieuse tradition militaire avec des forces armées très capables ayant contribué à des missions de maintien de paix dans le monde à plusieurs reprises » note, satisfait, le secrétaire général délégué de l’Otan, Alessandro Minuto Rizzo.
Une autre mesure initiée par le président des Etats-Unis, l’Initiative de sécurité contre la prolifération des ADM, prend aussi acte en Méditerranée. Approuvé par les membres permanents de l’Otan en 2003, cette Initiative jouit elle aussi d’un cadre d’exception vue qu’elle relève de « la lutte contre le terrorisme » et permet avec l’accord des pays méditerranéens un contrôle maritime et aérien.
Des activités selon les demandes
Pour concrétiser ces rapprochements avec ces partenaires méditerranéens et moyen-orientaux, l’Otan a privilégié la coopération bilatérale. « Il est plus facile de traiter avec un seul partenaire, nous pouvons alors considérer les besoins particuliers pour optimiser la collaboration » a expliqué le secrétaire général délégué de l’Otan, Alessandro Minuto Rizzo.
Il faut avouer que le manque d’unité du monde arabe (et du Maghreb avec l’absence cruelle de l’UMA) pèse sur ses capacités à plaider en bloc, et donc sur ces capacités à unifier les revendications.
L’Otan propose donc une carte à ces partenaires, qui sont libres de choisir comme de refuser.
« Il n’y a pas de traité ni aucune autre obligation écrite. C’est une coopération simple, très pratique et pas très institutionnalisé pour éviter les lenteurs administratives et permettre une grande flexibilité. Chaque pays est libre de participer à son niveau et sa mesure ».
L’organisation atlantiste propose à ces partenaires un panel d’activités pratiques tel que des conseils personnalisés sur la réforme de la Défense, des exercices militaires et éducatives susceptibles d’améliorer l’aptitude des forces des pays participants à opérer avec celles de l’Alliance, ou le financement de programmes d’entraînement et de centres de formation.
Le partage d’informations étant une priorité pour les pays membres, l’Otan participe activement à améliorer le partage du « Renseignement » avec la mise à niveau en termes de matériels hautement technologiques.
Maroc, coopération en transition
Lors de la tenue de la réunion de l’Otan à Rabat en 2005, un projet de création d’un centre d’information et de documentation destiné à aider dans la prise de décision concernant les activités que les pays de la région veulent entreprendre avec l’Otan, « aucun calendrier n’est encore fixé », même si les officiels ont assuré la concrétisation prochaine de ce projet.
Idem pour la question de savoir si l’Otan envisage de créer sur le sol marocain une base militaire : « Non, l’Otan n’a pas l’intention d’installer une base militaire au Maroc », a nié catégoriquement le secrétaire général délégué de l’Otan : « ça n’a absolument aucun sens, à quoi cela nous servirait-il ? » a-t-il ajouté.
D’ailleurs dans le cadre des opérations dirigées par l’Otan, le Maroc déploie actuellement des troupes au Kosovo, et en Bosnie (aujourd’hui sous gestion de l’Union européenne) et a participé à des opérations de paix en Afrique également (voir interview de l’ambassadeur).
Si la coopération Otan / Maroc va bien, le secrétaire général-adjoint a toutefois, estimé qu’elle se situe « à un moment de transition » et qu’« il faudrait la développer en quantité ».
Si 3 ou 4 années ont été utiles pour tracer le cadre de base et de principes de la coopération bilatérale, « on pourrait faire plus que ce que nous faisons aujourd’hui », a-t-il espéré.
L’Economiste - Najlae Naaoumi
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