Le séisme a fait près de 600 morts

AL-HOCEIMA, Maroc (Reuters) - Des milliers de Marocains tentaient mercredi de reprendre le cours de leur vie dévastée 36 heures après un puissant séisme ayant fait près de 600 morts dans le nord du pays.

L’espoir de retrouver des survivants s’amenuise d’heure en heure dans les villages de montagne difficiles d’accès aux abords du port méditerranéen d’Al-Hoceima, au pied de la chaîne du Rif.

Selon le ministre de la Santé, Mohamed Cheikh Biadillah, au moins 564 personnes ont été tuées, ce qui représente la plus grave catastrophe naturelle qu’ait subie le Maroc depuis plus de 40 ans. En février 1960, un séisme avait rasé la ville d’Agadir, sur la côte Atlantique, tuant plus de 12.000 personnes.

Dans la nuit de mardi, la région a été ébranlée par des dizaines de répliques traumatisant un peu plus les habitants, qui ont passé leur première nuit dehors ou dans des abris de fortune.

Suivant le rite musulman, les premières inhumations se sont déroulées dès mardi mais la plupart des corps sont toujours regroupés dans une morgue improvisée à l’aéroport d’Al-Hoceima.

A Aït-Kamara, un village situé à une vingtaine de kilomètres au sud d’Al-Hoceima, la plupart des habitations se sont effondrées comme des châteaux de cartes.

"Ici, 90% des maisons ont été détruites", a raconté l’adjoint au maire, Mohammed Amiou, à l’agence de presse marocaine Map. "Il y a plusieurs petits villages qui n’ont plus d’électricité du tout et tout le monde est parti".

La plupart des victimes ont été surprises dans leur sommeil, dans la nuit de lundi à mardi, par une secousse mesurant 6,5 sur l’échelle de Richter. On estime que la région abrite entre 300.000 et 400.000 habitants.

"Beaucoup de gens sont restés prisonniers des gravats, il n’y a pas d’équipement", a déclaré à Reuters Télévision le maire d’Im-Zouren, un autre village des environs d’Al-Hoceima. "C’est un désastre complet, le monde doit nous aider !".

AIDE INTERNATIONALE

"Ils nous ont apporté deux tentes où l’on pouvait dormir à vingt alors qu’on était 200", explique Abdelmajid Nachat, 47 ans. Fatima Moussaoui raconte de son côté qu’elle a passé la nuit dehors, sous la pluie et sans eau potable.

"Ma fille a les jambes fracturées. Elle n’est pas soignée. Et en plus, il a fallu que nous passions la nuit avec des hommes que nous ne connaissions pas", ajoute cette femme âgée et voilée.

L’aide internationale commence à s’organiser, la France ayant annoncé l’envoi d’une aide d’urgence dans la journée de mercredi. Une quinzaine de secouristes et leurs chiens doivent décoller dans un avion de la protection civile, avec du matériel de déblaiement.

L’Algérie voisine, récemment frappée par un séisme ayant fait plus de 2.300 morts près d’Alger, l’Allemagne, le Portugal, l’Espagne, la Belgique, le Luxembourg et les Etats-Unis ont également proposé leur assistance.

Dans les villages, certains survivants ont commencé à creuser à mains nues dans les décombres, n’ayant ni pelle, ni matériel de levage ou d’outils pour cisailler les barres de fer.

"Ils ont envoyé l’armée, qui nous a pratiquement ordonné d’arrêter de creuser, mais ils n’ont pas pu faire grand chose eux-mêmes faute de matériel", déplore un enseignant, Abdelkhalek.

Ses parents, trois de ses frères et une soeur ont été tués dans l’effondrement de la maison familiale, située dans le village d’Aït-Abdelaziz où 70% des habitations se seraient effondrées.

"Ma soeur criait, elle me suppliait de soulever une porte très lourde sous laquelle elle était coincée. Nous n’avons pas réussi. Elle est morte", raconte-t-il, en pleurs.

A Al-Hoceima, ville de quelque 70.000 habitants en bord de mer, les dégâts sont limités mais les autorités sont débordées par le nombre de victimes.

D’après la Map, le roi Mohammed VI a annulé ses engagements pour superviser les opérations et envisagerait de se rendre sur place

Par Souhail Karam